Christian Grenier, auteur jeunesse
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Ses choix littéraires : jeunesse, SF, polar …
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     Je n'ai pas choisi.
     A vingt ans, j'écrivais pour mon plaisir, dans tous les domaines et je crois pour tous les âges.
     Le hasard a voulu que mon premier manuscrit a été jugé «  SF jeunesse » ( voir « Ses débuts » ). Je l'ai remanié dans cet esprit à la demande de mon premier éditeur, qui m'en a réclamé un deuxième. Mon troisième roman, La Machination, a décroché le Prix ORTF. J'étais devenu un « auteur jeunesse » !
     Encouragé par ces premiers succès et intrigué par cette littérature que beaucoup d'adultes méprisaient, j'ai approfondi peu à peu ce domaine.
     Le fait que j'aie été enseignant à cette époque a sans doute pesé dans la balance : ma façon d'écrire spontanément semblait convenir au public auquel je faisais quotidiennement face, des élèves de collège.
     Bien sûr, plus tard, je me suis aussi adressé aux adultes, mais avec moins de passion et de succès. J'avais déjà beaucoup d'éditeurs jeunesse qui jugeaient que c'était là que je m'épanouissais avec le plus de bonheur, notamment dans le roman d'aventures !




     Depuis l'enfance.
     Dans les années cinquante, la SF faisait partie intégrante de la littérature et de la BD.
     Quand je lisais un Jules Verne, je me moquais de savoir si le roman relevait de la SF ( De la Terre à la lune, 20 000 lieues sous les mers, Voyage au centre de la Terre ) ou du simple roman d'aventure géographique ( Cinq semaines en ballon, Le tour du monde en 80 jours ) Dans les BD, les héros flirtaient avec la SF, les technologies de pointe et l'exploration spatiale : Zig et Puce, Mickey, Tintin, Spirou — et même les Pieds Nickelés. Les lecteurs, jeunes ou adultes, ne faisaient pas la différence.
     Les premiers romans de René Barjavel ( Ravage et Le voyageur imprudent, 1943 ) n'étaient pas classés SF. Cette spécialisation et le terme même de SF sont apparus peu à peu en France dans les années cinquante avant de s'affirmer vers 1970.
     Le 4 octobre 1957, un événement m'a fait m'intéresser à l'astronomie. A la vérité, mon intérêt aigu et précis pour la SF est né de cette brusque passion pour l'astronomie.



     Ce matin-là, ma mère m'a réveillé en me révélant que les Soviétiques — les Russes — avaient envoyé dans l'espace un objet qui n'était pas retombé et qui tournait autour de la Terre. Fasciné, j'ai passé des heures à écouter le message radio, le fameux bip-bip, que lançait cet objet de 60 kilos.
     Aujourd'hui, l'événement paraît banal. Les enfants savent très tôt ce qu'est un satellite artificiel. A l'époque, c'était le premier. Un exploit inimaginable ! J'ai compris que la conquête spatiale avait commencé. Qu'atteindre la lune, comme l'imaginaient Jules Verne ou Hergé, ne relevait pas du rêve mais du possible.
     Un mois plus tard, les Soviétiques envoyaient dans l'espace une chienne, Laïka. Puis, en avril 1961, un homme, Gagarine. J'ai donc suivi depuis l'âge de douze ans avec passion toutes les étapes de la conquête spatiale. Je me suis construit moi-même une lunette astronomique, et j'ai lu tout ce qui avait trait au ciel, à l'espace. Je suis ainsi passé peu à peu de l'astronomie aux romans de SF, auxquels la lutte pour la conquête de la lune avait soudain redonné une brûlante actualité.



     Adolescent, je lisais les magazines Atome Kid, Spoutnik, Sidéral, Cosmos, traduits de l'Américain. Dans les années soixante, j'ai découvert les trois seules collections de SF qui existaient sur le marché : Anticipation ( Fleuve Noir ) Le Rayon Fantastique ( Hachette/Gallimard ) et Présence du Futur ( Denoël ). Mais je ne lisais pas que de la SF. J'étais aussi passionné par la littérature générale et le nouveau roman : Nathalie Sarraute, Robbe-Grillet, Michel Butor. C'est aussi l'époque où j'ai découvert le roman policier.
     Je n'ai jamais eu de mépris pour aucune littérature, je me nourrissais de tout ce qui me tombait sous la main, y compris de ce qui parfois... me tombait des mains !



     Attention, une fois de plus, je n'ai pas choisi la SF... ni même la littérature jeunesse ( voir les réponses aux questions précédentes ).
     Admettons que face à mes premières publications et aux ricanements de certains de mes collègues enseignants, je me suis entêté dans des domaines qui me paraissaient passionnants et injustement méprisés.
     A l'époque, mes élèves étaient eux-mêmes très demandeurs de récits de SF. Et il n'existait presque rien dans le domaine jeunesse. En 1970, il m'apparut donc très tentant d'explorer un territoire quasiment vierge.
     Dans mon premier essai ( Jeunesse et science-fiction, 1972 ) je recensai moins de trente romans de SF à destination de la jeunesse publiés depuis la fin de la guerre ! Avec les récents progrès des technologies et de la conquête spatiale, cette littérature ne demandait qu'à se renouveler.




     Mille raisons. En voici quelques unes...

     — C'est un genre littéraire authentique, qui, comme le roman policier, nécessite une grande rigueur dans la construction de l'intrigue.

     — C'est le seul genre littéraire qui marie à la fois une immense liberté dans le domaine de l'imaginaire ( toutes les hypothèses de départ sont possibles ) et une logique implacable dans la déclinaison de toutes les conséquences de cette hypothèse.

     — La SF s'intéresse à l'avenir de l'Homme et au sort de la planète. Certes, le passé me passionne... et je lis beaucoup de récits historiques, de “ romans de terroir ” et de récits contemporains intimistes. Mais face aux problèmes aigus de notre monde et à la survie de plus en plus problématique de l'humanité, je juge salutaire qu'une littérature aborde de front les grands problèmes de société et s'éloigne des thèmes traditionnels du genre : autrefois... la vie de mon village au siècle dernier... mes problèmes intimes : mes soucis, mes amants, ma vie sentimentale, mon petit moi.

     — La SF propose souvent une image future du monde et/ou des sociétés différentes, qui fonctionnent autrement. C'est donc une littérature naturellement tournée vers la réflexion, la critique, l'interrogation, la contestation permanente de nos modes de pensée et d'organisation.

     J'aurais mille autres motifs à développer — à quoi bon ?
     Mais attention : je ne défends pas toute la SF. Ici comme ailleurs, il existe des ouvrages majeurs et des textes très pauvres, banals, du genre western déguisé où le décor et l'action prennent le pas sur la qualité de l'hypothèse et la rigueur dans la déclinaison de ses conséquences.

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Dernière mise à jour du site le 12 octobre 2021
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