Vous franchissez le seuil, et voici que viennent à vous une étrange jeune fille qui entend des voix dans les eaux et un homme obsédé par les téléphones ; un médecin traquant une maladie dans l'univers psychique de son fils, et un groupe d'amis écrivant un scénario à succès d'après des rêves piratés ; Paul Verlaine ressuscité pour les besoins de la littérature, et un écrivain dévoré par son double ; une auto-stoppeuse qui n'aurait pas dû sortir si tard, et des frères jumeaux construisant de surprenantes montres...
Rencontres déroutantes d'individus à la frontière du réel, transportant avec eux les fragments d'univers oscillant entre Fantastique réaliste, SF et Fantasy Urbaine. Et bien que vous teniez entre vos mains les Cahiers de ce labyrinthe, il n'est pas dit que vous y trouverez des clefs pour sortir de ses méandres. Plus probablement resterez-vous prisonnier de son attraction fascinante, marchant des heures durant en compagnie de ses figures, dans l'écho de ses murs de papier.
Léo Henry est l'une des révélations de ces dernières années de la scène littéraire francophone. Ses nouvelles abordent les thèmes de la folie, de la quête identitaire et de l'art avec une poignante vérité, et un talent particulièrement efficace. Un auteur qui n'a certainement pas fini de surprendre ses lecteurs.
1 - Mélanie FAZI, Les Mystères du labyrinthe ou le vertige de la quête, pages 7 à 11, préface 2 - Défait, pages 13 à 26, nouvelle 3 - Merry Elodie, pages 27 à 47, nouvelle 4 - Memory Lane, pages 49 à 63, nouvelle 5 - Art de la fugue, pages 65 à 80, nouvelle 6 - Riches heures, pages 81 à 95, nouvelle 7 - Notes pour un labyrinthe, pages 97 à 116, nouvelle 8 - Ultimes rinçures, pages 117 à 131, nouvelle 9 - Ex nihilo nihil, pages 133 à 148, nouvelle 10 - Ne la laisse pas s'enfuir, pages 149 à 160, nouvelle 11 - Inspire, pages 161 à 185, nouvelle 12 - La Chute d'Amidärlah, pages 187 à 211, nouvelle 13 - Lettre ouverte à cet autre qui est moi, pages 213 à 239, nouvelle 14 - Biographie, pages 241 à 242, biographie 15 - Bibliographie, pages 243 à 244, bibliographie
Critiques
Les Cahiers du Labyrinthe de Léo Henry se présentent comme les fragments épars d'un puzzle : aussi déroutants. L'auteur y décrit pulsions et sentiments les plus profonds sur un ton léger, si ce n'est joyeux, un peu comme si une pudeur secrète l'empêchait de se livrer sans retenue.
Défait a la forme d'un étrange interrogatoire policier au terme duquel on ne sait quelle est la part du fantasme et de la réalité. En contrepoint, Merry Elodie est l'histoire d'une jeune fille qui ne sait pas vraiment de qui elle est issue, mais qui est à jamais liée à l'eau, que celle-ci coule dans la mer, le fleuve ou la baignoire.
L'humour n'est pas absent des écrits de Léo Henry. Ainsi, Riches Heures, qui voit un frère sacrifié pour son frère mais s'unissant à lui pour bâtir la plus belle et la plus précise des horloges, ou Ex Nihilo Nihil, qui met en scène un surprenant démiurge, étudiant anxieux : image de l'auteur et de sa création ? Léo Henry semble aimer jouer de cette dualité auteur-personnage.
Nombreux sont les textes de science-fiction de ce recueil. Ils se passent dans un futur dont les outils permettent l'exploration de l'inconscient ou des rêves, comme Memory Lane où, pour guérir son fils Clément, Patrick parcourt une bien étrange voie onirique, mais aussi La Chute d'Amidärlah, dont les protagonistes créent la plus belle des fictions à partir des songes dérobés à un autre.
Le futur vu par Léo Henry peut aussi comporter des inventions classiques, du moins dans les livres. Elles seront décrites de façon très émouvante et poétique, comme dans Ne la laisse pas s'enfuir, ou franchement burlesque, comme dans Ultimes Rinçures. Un burlesque grinçant, certes, mais qui reste léger.
La légèreté du ton de certains textes est peut-être la cause d'une certaine frustration à la lecture de ce recueil, comme si rien ne devait nous toucher, ni nous, lecteurs, ni peut-être l'auteur. Or, c'est quand il se laisse aller à crier qu'il est le meilleur, quand il cesse enfin de refouler l'émotion, quand il permet à son imagination de nous emporter au loin.
C'est ce qui se produit avec quelques nouvelles où la tristesse est là, palpable. Ainsi, Art de la Fugue, dont la pleine mesure n'est prise qu'à la fin, donnant envie de repartir du début pour comprendre vraiment comment les choses se sont passées, ou Notes pour un Labyrinthe, haletant parcours d'un amnésique à travers une Venise oubliée. Inspire est aussi une très belle nouvelle qui met en scène La Mort — elle fait suite à Marcheterre, parue dans Emblèmes n°7, La Mort... ses Vies, aux éditions de l'Oxymore. Le bouquet final, Lettre Ouverte à cet Autre qui est Moi, boucle le recueil sur les interrogations, voire les angoisses qui, peut-être, assaillent l'auteur animateur de son propre personnage. À moins qu'il ne s'en joue pour le seul plaisir de ses lecteurs.