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Émissaires des morts

Adam-Troy CASTRO

Cycle : Andrea Cort vol. 1 

Traduction de Benoît DOMIS
Illustration de MANCHU

ALBIN MICHEL (Paris, France), coll. Albin Michel Imaginaire
Date de parution : 7 janvier 2021
Dépôt légal : janvier 2021, Achevé d'imprimer : décembre 2020
Première édition
Recueil de romans, 720 pages, catégorie / prix : 26,90 €
ISBN : 978-2-226-44370-0
Format : 14,0 x 20,5 cm
Genre : Science-Fiction

Conception graphique : Luc Doligez.
Prévu initialement pour mai 2020, mais reporté suite à la pandémie de coronavirus.



Quatrième de couverture

Un space opera coup-de-poing situé dans un futur lointain,
celui du Système Mercantile, où le racisme,
la guerre, l'esclavagisme et la corruption
n'ont pas pris fin, bien au contraire.

Quand elle avait huit ans, Andrea Cort a été témoin d'un génocide. Pis, après avoir vu ses parents massacrés, elle a rendu coup pour coup. En punition de ses crimes, elle est devenue la propriété perpétuelle du Corps diplomatique. Où, les années passant, elle a embrassé la carrière d'avocate, puis d'enquêtrice pour le bureau du procureur.
Envoyée dans un habitat artificiel aussi inhospitalier qu'isolé, où deux meurtres viennent d'être commis, la jeune femme doit résoudre l'affaire sans créer d'incident diplomatique avec les intelligences artificielles propriétaires des lieux. Pour ses supérieurs, peu importe quel coupable sera désigné.
Mais les leçons qu'Andrea a apprises enfant ont forgé l'adulte quelle est devenue : une femme pour le moins inflexible, qui ne vit que pour une chose, « combattre les monstres ».

ADAM-TROY CASTRO est l'auteur d'une vingtaine de romans et de cinq recueils de nouvelles. La trilogie Andrea Cort (Émissaires des morts, La Troisième griffe de Dieu, La Guerre des Marionnettes) est son œuvre la plus connue. Émissaires des morts a reçu le prix Philip K. Dick.

Sommaire
Afficher les différentes éditions des textes
1 - Gilles DUMAY, Avant-propos, pages 7 à 8, introduction
2 - Avec du sang sur les mains (With Unclean Hands, 2011), pages 9 à 75, nouvelle, trad. Benoît DOMIS
3 - Une défense infaillible (Tasha's Fail-Safe, 2015), pages 77 à 125, nouvelle, trad. Benoît DOMIS
4 - Les Lâches n'ont pas de secret (The Coward's Option, 2016), pages 127 à 196, nouvelle, trad. Benoît DOMIS
5 - Démons invisibles (Unseen Demons, 2002), pages 197 à 307, nouvelle, trad. Benoît DOMIS
6 - Émissaires des morts (Emissaries from the Dead, 2008), pages 309 à 709, roman, trad. Benoît DOMIS
Critiques

Emissaires des morts d’Adam-Troy Castro, dont le titre évoque celui du second roman du cycle Ender d’Orson Card, est le premier volume d’une trilogie consacrée aux enquêtes d’Andrea Cort. Cette détective du futur enquête pour le compte d’un procureur au sein d’un Corps diplomatique. L’Humanité a essaimé dans les étoiles et les contacts avec les espèces extra-terrestres donnent lieu parfois à des incidents regrettables dont nos dignes représentants portent souvent - cela n’étonnera personne - la responsabilité. Armée d’une détermination sans faille et d’un intellect holmésien, Cort débarque dans les ambassades humaines de mondes inhospitaliers ou simplement étranges et dénoue les nœuds gordiens qu’on lui soumet.

Une sale réputation la précède. Enfant elle fut le témoin, pas innocent, d’un massacre inter-espèces. Ses apparitions, renforcées par l’austère combinaison noire qu’elle revêt en toutes circonstances, genre héroïne badass de manga, son intransigeance, glacent ou rebutent ses interlocuteurs. Cependant la rigidité mentale de cette lointaine parente des agents de la redoutable section « Circonstances Spéciales » du cycle de La Culture de Banks, dissimule un abyme. Andrea Cort met autant d’opiniâtreté à enfermer ses monstres personnels que ceux qu’on lui présente.

