Christian Grenier, auteur jeunesse
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Août 44 : Paris sur scène



Editeur : Nathan - Collection : Les Romans de la mémoire No 1 (2002)
 
     A L'ORIGINE DE CET OUVRAGE ?...
     Une commande.
     Et d'abord, un projet de mon complice Christian Léourier, écrivain de SF qui travaille au Ministère de la Défense depuis vingt-cinq ou trente ans. Il voulait lancer, en collaboration avec Nahtan, une collection de romans historiques couvrant la période 1870/2000 et mettant en relief les grands problèmes, conflits, hauts faits historiques de la France. Objectif : faire passer, sans jamais être patriotique ou partial, une image de la France et des Français au travers d'un événement majeur. Pas question de refaire Le jour le plus long mais plutôt Le dernier métro ou Papy fait de la résistance. Autrement dit, et comme ces romans courts et dynamiques devaient toucher avant tout les collégiens, de la 6ème à la 3ème, le point de vue devait être celui d'un enfant ou d'un ado dans son contexte quotidien.
     Pas si simple...

     LE MAKING OFF...
     Pendant le dernier Salon de Montreuil, Christian m'a expliqué le projet qui mûrissait et il a aussitôt voulu me convaincre d'écrire un roman sur la Libération de Paris.
     — Savais-tu, m'a-t-il dit, que la Comédie Française a été, pendant la semaine du 19 au 26 août 44, le principal poste de secours de Paris ?
     Je l'ignorais. mais lui savait autre chose :
     — Ton père a bien été régisseur à la Comédie Française, pendant 20 ans ?
     — Oui. Mais de 1945 à 1966 !
     — Qu'importe. Tu connais la maison, non ?
     C'est vrai. Et c'était là aussi un moyen de rendre hommage à mon père, en même temps qu'à de multiples comédiens que j'ai longtemps admirés comme Jean Yonnel ou Julien Berthault !
     Cependant, j'ai hésité, réservé ma réponse.
     Christian a insisté, et s'est fait une alliée d'Annette.
     J'ai vite cédé et je me suis mis au travail tout l'hiver... ce fut une tâche encore plus longue et compliquée que je ne l'avais prévu : que de recherches ! Parfois, pour un mot, un fait, un lieu, une date, un événement météo, je devais me replonger dans les documents d'époque, avec deux conditions à remplir :
     1. que je les possède ou y aie accès rapidement.
     2. qu'ils soient fiables... ce qui hélas était loin d'être toujours le cas, même les journaux d'époque ont laissé passer de grossières erreurs !
     La première des difficultés s'est révélée presque insurmontable : je voulais que le héros, adolescent, soit le fils du régisseur du Français. Hélas, renseignement pris à la Comédie Française et dans ses archives... le théâtre a fermé pour tout l'été le soir du 20 juillet ! Un régisseur n'avait donc aucune raison d'être au théâtre chaque jour. Il m'a fallu tricher : mon héros serait le fils... du pompier de service. Hommage à mes parents, à ce théâtre et à leurs acteurs, certes, mais aussi hommage à mes cousins Odette et Michel ( toujours vivants ) auxquels j'ai emprunté le prénom de mes héros... tout simplement parce qu'ils ont le même âge qu'eux et ont été des théâtreux !
     Par ailleurs, Christian m'a convaincu que sa collection toucherait tous les collégiens de France. Un regret : que mon projet ait été écarté : lancer un concours suggérant de faire deviner aux lecteurs quels étaient les pièces ( et leurs auteurs ) dont douze extraits sont utilisés dans mon roman...
 
UN EXTRAIT DU TEXTE  ( Août 44 : Paris sur scène )
          J'allais avoir seize ans et j'étais amoureux.
          Depuis toujours, j'avais rêvé qu'il m'arrive quelque chose d'important. D'exceptionnel. Un événement qui changerait ma vie. Et voilà. C'était arrivé. Le 20 juillet, tout avait commencé...
          Comme presque chaque soir, j'avais suivi mon père dans les coulisses de la Comédie Française où il travaillait comme pompier de service. Sur scène, une demi-heure avant le début du spectacle, l'activité était intense : tapissiers et accessoiristes mettaient la dernière main au décor de la pièce Feu la mère de Madame. J'entendais le brouhaha de la salle qui se remplissait. Un bruit qui m'excitait, comme tous les préludes à des plaisirs nouveaux. Marcel Dupuy, le souffleur, avait le visage collé à l'oeilleton du rideau ; il s'en détacha, m'aperçut et me fit signe d'approcher.
          L'oeil du rideau... Il me fascinait ! De l'orchestre, on le devinait à peine, petite tache circulaire noyée dans un pli. Mais du plateau où j'étais, il permettait de voir la salle. Etrange stratagème qui, avant la représentation, faisait des comédiens un public invisible et transformait les spectateurs en acteurs malgré eux !
           Tu vois cette loge, Michel, avec ce couple, au fond ? me dit-il. Si tu veux assister au spectacle, tu iras t'asseoir là-bas quand les lumières baisseront.
          J'approuvai en le remerciant. Dès que Roger, le régisseur, leva son brigadier pour frapper les trois coups, je rejoignis l'interminable couloir demi-circulaire qui donnait accès à la salle ; je m'installai au fond de la loge à l'instant où le rideau se levait.
          J'avais déjà vu cette pièce en un acte. Elle servait de hors d'oeuvre au spectacle servi après l'entracte : le carrosse du Saint Sacrement. Et là, tandis que le public n'avait d'yeux que pour Marie Bell, la plus célèbre comédienne de la troupe, je fus ébloui par une jeune figurante au visage angélique et aux longs cheveux blonds. Quelle présence ! Quelle classe ! J'étais subjugué. Sa beauté, à mes yeux, éclipsait celle des autres actrices. A chacune de ses apparitions, mon coeur battait plus fort. Le moindre de ses gestes me semblait d'une élégance inouïe. Malgré la distance qui nous séparait, j'avais l'impression qu'elle me fixait de ses grands yeux ourlés de noir... La pièce s'acheva. Sans incident. Car des incidents, il y en avait souvent — notamment des coupures d'électricité qui contraignaient la direction du théâtre à faire évacuer la salle. L'an dernier, lors d'une soirée du lundi, un drame avait failli se produire : les officiers allemands assis à l'orchestre avaient fait arrêter les étudiants du poulailler qui les bombardaient d'avions en papier.
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Dernière mise à jour du site le 12 octobre 2021
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