La première édition de ce petit livre parut en 1959. Sept ans plus tard, voici une refonte complète, rendue nécessaire par tout ce qui s’est passé entre temps dans l’espace. L’exposé de Charles-Noël Martin est présenté dans un ordre logique : d’abord la cinématique des satellites (mouvement sur l’orbite et « usure » de celle-ci), puis les lanceurs et les lancements, enfin les satellites eux-mêmes. Pour ces derniers, il n’était pas question d’une étude exhaustive des quelque quatre cents engins lancés entre la parution de la première édition et la réaction de la seconde. L’auteur s’est donc borné à présenter quelques satellites remarquables, et d’esquisser trois « familles » – plus exactement, trois groupes : engins scientifiques, engins de télécommunication, engins habités.
Le mérite de Chartes-Noël Martin consiste à avoir su présenter un bon « survol » de son sujet, donnant en un peu plus de 120 pages une vue d’ensemble de celui-ci. Dans ce schéma général, le lecteur n’aura pas de peine à insérer telle ou telle donnée fournie par l’actualité scientifique. Contrairement à trop de commentateurs, qui tiennent à montrer l’étendue de leur savoir par l’accumulation de détails secondaires, Charles-Noël Martin a su dégager ici les lignes directrices d’une jeune science captivante.
Jeune science ? En vérité, la recherche spatiale est surtout l’application, en des sentiers nouveaux, de domaines déjà connus : la recherche spatiale est un « carrefour » de sciences ; elle profite de leurs acquisitions, et leur fournit des impulsions nouvelles. Le reproche principal qu’on peut adresser à l’auteur tient à ce point : au fait qu’il n’a pas mis cette interdépendance suffisamment en lumière. Car c’est sous ce double aspect (résultante, puis impulsion d’autres chapitres du savoir) que les applications de la recherche spatiale intéressent toutes les nations. Chaque pays – et pas seulement les deux Grands – a son rôle à jouer dans l’exploration de cette nouvelle frontière. Mais l’auteur répondrait sans doute que les dimensions que la collection Que saisie ? fixe à son travail l’obligeaient à se cantonner à la recherche spatiale pure, et à esquisser simplement ses applications.
Relevons au passage que l’auteur ne recourt pas à ce cliché aussi répandu qu’il est inexact, celui de la science-fiction dépassée. Au contraire, qu’on en juge (page 48) : "N’invoquons pas la science-fiction, sinon pour faire remarquer que l’esprit des anticipateurs romanciers… a depuis très longtemps saisi tout le parti à tirer des fusées et su décrire les déplacements spatiaux auxquels personne ne voulait croire."
Pour cette phrase, il sera beaucoup pardonné à l’auteur. D’ailleurs, il n’y a pas à recourir largement à l’indulgence à propos de ce petit livre, qui est dans l’ensemble fort bien fait.
Demètre IOAKIMIDIS
Première parution : 1/7/1966 dans Fiction 152
Mise en ligne le : 18/1/2023