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Cristal qui songe

Theodore STURGEON

Titre original : The Dreaming Jewels, 1950
Première parution : New York, USA : Greenberg, 1950
Traduction de Alain GLATIGNY
Illustration de Tibor CSERNUS

J'AI LU (Paris, France), coll. Science-Fiction (1985 - 1993, 2ème série - dos violet) n° 369
Dépôt légal : février 1986
Retirage
Roman, 320 pages, catégorie / prix : 3
ISBN : 2-277-12369-2
Genre : Science-Fiction


Autres éditions
   HACHETTE / GALLIMARD, 1952
   J'AI LU, 1970, 1972, 1975, 1978, 1980, 1983, 1989, 1992, 1993, 1998, 2004, 2007, 2018
   LIBRIO, 1999
   in Romans et nouvelles, OMNIBUS, 2005
   in Cristal qui songe / Les Plus qu'humains, OPTA, 1969

Quatrième de couverture
     Lorsqu'il est renvoyé de l'école, à l'âge de huit ans, cela fait déjà plusieurs années que Horty mange des fourmis en cachette.

     Fuyant alors la demeure de ses parents adoptifs qui le martyrisent, le gamin trouve refuge au sein d'un cirque ambulant où il devient le partenaire de deux jeunes naines, Zena et Bunny.

     Mais les personnages les plus extra-ordinaires du cirque restent son féroce directeur, surnommé le Cannibale, et son étrange collection de cristaux : des cristaux qui peuvent gémir et semblent toujours plongés dans un rêve minéral.
Critiques des autres éditions ou de la série
Edition LIBRIO, SF-Fantastique (2003)

     Un enfant maltraité, un cirque, des cristaux intelligents, tels sont les ingrédients de ce roman extraordinaire de T. Sturgeon. Fuguant vers l'inconnu, Horty est recueilli par une charmante naine qui va lui servir à la fois de mère et de protectrice. Elle fait des numéros dans l'établissement de Monsieur le Directeur. Celui-ci n'est pas un tendre : surnommé le Cannibale, il se livre à des expériences secrètes avec de mystérieux cristaux dont lui seul semble avoir compris le pouvoir. De surcroît, il exerce une emprise mystérieuse sur les employés de son cirque. Mais ce n'est pas le seul danger qui guette Horty, il y a aussi l'abjecte juge Bluett, personnage secondaire essentiel, et toutes les autres incertitudes de la vie...

     Le déroulement de certaines histoires paraît si naturel qu'on ne voit pas, à priori, comment elles pourraient être racontées différemment. Aucun chapitre n'est superflu, aucun mot n'est déplacé. Le lecteur est inéluctablement entraîné vers la fin, naturelle, implacable. L'enchaînement des péripéties est si limpide qu'on se surprend lisant la page cent juste après avoir commencé ! Chaque élément prend sa place sans gêner les autres, sans être trop ou trop peu développé.
     Cette facilité de lecture ne nous empêche pas de bien appréhender les clés du monde de Sturgeon. Globalement, on reçoit une leçon d'humanité : l'homme se distingue de l'animal certes, mais tout le monde ne mérite pas de se situer au-dessus de toutes les espèces vivantes connues. Bref, être humain ne dispense pas d'en cultiver les qualités et nous ferions bien de veiller à ne mépriser personne.
     Une autre clé de l'univers de l'auteur est mise en scène adroitement : élevé par une naine, Horty ne grandit pas. C'est un élément imaginaire qui a un peu de mal à passer mais dont la valeur est symbolique. A quel monde Horty veut-il appartenir ? Peut-il grandir avant d'en avoir décidé ?
     Enfin, l'issue de l'amour lubrique du juge Bluett pour Mlle Kay est sans doute aussi un témoignage des pensées de l'écrivain : les personnages meurtris par d'autres finissent par trouver un salut à la mesure de leur bonté d'âme.

     Chaque idée est savamment défendue par la crédibilité des personnages, campés devant nous comme s'ils avaient vraiment existé. Même les cristaux acquièrent cette fausse vie à laquelle les héros de fiction sont condamnés. « Il projeta une seconde fois vers le cristal une décharge de haine. — Non. Le mystérieux objet réagit par ce cri silencieux comme s'il l'avait piqué avec une épingle rougie au feu ». Les relations entre oppresseurs et opprimés se tissent petit à petit, induisant leurs conséquences funestes sur les uns comme sur les autres. Les non-dits ajoutent à la vraisemblance de l'ensemble tant ils rappellent ceux de la vie de tous les jours. Mais Horty comprend de lui-même, comme nous d'ailleurs.

     Ce roman, considéré comme l'un des deux chefs-d'œuvre de T. Sturgeon reste parfaitement d'actualité. Si les contemporains nous ont habitués à des idées plus noires, plus choquantes ou plus audacieuses, celles de Sturgeon restent plus poétiques, plus sensibles. Un ouvrage qui résiste au temps, qui ne se démode pas ! A lire sans retenue.

