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Évolution

Stephen BAXTER

Titre original : Evolution, 2002
Première parution : Gollancz, 2002
Cycle : Évolution (omnibus)

Traduction de David CAMUS & Dominique HAAS
Illustration de ÉRICANDRÉ

PRESSES DE LA CITÉ (Paris, France)
Dépôt légal : mars 2005
Première édition
Roman, 732 pages, catégorie / prix : 25 €
ISBN : 2-258-06354-X
Genre : Science-Fiction



Ressources externes sur cette œuvre : quarante-deux.org
Ressources externes sur cette édition de l'œuvre : quarante-deux.org

Quatrième de couverture
     Sur Terre, quelque soixante-cinq millions d'années avant notre ère. Alors que les dinosaures régnent en maîtres sur le monde, une petite créature appelée Purga lutte pour survivre.

     Purga est un purgatorius, l'un des tout premiers mammifères, et l'ancêtre de l'humanité. Elle vit la nuit, et sa principale occupation consiste à trouver de la nourriture pour elle et ses petits. Elle aurait pu poursuivre ainsi son existence, mais la chute d'un météore va tout bouleverser. L'écosystème subit de gigantesques mutations, les dinosaures s'éteignent, et la longue marche vers ce qui, un jour, deviendra l'homme peut commencer...

     D'où venons-nous ? Où allons-nous ? En descendant, branche après branche, l'arbre généalogique de l'humanité, Stephen Baxter tente de restituer de la manière la plus exacte possible, et non sans humour, le quotidien de nos ancêtres, et d'imaginer ce que pourrait être celui de nos descendants, cinq cents millions d'années après notre ère.

     Un fabuleux voyage à travers le temps, dans lequel Stephen Baxter, en maître de la science-fiction réaliste, mêle avec talent Histoire, science et imaginaire.
Critiques
     Un livre-univers sur 650 millions d'années, voilà ce que nous propose ici Stephen Baxter. Le projet ne manque pas d'ambition, pour le moins : conter l'histoire de notre lignée depuis la fin du Crétacé jusqu'à un demi milliard d'années dans l'avenir. Baxter a conçu son ouvrage en trois parties, «  Les ancêtres » d'abord, puis «  L'être humain » et enfin « Les descendants ».

     Il était une fois, au Crétacé, le purgatorius, une femelle de cette espèce de primate qui hésite entre la taupe et le loir mais ne ressemble en rien à un singe, que Baxter personnifie en Purga. En ce temps-là, les mammifères existent depuis longtemps déjà mais sont loin de tenir le haut du pavé car règne Sa Majesté, le dinosaure. Première rencontre sur cette échelle de Darwin, Purga vivait il y a 65 millions d'années, juste au moment où une comète embrase le ciel puis la terre... Purga échappera aux dinosaures et leur survivra ainsi qu'à la catastrophe. Purga ne se pose bien sûr aucune question, sa vie est régie par l'instinct, elle ne lâche jamais le morceau et se bat. Contrairement à la brave petite chèvre de monsieur Seguin, elle ne se couche pas dans l'herbe au matin pour voir venir sa fin. Quand arrive son heure, elle a fait le boulot, le grand boulot de la vie, assurer sa descendance, transmis ses gènes. Qui doivent être les bons, puisqu'elle y est parvenue...

     Bien entendu, notre connaissance de ces époques révolues compte bien des lacunes où Baxter s'engouffre à plaisir. N'oublions pas qu'Evolution est un roman, pas un essai, ni même un essai romancé. Ce que l'on peut lui reprocher, certes, mais cela donne aussi la parole au poète et permet à l'auteur d'évoquer des dinosaures intelligents ayant vécu au Jurassique ou un très poétique quoique improbable cachalot du ciel se nourrissant de plancton aérien...

     Petit à petit, au fil des millions d'années qui, comme des perles, s'enfilent sur le collier de l'évolution, on assiste à la lente transformation de nos primates primitifs en singes, puis des singes en hommes. L'imagination de Baxter fait survivre les dinosaures en Antarctique jusqu'il y a 10 millions d'années... Il y a eu peu de fouilles sous l'islandsis jusqu'à présent...

