Pour en savoir plus...
Une vieille histoire ! Le contexte dans lequel j'ai écrit cet album est finalement... très ancien et assez complexe. Comme quoi les petits récits ont parfois une longue histoire ! Tout est parti du succès inattendu d'un album publié précédemment chez Nathan ( en 1996 ) dans la même collection : Le château des enfants gris. Inattendu ? Oui, certains de mes romans ( comme l'Ordinatueur ou Virus LIV 3 ou la mort des livres ) ont du succès, mais rarement mes albums. Je suis en effet un auteur qui touche en priorité les ados, rarement les plus jeunes.
Une nouvelle commande pour la collection Demi-Lune Donc, face à la demande urgente de la directrice de la collection Demi-Lune ( Christian ? C'est Frédérique Guillard ! J'ai besoin pour la fin du mois d'un texte... il me faut publier un « Demi-Lune » ! Tu as une idée ? Tu m'envoie ça quand ? ), j'ai vite songé à réutiliser un récit publié en mai 1990 ( lui-même peut-être issu d'une nouvelle plus ancienne encore... voir plus bas ! ), dans le magazine mensuel Gullivore. Je précise que Gullivore est le nouveau nom de l'ancien magazine Jeunes Années. La revue ( elle est l'émanation de l'association les Francs et Franches Camarades ) a été rebaptisée vers 1985 je crois... mais j'ai souvent travaillé pour elle.
A l'origine de Malix... un certain MAGAR ! La nouvelle publiée en 1990 s'appelait MAGAR LE MAGICIEN. On n'y trouvait pas de boîte mais un personnage qui ressemble beaucoup à Malix ; ses tours n'avaient pas d'explication rationnelle. C'était donc là à l'origine un récit dont le registre était le fantastique. Dans son récent avatar, La boîte à Malix, la fin du récit ( et les révélations du héros à Miss Lavortone, page 29 mais surtout pages 38/39 ) révèlent clairement l'appartenance du récit à la science-fiction. Avec MAGAR, aucune explication rationnelle n'est livrée ; avec MALIX, l'explication est d'ordre pseudo-scientifique : Malix est un extraterrestre, un « prospecteur galactique » qui utilise un transmetteur de matière ( sa « boîte » ) pour alimenter le musée de sa planète.
Pourquoi utiliser la trame d'une histoire déjà publiée ? Le problème de la presse, c'est qu'une fois l'histoire parue, elle disparaît. Certes, l'auteur en garde le copyright mais elle n'est plus republiée, sauf s'il la présente ailleurs, et cela n'avait pas été le cas. Je préfère faire du neuf que republier mes vieux textes. Quelle était donc cette nouvelle fantastique Magar le magicien ? Ma foi, à peu près la même : un jour arrive dans un cirque un mystérieux magicien ( Magar ) qui semble posséder des pouvoirs fabuleux. Mais il ne possède pas de boîte. Bluffé, le directeur du cirque l'engage... c'est d'ailleurs lui qui raconte l'histoire de son magicien. Ce directeur était à l'origine sympathique. Un jour ou plutôt un soir, le fameux Magar disparaît. Ce texte était court ( quatre pages )... mais son style le destinait à un public d'ados. J'ai repris la trame de ce récit sans le relire, seulement d'après mes souvenirs. Il me fallait cependant répondre à un nouveau cahier des charges : un récit plus long... mais toutefois écrit plus simplement, avec des péripéties et des chapitres !