Pour cette publication Gilles Dumay a joint au corps principal de l'ouvrage quatre nouvelles. Ce choix et l’ordonnancement des textes facilitent la compréhension de l’évolution psychologique du personnage. La version française devient ainsi la nouvelle référence d’une fiction anglo-saxonne. Que de progrès accomplis en un peu plus d’un demi-siècle par le milieu éditorial hexagonal de l’imaginaire ! La traduction toute en fluidité de Benoit Domis contribue au plaisir de lecture.

« Avec du sang sur les mains » frappe d’entrée le lecteur par sa dramaturgie. Les Zinns sont des sentients pacifiques et incroyablement évolués sur le plan technologique. Mais ils sont sur le déclin. En échange d’informations scientifiques ils demandent à ce qu’on mette à leur disposition un criminel humain pour l’étudier. Le récit - comme les autres - se déploie dans deux directions : la confrontation avec l’altérité, et la confrontation avec une culpabilité personnelle. Les adversaires d’Andrea Cort ne se privent pas de réactiver les démons du passé. Certains ne s’en remettent pas comme le Mental du roman Le sens du vent de Banks, d’autres s’efforcent de vivre avec, comme le héros de La grande porte de Pohl … ou Cort.

Si « Une défense infaillible » m’a semblé évoquer une classique affaire d’espionnage, « Les lâches n’ont pas de secret » replace l’intrigue sur le plan de l’éthique. Condamné à une mort lente et atroce sur le monde des Caiths, Griff Varrick informe l’enquêtrice qu’une sanction alternative existe. Il s’agit d’une camisole chimique privant l’individu de son libre-arbitre. Qualifiée par les autochtones de peine des lâches, elle devient une arme redoutable dans les mains d’une ambassadrice peu scrupuleuse.

Sur Catarkhus, l’héroïne doit qualifier des meurtres commis sur les Catarkhiens. Cette espèce intelligente  semble déconnectée du réel, ignorer la présence d’autres sentients sur leur sol. La sensation même de douleur lui est étrangère. Comment dans ces conditions appliquer une sanction pénale pour des actes de violence exercés à son encontre alors qu’elle y est indifférente ? « Démons invisibles », un cran au-dessus des trois autres nouvelles lorgne du côté d’Un cas de conscience de James Blish par la hauteur de son propos.

La question du libre-arbitre et son antithèse brutale l’esclavage irriguent le roman Emissaires des morts. Son supérieur hiérarchique envoie Andrea Cort enquêter sur un double meurtre commis sur un monde artificiel propriété des IAs-source. Ces intelligences artificielles présentes dans toute la Confédération ont conçu un habitat gigantesque de forme cylindrique. Elles sont allées plus loin encore en créant une espèce vivante, intelligente, les Brachiens. Ceux-ci vivent dans les mailles de la Frondaison, une végétation suspendue dans la partie supérieure de cet étrange monde. La partie inférieure est dissimulée aux yeux de tous par une mer de nuages acides. Tomber c’est mourir. Accrochée aux Frondaisons, une ville constituée d’hamacs en guise de logements reliés entre eux par de fragiles passerelles abrite une population humaine de diplomates, de spécialistes en exo-civilisations et d’ouvriers. Ces derniers purgent une peine ou ont quitté une terre tyrannique dans l’espoir d’une vie meilleure. C’est un enfer qu’ils découvrent. Quant à la représentation elle n’a de diplomatique que de nom. Les IAs-source refusent de leur attribuer ce statut. Les Brachiens sont leur propriété point-barre. Cort découvre un administrateur, Gibb, installé dans cette déliquescence comme un lointain parent du Kurtz de Conrad, un adjoint énigmatique, une population fermée, et un couple d’humanoïdes bizarroïdes doué d’empathie : deux corps hébergent une conscience commune.

Emissaires des morts est tout à la fois le roman de l’assombrissement et de la délivrance. Le temps des changements pour Andréa Corps qui dans ce récit à la première personne, fend sa carapace de culpabilité, et le tableau d ’une humanité esclavagiste. Le livre s’achève par une double révélation, on serait tenté de dire comme Bester par une double démolition, celle frappant les sentients n’étant pas la moindre. 
L'ouvrage d' Adam-Troy Castro hérite d’une longue lignée de thrillers SF (1), mais pas seulement si l’on se réfère aux fictions citées plus haut. Il s’apparente à un futur classique hanté par des fantômes littéraires, ce qui n’est pas un mince compliment.

