Christian Grenier, auteur jeunesse
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L’édition en général
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     Oui. Mais là encore, il arrive que le titre ne séduise ni le directeur littéraire, ni le service commercial. A quoi bon écrire un chef d'œuvre si le titre ne donne à personne l'envie d'acheter l'ouvrage ? En ce cas, l'éditeur demande à l'auteur de réfléchir à un autre titre. Cela arrive une fois sur trois ou quatre.
     Certains romans n'ont pas pour titre celui que j'avais proposé à l'origine : en consultant Sabotage sur la planète rouge, Cheyennes 6112, Le seigneur des neuf soleils, Coups de théâtre, on constatera que le titre a changé, soit parce que l'éditeur en a proposé un, soit parce que j'ai, à sa demande, trouvé un autre titre qui l'a séduit.
     L'exemple le plus caractéristique est mon récit Le Jardin maudit, publié dans Je Bouquine en 1997. J'avais appelé mon histoire Je meurs où je m'attache, qui est la devise du lierre. La rédaction de Je Bouquine a jugé ce titre long, triste et compliqué. J'en ai proposé un autre : Je t'aime, un peu, beaucoup... Cela a semblé encore trop long et l'on m'a alors persuadé que Le jardin maudit était un excellent titre. Je me suis plié à cette proposition un peu étrange ( le jardin de l'histoire tient une petite place et il n'est pas vraiment maudit... mais bon, c'était l'époque où la collection Chair de poule faisait un tabac ).
     Pour la réédition en poche de ce petit roman, j'ai demandé à ce qu'il ressorte avec l'un de mes deux titres. Bayard a accepté Je l'aime, un peu, beaucoup… Mais le livre se vend peu et il semblerait que le titre y soit pour quelque chose. Sans doute se vendrait-il davantage avec le titre Le jardin maudit !



     Oui ! Aucune remarque ne m'a été faite, ces titres sont passés comme une lettre à la poste



     Parfois. C'est rarement pour des raisons financières car il n'a guère de pouvoir pour modifier les contrats.
     Le plus souvent, c'est parce que les « améliorations » qu'il me suggère ou qu'il cherche à m'imposer ne me semblent pas convaincantes. Il m'est arrivé d'avoir affaire une ou deux fois à des responsables éditoriaux qui n'avaient rien compris à mon histoire et me demandaient de la modifier pour qu'elle devienne conforme à celle qu'ils auraient eu envie de lire... ou d'écrire.
     Certains directeurs littéraires en effet aimeraient écrire et ils n'en ont ni le temps, ni les moyens. Ils se servent donc des auteurs comme les porte-parole de récits qu'ils aiment mais qu'ils préféreraient plus conformes à leurs goûts. C'est là un travers contre lequel il m'a aussi fallu lutter, quand j'étais moi-même responsable chez Gallimard. Un écrivain a en effet parfois tendance lui aussi à vouloir que les récits des autres auteurs soient conformes à leur façon d'écrire ou de penser ; et en même temps, il est parfois plus à même de comprendre les difficultés de l'écrivain puisqu'il en est lui-même un !
     Honnêtement, les conflits sont plutôt rares. Je ne suis d'ailleurs pas trop têtu, parfois j'ai tort et je me plie trop facilement à des directives qui ne sont pas toujours justifiées.
     J'ai aussi un petit grief à l'égard d'un directeur littéraire ( dans le domaine adulte ) qui aurait dû être plus exigeant avec mon texte. Après coup, je me suis aperçu que le roman souffrait de certaines faiblesses qu'il aurait dû relever, et m'inviter à rectifier. C'est là aussi son rôle : demander à l'auteur de livrer le meilleur de lui-même, révéler au grand jour, quitte à le contrarier ou à le faire souffrir, ce qu'il porte en lui et n'a pas encore réussi à traduire.




     Délicat, de répondre publiquement à une telle question !
     En fait, les titres parlent d'eux-mêmes : un auteur publie surtout là où se sent à l'aise, en phase avec l'ambiance ou les partenaires d'une maison d'édition !
     Je voue à Rageot, mon plus vieil éditeur, une tendresse particulière, même si j'ai relativement peu publié chez lui — la SF n'est pas son genre de prédilection ! La fondatrice de la maison Tatiana Rageot, a été la première à me faire confiance en 1970. Après sa mort, c'est avec sa fille, Catherine Scob, que j'ai longtemps travaillé, moins en tant qu'auteur que collaborateur ( je lisais, corrigeais des manuscrits, effectuais des travaux de rewriting... ).
     Aujourd'hui, Catherine Scob a pris sa retraite et je suis ravi de travailler avec sa fille... qui est donc la petite fille de mon premier éditeur ! Caroline Westberg est une excellente directrice littéraire, dont j'apprécie les jugements et les conseils.
     Dans le domaine de la SF, c'est bien sûr avec Denis Guiot que la complicité est la plus grande... Et là, il est moins question d'éditeur que de personne. Je suis d'ailleurs passé avec lui de chez Hachette chez Mango. Le problème en effet de certains de mes éditeurs, c'est que leurs responsables littéraires changent ! Un auteur a plus tendance à être fidèle à un directeur littéraire qu'à un éditeur.
     Chez Nathan et Milan, où je publie de la SF, j'apprécie beaucoup la franchise et la cordialité des responsables éditoriales. L'ambiance chaleureuse de Bayard me séduit... et depuis que mon vieil ami Jack Chaboud est responsable chez Magnard, je regrette de ne pas pouvoir lui proposer davantage de textes. Mais voilà le problème : je connais beaucoup de monde, j'ai tissé des liens étroits avec des responsables devenus des amis... et quand je choisis d'envoyer un manuscrit à tel éditeur plutôt qu'à tel autre, je crains toujours de vexer quelqu'un !

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Dernière mise à jour du site le 12 octobre 2021
Adresse postale : Christian Grenier, BP 7, 24130 Le Fleix