Une histoire d'amour Ainsi est née Miss Lavortone, que je voulais laide et petite car j'avais imaginé Magar grand et beau. Comme je savais bien sûr que mon héros magicien était un extraterrestre, il m'a suffi d'en déduire que les goûts étaient différents loin de chez nous, et que l'ET allait être aussitôt séduit par la beauté ( intérieure ! ) de Missla. Qu'une naine laide et sans défense soit la risée de la troupe et devienne un souffre-douleur était presque logique... comme était évident que Malix allait devenir son défenseur avant de la sauver des griffes de ses agresseurs pour disparaître avec ( et/ou plutôt après ) elle d'une façon spectaculaire. Il me semblait qu'ainsi, j'avais un scénario plausible, propre à développer quelques rebondissements, un certain suspens, ainsi qu'une réflexion propre à attendrir ou/et à faire réfléchir des enfants sur le sens de la beauté, mais aussi sur la différence. C'était aussi à mes yeux une sorte d'introduction à la science-fiction à travers un texte sensible — on accuse si souvent la SF d'être pleine de machines et dépourvue d'âme ! Du coup, le texte s'adressant à des plus jeunes, j'ai changé le titre, jugeant que la place de ce « transmetteur de matière » était centrale. De la boîte à malice à la boite à Malix, il n'y avait qu'un pas. Le nom de Malix dérive d'ailleurs de toute évidence du mot malice. Mais j'ai jugé que Malix faisait assez Majax ( ah... je connais bien Majax, j'ai fait mes études avec lui ! Si, c'est vrai ! )
Et l'illustrateur ? Que dire ? Je ne le connais pas ! Il est hélas très fréquent, chez les éditeurs, de réserver la surprise de l'illustration à l'auteur. Cela a été le cas. Je n'ai jamais vu ni rencontré ( ni correspondu avec ) Nicopirate. Et j'ai découvert ses illustrations ( et sa photo, et la dédicace qu'il a jugé utile d'apporter à son travail... sans même m'en avertir ! )... quand l'album est sorti en librairie ! C'est ainsi ! Et c'est d'ailleurs presque toujours le cas !
Pourquoi l'univers du spectacle et plus précisément du cirque ? 1/ Mes parents étaient comédiens, j'ai toujours voulu faire du théâtre, ils s'y sont opposés. 2/ Le cirque ? Mon récit fétiche, lu et relu sans cesse, est Le Petit Pioui, chien de cirque ( 1938, publié en France chez Flammarion en 1949 ) ; son influence est manifeste même si l'histoire d'un Petit Pioui n'a rien à voir avec Argyr ou Magar. 3/ Ma mère n'était pas naine, elle était simplement très petite. Elle a joué les petites filles jusqu'à l'âge de 40 ans. Elle est sûrement, inconsciemment, à l'origine de Miss Lavortone !
Les enjeux littéraires ? Le début du récit est explicite : en deux phrases, on sait que Missla est naine, bossue, malheureuse, orpheline et étrangère. Un malheur n'arrive jamais seul : le nanisme est souvent accompagné d'une difformité. Par ailleurs, la guerre fait des milliers d'orphelins. La consonance de Missla évoque l'Europe de l'est... pourquoi pas le Kosovo : un pays qui, avec les guerres, avait changé de nom ; un pays qui, avec le temps, était devenu tout petit. Si petit que presque tous ses habitants étaient partis. La répétition, d'ordre poétique, suggère que le sort du pays est identique à celui de Missla : Missla est aussi petite, déformée... de plus en plus isolée ( orpheline ) donc discrète ; et elle change de nom, passant de Missla à Miss Lavortone, ce qui est très cruel, mais on est souvent très cruel avec les noms propres. Bien sûr, le patron du cirque, lui, s'est choisi un autre pseudo : Monsieur Bravo — le contraire de Lavortone en quelque sorte.
D'Argyr à Malix... en passant par Magar ! Aux lecteurs curieux de savoir comment évoluent les histoires, où elles puisent leur matière — et notamment quels hasards président au choix des noms des héros, je conseille de lire ce qui suit... et qui pourrait constituer le « pour en savoir plus » de Magar le magicien, le petit récit publié à l'origine dans un magazine, et dont le scénario a servi de trame à la Boîte à Malix !