SOLEIL VERT (site web)
Critique déjà parue sur La sortie est au fond du Web
Parution sur nooSFere : 8/2/2023 nooSFere


Les aventures d'Andrea Cort se situent dans un univers de space-opera où l'Humanité (les "Homsaps") cohabite avec diverses races extra-terrestres, chacune dotée de sa propre biologie, de sa propre culture, de sa propre morale. Les Homsaps ont donc créé le Corps diplomatique qui gère de multiples ambassades sur les mondes les plus exotiques.
Quatre nouvelles servent d'introduction au roman qui donne son titre au recueil. À travers ces textes, on découvre à différents moments de sa carrière une enquêtrice très spéciale du Bureau du Procureur au sein du Corps diplomatique.
Andrea Cort a ceci de particulier que, enfant, elle a été témoin d'un génocide entre des Humains et une espèce extra-terrestre. Pire encore, elle y a participé, puisqu'elle a tué de ses propres mains son père adoptif. Traumatisée par ce passé, perçue comme un monstre par tous ses congénères humains et par nombre d'extra-terrestres qu'elle côtoie dans son travail, elle s'est bâti des défenses sous forme d'une misanthropie aussi épaisse qu'un blindage.
Dans la plupart des textes, elle intervient dans des ambassades où les Homsaps ont commis des crimes, ce qui l'oblige à résoudre non seulement un casse-tête juridique, mais aussi une crise diplomatique. À chaque fois, la confrontation aux cultures et morales extraterrestres engendre un lot de problèmes éthiques en apparence inextricables.

La plupart des nouvelles sont assez classiques mais se lisent avec plaisir. Elles servent avant tout à bâtir le personnage d'Andrea dans toute sa complexité et à rendre le lecteur familier tant avec la bureaucratie du Corps diplomatique qu'avec les différentes civilisations extra-terrestres. Comme une sorte de prélude au roman Émissaires des morts, Démons invisibles pose enfin des enjeux forts, à la fois pour l'histoire personnelle d'Andrea Cort et pour l'univers. C'est un texte efficace, bien rythmé, qui traite avec finesse de la question de l'impossible communication entre les Terriens et une race extra-terrestre à l'insupportable placidité.

Le roman est un huis-clos situé dans un habitat artificiel, sorte de cylindre de O'Neill perverti par un fantasme acrophobe. Construit par un collectif d'intelligences artificielles affranchies de toute tutelle, il est peuplé par une espèce créée par génie génétique. Seule une mission scientifique humaine est autorisée à vivre avec eux. Le récit est une sorte de whodunnit sur fond de tensions diplomatiques : non seulement Andrea doit trouver le coupable de la mort en mission de deux agents du Corps diplomatique, mais elle doit éviter que son enquête ne crée un incident avec les IA maîtres des lieux. Dans l'ambiance étouffante d'un avant-poste isolé où des fonctionnaires médiocres macèrent dans leurs rancœurs, Andrea évoluera, apprendra à s'ouvrir aux autres tout en découvrant une part de la vérité sur le massacre qui l'a traumatisée dans son enfance.

Au final, ce roman et les nouvelles qui le précèdent forment un ensemble de récits efficaces et agréables à lire. Malgré la présence des ingrédients classiques du space-opera, on peine à y trouver le sense of wonder, le vertige cosmologique que savent faire naître les grands textes de SF . Il ne faut pourtant pas passer à côté de Émissaires des morts : avec un personnage complexe, torturé et au final très émouvant comme Andrea Cort, avec un univers riche où le cynisme et la Realpolitik gouvernent les relations diplomatiques, avec ses questionnements éthiques, ce livre mérite le détour et permet de découvrir un auteur qui sait bâtir des histoires prenantes, à mi-chemin entre le space-opera et le roman policier.

 

Jean-François SEIGNOL (lui écrire)
Première parution : 23/3/2022 nooSFere

Prix obtenus
Philip K. Dick, Roman, 2009


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