     Les hommes, les singes. Les mâles, les femelles. Rien ne change vraiment en dépit de l'évolution. Les donnes passent, la règle reste la même. Toujours la même et éternelle lutte pour assurer la prééminence de ses gènes sur ceux du voisin. Il ne faut bien sûr y voir aucun projet individuel. C'est un jeu de chance et de massacre. Jusqu'à ce que le bon individu soit au bon endroit au bon moment, mais sans que cela corresponde à un quelconque projet de la nature. Ce n'est pas le mieux adapté qui s'impose, c'est le plus adaptable. Celui qui survit quand les conditions changent. Ce facteur d'adaptation conduit à un cerveau de plus en plus gros. La capacité de traitement de l'information augmente et accroît son empire sur le monde. Mais ce n'est qu'une des stratégies de l'évolution parmi d'autres...

     On voit l'homme entrer dans la période historique puis la chute de Rome, mais, à ce moment-là, du point de vue évolutionniste, le genre homo est déjà sur le déclin...

     Pour la troisième partie du roman, la plus courte, Baxter entre explicitement en science-fiction. En 2031. Dans la situation de stress écologique extrême induite par la civilisation industrielle, l'éruption du super volcan Rabaul sera un événement comparable à la chute de la comète de Chicxulub, qui mit fin au Crétacé et à l'ère des dinosaures.

     Pour rendre compte de cette fin du monde humain tel que nous le connaissons, Baxter recourt à cet expédient bien connu en S-F qui consiste à projeter des gens du XXIe siècle dans l'avenir — grâce à une forme d'hibernation. Un groupe de militaires anglais se retrouve ainsi au moins mille ans après la fin de la civilisation et l'évolution a déjà repris sa route.

     Alors que les rongeurs vont dominer le monde, le cerveau des primates se réduit. La capacité à traiter l'information n'est plus leur stratégie de survie en tant qu'espèces qui se diversifient à nouveau. Au dernier chapitre, 500 millions d'années dans l'avenir, sur une Terre agonisante, sèche, désertique, la collaboration a pris le dessus sur la compétition et plantes et animaux survivent en symbiose...

     Voilà un livre énorme mais pas trop gros car le sujet est si vaste qu'il peut se résumer en vingt mots ou se déployer sur vingt tomes. Le sujet est tout à fait passionnant et il est rare que l'on trouve à lire ouvrage d'une telle envergure. Mais voilà, l'ouvrage à aussi les défauts de ses qualités. C'est que l'évolution, surtout telle que Baxter nous la donne à voir, est répétitive à l'envie. Un même panel de solutions est décliné à chaque itération évolutive. Il nous imagine fort bien d'ici 30 millions d'années remonter dans les arbres... et, quoiqu'il arrive, le vivant n'a d'autre ambition que de se perpétuer. Pour nous le montrer et nous en convaincre, Baxter ne cesse de le remettre sur le métier, encore et encore. Telle est la machinerie de la vie ; là-dessus, notre si brillante civilisation n'est que la peinture sur la voiture, et elle est beaucoup plus fragile. Il ne lui faut guère que mille ans pour disparaître totalement et à jamais. Comme dans Poussière de lune ou Titan, on retrouve en Stephen Baxter un farouche partisan d'une littérature descriptive, un Balzac de la science et de la technologie. Il va sans dire que l'action s'en trouve grevée et, quelque part, le plaisir miné. Evolution est un roman qui arrive à être tout à la fois et simultanément ennuyeux et passionnant sans que ce soit un défaut ; c'est inhérent au sujet et à la vision qu'en donne l'auteur. La rareté du sujet en fait néanmoins un livre absolument incontournable.

Jean-Pierre LION
Première parution : 1/10/2005 dans Bifrost 40
Mise en ligne le : 3/12/2006


     Stephen Baxter marche sur la trace de prestigieux ancêtres : H.G. Wells et J.-H. Rosny Aîné. Comme eux, il s'intéresse à l'avenir de l'humanité, jusqu'à nous emmener 500 millions d'années après notre ère. Cependant, ni La Machine à explorer le temps, ni La Mort de la Terre n'avaient tenté le pari réussi par Baxter : raconter toute l'histoire de l'humanité !