Qui est ARGYR ? Tout commence avec... une île de la mythologie grecque, baptisée Argyre ( on la trouve notamment dans Pausanias ). En 1877, l'astronome Schiaparelli, en observant à la lunette la planète Mars, baptise Argyre une région de la planète rouge — le nom avait d'ailleurs déjà été utilisé je crois pour un cratère de la lune... peut-être est-ce Johannes Kepler son inventeur, du côté de 1610 ? A vérifier !
L'écrivain Gérard Klein réutilise ce nom le premier En 1965, un jeune écrivain de SF, Gérard Klein, propose trois romans au Fleuve Noir. L'éditeur exige que l'auteur adopte un pseudonyme, si possible de consonance américaine. Gérard Klein résiste et choisit comme pseudo Gilles d'Argyre, en hommage aux sites astronomiques et à la mythologie grecque. Ce pseudonyme reste top secret jusqu'à ce que, en 1971, dans un essai ( Jeunesse et science-fiction, publié chez Magnard ), un autre jeune auteur révèle au public — à la suite d'une indiscrétion — que Gérard Klein ( devenu entre-temps romancier, auteur du célèbre Gambit des étoiles, publié chez Gallimard, puis le prestigieux directeur de la collection de SF Ailleurs et Demain chez Robert Laffont ) se cache derrière le pseudonyme de Gilles d'Argyre ! Gérard Klein écrit aussitôt une magnifique lettre à ce jeune essayiste ( c'était moi ! ) pour le féliciter à la fois de la pertinence et de la qualité de son essai... et lui demander comment il a appris qui était en réalité Gilles d'Argyre. Je lui réponds. Nous correspondons, je deviens de gré ou de force le spécialiste de la SF pour la jeunesse. En 1972, Gérard Klein et moi nous nous retrouvons à la bibliothèque de Saint Ouen, invités à débattre avec le public. Nous sympathisons aussitôt. En 1978, Gérard Klein me publie dans l'unique collection jeunesse SF chez Robert Laffont, l'âge des étoiles. Mon roman s'appelle Le Montreur d'étincelles. Rien à voir avec Argyr.
Une autre nouvelle publiée dans le magazine Jeunes Années ? Entretemps ( mais quand ? Il faudrait poser la question à mon webmaster, qui vient chez moi, l'été, pour se plonger dans mes archives... ), je suis à peu près sûr de publier une histoire dans le magazine Jeunes Années : Argyr le magicien. Il faudrait partir à sa recherche... mais quarante ans plus tard, il m'arrive de retrouver des textes dont j'avais oublié que je les avais publiés !
Argyr devient un personnage de BD ! En 1984, embauché par les éditions Vaillant pour créer dans le journal Pif un personnage de bande dessinée... j'invente ARGYR, le baladin de l'espace, en hommage et par amitié pour Gérard Klein, une forme de clin d'oeil ! Les aventures d'Argyr sont publiées ( et dessinées par Jean-Marc Salmon, voir mon site ) dans PIF pendant deux ans
D'Argyr à Magar ! En 1990, sans doute invité par le même magazine, devenu entretemps Gullivore, de republier ( et de rajeunir ? ) ma nouvelle qu'ils souhaitent reprendre, j'écris MAGAR LE MAGICIEN. Pourquoi Magar ? C'est presque le pseudonyme d'Argyr, on retrouve un peu Argyr dans les trois dernières lettres de Magar... mais pour des raisons de copyright, j'imagine qu'il fallait changer le titre, le texte étant différent.
On arrive à... La boîte à Malix ! Enfin, en 2002, Frédérique Guillard, alors responsable du secteur jeunesse chez Nathan, me commande un texte pour Demi-Lune. Je décide d'utiliser en gros la trame de ma nouvelle MAGAR LE MAGICIEN — mais le nom Magar devient... Malix ( on retrouve le Ma de Magar ! ), sans doute parce que je juge utile d'adjoindre à mon pseudo-magicien un transmetteur de matière, objet courant dans la SF. Après avoir relu la nouvelle Magar, j'y ai noté la présence d'une certaine Lydie ( la fille des trapézistes ). Missla a remplacé Lydie...
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