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Civilisation et divagations - mort, fantasmes, science-fiction

Louis-Vincent THOMAS


Illustration de Philippe SOHIEZ

PAYOT , coll. Petite Bibliothèque Payot n° 354
Dépôt légal : 2ème trimestre 1979
Première édition
Essai, 288 pages, catégorie / prix : 4
ISBN : 2-228-33540-1
Genre : Science-Fiction



Quatrième de couverture
     Un tour d'horizon dans l'imaginaire permet de dénouer, à travers nos fantasmes d'angoisse, les signes de mort d'une société malade de ses progrès. L'homme d'aujourd'hui a peur, et, entre autres symptômes, la science-fiction est une mine d'éléments captivants pour qui se propose de mesurer l'ampleur de son désarroi.

     Nourris de la réalité présente, les fantasmes traditionnels s'y reconnaissent sous le discours rationnel directement inspiré du savoir scientifique. Même si, par un effet de grossissement, le récit s'étire jusqu'à l'extravagance des situations qui existent ou s'amorcent actuellement, le coup de pouce est profondément significatif.

     Ainsi, affranchie de l'exemple de Jules Verne, la nouvelle science-fiction est devenue une littérature de l'angoisse qui rend compte de la relation homme-univers dans le sens de l'écrasement de l'homme.

     En montrant à la loupe les excès et les carences d'une civilisation qui s'enferre, elle est le révélateur de nos craintes et de nos espoirs.
Critiques
 
     LE RETOUR DU REFOULE

     Ayant investi de manière boulimique et névrotique dans la maîtrise du monde et l'accumulation des biens, notre civilisation ne peut que nier la mort et son pouvoir dissolvant. Mais évacuée par la grande porte de la Raison et de la Technique, la mort symbolique s'infiltre dans les craquelures du sur-moi et fait retour dans notre société techniciste et rationaliste à travers les fenêtres divagantes de l'imaginaire.
     Sous-titré « mort, fantasmes, science-fiction », l'ouvrage de Louis-Vincent Thomas s'emploie à décrypter dans le discours de la science-fiction — considérée comme « le résultat de la rencontre entre les pulsions les plus profondes et l'effet de grossissement » — les fantasmes d'angoisse qui sous-tendent nos craintes et nos espoirs, ainsi que les signes de mort d'une société malade de ses progrès, en train de tuer la vie à force d'escamoter la mort.
     Littérature de l'angoisse, la science-fiction moderne crie la mort par toutes les bouches de son corps, que ce soit dans sa fringale de catastrophes à l'échelle planétaire, dans ses descriptions complaisantes de tyrannies mortifères et de mégalopoles dévorantes ou, paradoxalement, dans sa dérisoire « quête du ne pas mourir » (immortalité et amortalité, clonage, cryogénisation). « Symptôme social particulièrement intéressant », la science-fiction est pour l'anthropologue Louis-Vincent Thomas, un véhicule privilégié pour explorer les angoisses de mort de notre civilisation, chaque société n'ayant que l'imaginaire qu'elle mérite. Ce véhicule, l'auteur semble bien le connaître 1 : les exemples cités sont abondants et judicieux, et l'avant-propos brosse de la science-fiction un portrait d'une rare pertinence, définissant fort justement la spécificité de son discours (appropriation de l'objet technologique, récit axé sur une structure à laquelle les hommes sont globalement affrontés, développement de la « folie du si », effet de grossissement) et son rôle de menace culturelle (révélateur des fantasmes qui macèrent dans l'inconscient collectif, elle fait prendre conscience de l'incomplétude de notre civilisation mutilante).
     Limpide dans sa démonstration et d'une lecture aisée. Civilisation et Divagations est un ouvrage nécessaire pour quiconque veut pénétrer la science-fiction moderne et dénouer ses fantasmes de mort. (A noter que cette approche anthropologique de l'actuel « Malaise dans la SF » ne réfute pas la thèse sociologique exprimée par Gérard Klein dans son essai 2. -Simplement elle en propose un autre éclairage, complémentaire).


Notes :

1. A condition de rayer rageusement cette petite phrase, profondément irritante : « La science-fiction n'a pas encore conquis ses lettres de noblesse » ! (p. 11 ).
2. En postface au roman d'Ursula Le Guin, Le nom du monde est forêt (Ailleurs et Demain — Laffont).

Denis GUIOT
Première parution : 1/11/1979 dans Fiction 305
Mise en ligne le : 13/9/2009

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