     Tout commence avec Purga, espèce de rat primate, 65 millions d'années avant notre ère. Animaux à sang chaud, à sang froid et dinosaures se partagent la Terre. Purga, qui observe, sans comprendre, une comète se fracasser sur la Terre. Purga, qui n'est autre que notre lointaine grand-mère.

     Le récit est très bien mené. On croit voir vivre et agir ces lointaines créatures, monstres de cauchemars ou petits animaux. Stephen Baxter montre bien comment la nature s'est livrée à de multiples expériences pour faire évoluer la vie vers plus de complexité. Organisé en trois parties (les ancêtres, l'être humain, les descendants), divisé en dix-neuf longs chapitres, encadré d'un prologue et d'un épilogue, Évolution est un véritable tour de force. On n'ose imaginer la somme de recherches et de travail qu'a demandé la rédaction d'un tel ouvrage. Comme un observateur omniscient, Stephen Baxter braque son microscope sur quelques périodes clés de l'aventure de la vie sur Terre. À chaque étape, il nous donne à voir les conditions d'existence d'un être de l'époque qui a la particularité d'appartenir à la grande famille humaine. La force du récit tient autant au style de Baxter qu'à la qualité de ses descriptions, si animées. On croirait, comme dans un film documentaire, voir les animaux vivre sous nos yeux. L'écrivain anglais parvient ainsi à nous faire ressentir le cauchemar des dinosaures propulsés d'une seconde à l'autre en enfer par la chute de la comète ou, plus tard, les souffrances de Vagabonde, sorte de singe capucin, qui traverse l'Atlantique sur un radeau de branchages improvisé à la suite d'un terrible déluge.

     Stephen Baxter va ainsi descendre le temps à travers une galerie de personnages de plus en plus évolués. Après Purga on découvre Plesi ( — 63 millions), sorte de petit écureuil à queue touffue ; Noth (-51 millions), petit lémurien arboricole ; Vagabonde (- 32 millions), anthro qui vit dans les arbres ; Creuse (-10 millions), minuscule lemming fouisseur qui voit venir le froid ; Capo (-5 millions), proche en même temps du chimpanzé et de l'être humain ; Loin (- 1,5 millions), jeune hominidée gracile à la course légère ; Galet (- 127 000 ans), robuste et musculeux qui s'allie à d'autres hominidés plus intelligents ; la redoutable Mère (- 60 000 ans), qui comprend les relations de cause à effet et initie la longue marche de l'humanité vers tous les excès du fanatisme en « inventant » la religion... Et ainsi de suite jusqu'à Ultima, symbiote de la fin des temps (+ 500 millions d'années). Autant de personnages si différents les uns des autres mais tous acteurs de la longue, longue comédie humaine.

     Dans une postface, Stephen Baxter prend la précaution d'avertir son lecteur. « Ceci est un roman. J'ai essayé de romancer la grande Histoire de l'évolution humaine, en aucun cas d'écrire une thèse ; j'espère que mon histoire est plausible, mais il vaut mieux ne pas lire ce livre comme un essai. »

     Judicieuse mise en garde. On aimerait bien croire au cachalot des airs du Crétacé, dont les ailes font une centaine de mètres d'un bout à l'autre, qui vit dans la stratosphère et se nourrit d'un plancton éthéré d'insectes charriés par le vent. En revanche, imaginer que les hommes de Néanderthal ont servi de montures et d'esclaves aux Homo Sapiens semble excessif. Stephen Baxter n'hésite pas à prendre ses libertés avec la préhistoire. À cet égard, la série des récits préhistoriques de Pierre Pelot, réunis sous le titre générique de Sous le vent du monde, est plus vraisemblable.