Antoine ESCUDIER (lui écrire)
Première parution : 17/11/2003
nooSFere


Edition J'AI LU, Science-Fiction (2007 - ) (2018)

    Heureux qui n’a pas encore lu Cristal qui songe : il découvrira avec ravissement une histoire qui, sous des propos adultes, possède la force des contes d’enfant.

    Renvoyé de son école pour avoir mangé des fourmis, Horty est une fois de trop martyrisé par son père adoptif. Blessé, il quitte le domicile avec pour seul bien la tête de polichinelle aux yeux sertis de cristaux que son tortionnaire vient d’écraser. Il est recueilli par les nains d’une compagnie de cirque ambulante : La Havane, Bunny et surtout Zena qui le prend sous son aile, ayant repéré chez lui les dispositions qui font de lui un enfant particulier. Pour le faire accepter par l’ombrageux Pierre Ganneval, surnommé le Cannibale, qui fuit ses semblables et ne s’embarrasse guère de bouches inutiles, elle le déguise en fille et compte sur ses qualités de chanteur pour mettre au point un numéro. Horty apprend vite et s’intègre aisément à la troupe. Le cirque cache cependant des secrets : Ganneval se préoccupe davantage de sa collection de cristaux que de la troupe… Dans sa haine de l’humanité, il trame d’obscurs projets dont Zena semble avoir connaissance, elle qui a compris que le jeune Horty n’est pas un enfant comme les autres.

    En dire davantage déflorerait ce roman exceptionnel. Près de soixante-dix ans plus tard, il n’a pas pris une ride. Plutôt court, il se lit rapidement, et, derrière la simplicité de sa trame, aborde avec une apparente légèreté des thèmes d’une profonde humanité — la marque de fabrique de son auteur.

    Autobiographique par bien des aspects, il traite de la souffrance et plus particulièrement de la maltraitance : les sévices qu’inflige le père adoptif de Horty sont proches de ceux que l’auteur subit dans son enfance, racontés dans Argyll (mémoires publiées en France en 2005 au sein de Sturgeon, romans & nouvelles, chez Omnibus - édition épuisée). À la souffrance physique s’ajoute celle, psychologique, liée au rejet et au mépris dont sont victimes ceux qui ne se fondent pas dans le moule.

    Tout Sturgeon est déjà là : le plaidoyer pour la tolérance face à la différence, la nécessité de s’écouter et se comprendre. Différence physique, au travers des freaks de la troupe, ici avant tout considérés sous l’angle humain ; différence de comportement au travers de personnages originaux et dans le fait que les motivations des extraterrestres du récit nous échappent ; différence sexuelle, également, dans la mesure où la nudité n’est pas honteuse ni un tabou dans la troupe, et dans le fait que Horty devienne une fille. Faut-il rappeler que Sturgeon est l’un des premiers à avoir abordé en science-fiction les thèmes de l’homosexualité (« Un monde bien perdu », 1953) ou de l’égalité sexuelle par l’androgynie (Vénus plus X, 1960) ?

    On reconnaît sa pédagogie à base d’analogies et de comparaisons éloquentes : « Va-t’en expliquer à une chenille la structure d’une symphonie… et le rêve d’où elle est sortie » est un éloquent résumé sur la difficulté de comprendre autrui. Son empathie évite la surenchère dramatique : les personnages agissent davantage qu’ils ne se plaignent. L’émotion est malgré tout présente, comme lorsque Zena exprime sa solitude, affective et sexuelle liée à son nanisme, mais Sturgeon cherche avant tout à expliquer le parcours de chaque protagoniste, qui justifie son comportement. « On ne sait pas soi-même ce qu’on pense tant qu’on n’en a pas parlé à autrui » résume parfaitement la nécessité d’échanger pour exister et se construire. Lire Sturgeon revient à dialoguer avec un ami cher.

    La traduction révisée permet de constater combien l’ancienne édition avait connu des coupes, on pense notamment aux lectures de Horty, où Sturgeon cite les livres, de science-fiction et autres, qui l’ont marqué.

    Le récit, lui, va à l’essentiel sans fioritures, avec une mécanique parfaitement huilée. Ce roman, qui figure avec Les Plus qu’humains au rang de chef-d’œuvre incontournable, est un bonheur de lecture à chaque fois renouvelé.

Claude ECKEN (lui écrire)
Première parution : 1/10/2018
Bifrost 92
Mise en ligne le : 20/6/2023

Cité dans les pages thématiques suivantes
Enfants

Cité dans les Conseils de lecture / Bibliothèque idéale des oeuvres suivantes
Jean-Bernard Oms : Top 100 Carnage Mondain (liste parue en 1989)
Lorris Murail : Les Maîtres de la science-fiction (liste parue en 1993)
Stan Barets : Le Science-Fictionnaire - 2 (liste parue en 1994)
Denis Guiot, Stéphane Nicot & Alain Laurie : Dictionnaire de la science-fiction (liste parue en 1998)
Association Infini : Infini (1 - liste primaire) (liste parue en 1998)
Jean-Pierre Fontana : Sondage Fontana - Science-fiction (liste parue en 2002)
Francis Berthelot : Bibliothèque de l'Entre-Mondes (liste parue en 2005)

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