     Évolution est donc un roman. En contrepoint de la ligne principale du récit, on suit la paléontologue Joan Useb, qui, en 2031, a organisé une conférence en Australie. À Darwin, manière de rendre hommage au célèbre naturaliste auteur de la théorie de l'évolution. Joan Useb, qui redoute plus que tout l'extinction, qui est « un terminus bien plus définitif que la mort ». Pour elle, la vie n'est pas qu'une question de compétition, mais aussi de coopération et elle espère en convaincre les dirigeants politiques pour éviter un funeste destin à l'espèce humaine. Las, l'explosion du volcan Rabaul, en pleine conférence, force l'humanité à prendre un virage imprévu.

     Ce roman luxuriant se dévore avec un plaisir soutenu. Même s'il nous remet à notre place en nous rappelant que la Terre est elle-même un organisme vivant et qu'à l'échelle des millions d'années, l'homme n'est qu'une étape parmi d'autres.

Jean-François THOMAS (lui écrire)
Première parution : 1/6/2005 dans Galaxies 37
Mise en ligne le : 21/1/2009


     Ambitieuse fresque à laquelle nous convie Stephen Baxter, Évolution se propose de retracer l'intégralité de l'évolution de la race humaine sur des millions d'année, d'un passé lointain de 65 millions d'années à un futur encore plus éloigné de 500 millions d'années. Bien sûr, nos ancêtres et nos descendants tels que décrits par l'auteur n'ont pas grand-chose à voir avec le statut d' « humain », mais ils sont dans notre lignée, et Baxter s'attache à dérouler le fil des adaptations et mutations qui ont permis à cette lignée de perdurer des millénaires durant. Ce faisant, l'auteur nous dresse aussi un portrait de la planète Terre, avec laquelle l'Homme a de tous temps eu un rapport étroit, les deux ayant en quelque sorte grandi ensemble. Ce sont les grands bouleversements climatiques (la comète qui décima les dinosaures, les périodes de glaciation) ou géologiques (les éruptions volcaniques, la scission du continent unique Pangée) qui ont contraint les espèces animales, au sein desquelles l'Homme, à évoluer, à s'adapter ou à périr.
     Pour éviter l'ennui à son lecteur, Baxter a choisi d'illustrer son propos par des aventures individuelles. Chaque étape du processus est ainsi perçue à travers les yeux d'un protagoniste qui, au départ purement guidé par l'instinct, acquiert peu à peu des facultés intellectuelles. Et, même dans les temps les plus reculés, alors que les populations de la Terre étaient encore grégaires, Baxter individualise ses « personnages », leur donnant un nom. Ce qui aurait pu être un roman à théorie indigeste s'en trouve nettement allégé, le lecteur se passionnant pour ces pauvres créatures — voire même s'identifiant à certaines d'entre eux — , dont on sait qu'ils sont condamnés à mourir à plus ou moins brève échéance.
     On peut faire confiance à Baxter pour s'être assuré de la plausibilité de la plupart de ses hypothèses, mais il n'en oublie pas moins de nous décrire des êtres qu'on ne peut que considérer comme imaginaires : le cachalot des airs, par exemple, gigantesque créature volante dont on n'a jamais rien retrouvé. Ou cette bien curieuse race de chasseurs d'il y a 145 millions d'années, aux facultés de raisonnement particulièrement développées... Ou encore, parce que cela constitue le dernier quart du livre, nos descendants, que Baxter imagine régresser après que l'Homme, dans son indifférence vis-à-vis de son environnement, ait détruit la planète. Et l'auteur de s'avouer finalement fataliste, puisque s'il y eut commencement, il faut bien qu'il y ait une fin.
     On ressort de ce touffu roman (plus de sept cents pages) avec un envie folle de se plonger dans tous les ouvrages traitant de l'évolution de l'Homme, à commencer par ceux de la personne qui la première dressa un tableau de cette évolution, et à qui Baxter se réfère en permanence dans son ouvrage : Charles Darwin. Une belle et grande réussite, marquée par des personnages inoubliables qui, lentement, ont conduit à l'homo sapiens sapiens. En attendant la prochaine étape ?

Bruno PARA (lui écrire)
Première parution : 4/5/2005 nooSFere

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