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Des parasites comme nous

Adam JOHNSON

Titre original : Parasites Like Us, 2003
Première parution : Viking, 2003
Traduction de Florence DOLISI
Illustration de Stephen SWINTEK

DENOËL (Paris, France), coll. Lunes d'Encre
Dépôt légal : septembre 2006, Achevé d'imprimer : 28 août 2006
Première édition
Roman, 480 pages, catégorie / prix : 24 €
ISBN : 2-207-25536-0
Format : 14,0 x 20,5 cm
Genre : Science-Fiction



Ressources externes sur cette œuvre : quarante-deux.org
Ressources externes sur cette édition de l'œuvre : quarante-deux.org

Quatrième de couverture
Hank Hannah, professeur à l'université du Dakota du Sud, a connu son heure de gloire en publiant Les Exterminateurs, un livre fort controversé dans lequel il soutenait que les populations asiatiques ayant colonisé les deux Amériques sont à l'origine de la disparition de la plupart des grands mammifères américains. Aujourd'hui tout le monde a oublié Les Exterminateurs, et Hank s'intéresse surtout à l'expérience d'un jeune étudiant millionnaire, Eggers, qui, depuis un an maintenant, vit comme un homme des cavernes. Un jour, sur un chantier, Eggers découvre un squelette vieux de douze mille ans ainsi qu'une urne contenant ce qui semble être du maïs. Fous de joie à l'idée d'avoir fait la découverte de leur vie, Hank et Eggers ouvrent la boîte de Pandore et scellent le destin de l'humanité.
 
À une époque où l'on ne peut plus rire de tout, Des parasites comme nous s'impose comme une comédie virtuose, d'un mauvais goût très sûr et d'une originalité forcenée, dans laquelle une certaine bêtise (typiquement américaine) provoque l'extinction de l'humanité.
 
     Adam Johnson est l'auteur de l'excellent recueil de nouvelles Emporium. Il vit dans la région de San Francisco.
Critiques
     Avertissement : ceci n'est pas — à proprement parler et pour l'essentiel — un roman de SF. Autre avertissement : il serait dommage de passer à côté. Dernier avertissement : les lignes qui suivent ne peuvent que révéler des choses que le lecteur ne devrait pas savoir avant la page 330. Donc gâcher un des plaisirs de la lecture. Mais pas plus que ne le fait la quatrième de couverture. On a en fait 330 pages de roman de campus. Vu côté prof ; prof d'anthropologie au Dakota du sud, auteur d'une thèse assez obscure sur l'extermination des grands mammifères sauvages d'Amérique par les premiers hommes arrivés sur le continent. Son père s'amuse depuis sa retraite et son veuvage. Une de ses étudiantes n'est pas très contente de ce qu'une bourse d'études lui passe sous le nez. Un de ses étudiants tente, à titre d'expérience, de vivre avec les moyens de l'âge de pierre, ce qui n'est pas très bon pour les écureuils du campus. Et le fait de tuer avec une pointe de pierre un cochon trop domestique devient une monstrueuse source d'ennuis, surtout quand un ancien camarade d'école, pas plus porté sur l'admiration pour les intellectuels que sur le pardon des offenses, est successivement enquêteur supplétif et gardien d'un centre de semi-liberté. Bref, il ne se passe pas grand chose, mais tout est dans le ton, dans l'humour, dans la capacité à démonter à froid des petitesses qui en deviennent grandioses — celles du narrateur au premier chef. C'est moins baroque que du Stephenson, le « mauvais goût très sûr » annoncé par l'éditeur est recouvert par un humour qui serait britannique si l'auteur n'était américain, mais ce n'est pas un défaut. Et puis s'y ajoutent parfois de brèves notations sur l'extinction des espèces, la prédation, et les anthropologues de l'avenir, lecteurs supposés du texte : cela prépare la suite. Parce qu'à la page 330, tout bascule. Pas tout de suite, d'ailleurs. Avec une épizootie. Puis une pandémie. Puis une catastrophe mondiale. La fin de l'humanité, racontée en quelques cent vingt pages par un survivant, toujours aussi tributaire de ses obsessions professionnelles. Avec une logique parfaite dans le mécanisme qui la relie à une découverte archéologique faite dans la première partie, et explique la survie des principaux personnages de celle-ci. Avec aussi quelques montagnes de porcs massacrés, et quelques millions de cadavres humains recouverts de neige. De quoi cauchemarder un chouïa, à la prochaine vague d'informations sur une quelconque grippe aviaire. De quoi se dire que ça doit tout de même bien être de la SF. Que les hypothétiques fans exclusifs de SF rebutés par les trois premiers quarts du texte auront eu tort. De même que les moins hypothétiques zélateurs du mainstream regardant de haut les littératures « de genre ». Parce qu'Adam Johnson a un sacré talent. Ce qu'on savait du reste depuis les nouvelles d'Emporium.

Éric VIAL (lui écrire)
Première parution : 1/5/2007 dans Galaxies 42
Mise en ligne le : 24/2/2009


     Hank Hannah est professeur d'anthropologie dans une université américaine, qui s'est fait remarquer en publiant un livre dans lequel il affirmait que les premiers colons de l'Amérique, les Clovis, des peuplades venues d'Asie par le Détroit de Behring, avaient causé l'extermination de trente-cinq races de grands mammifères américains par leur propension inconsidérée à chasser. Malheureusement, l'heure de gloire de Hannah appartient plus au passé, et il traîne désormais son désabusement en encadrant tant bien que mal plusieurs étudiants, dont l'un d'entre eux, Eggers, a décidé de reproduire le mode de vie des Clovis, et campe dans une tente en peaux de bête, ne se lave pas et tue des écureuils pour manger. Mais, le jour où Eggers croit trouver une pointe de lance Clovis, puis le squelette d'un représentant des colons, c'est le début d'une longue aventure qui sonnera le glas de la civilisation telle qu'on l'a connue.
     On avait remarqué Adam Johnson pour son premier recueil, Emporium, condensé d'humour noir et de critique de la société américaine, marqué par des textes étonnants et déstabilisants. Il reprend cette formule ici, puisque l'humour féroce y règne en maître, tant à l'encontre du milieu universitaire américain que des loulous de Poméranie. Le personnage d'Hank Hannah, qui navigue entre souvenir — celui de sa gloire passée, mais plus encore celui de sa belle-mère morte, avec qui il avait une complicité bien supérieure à celle avec ses propres parents — et temps présent, est le principal vecteur de ce sarcasme, et sans aucun doute un alter ego de l'auteur, dont on devine sans peine le recul qu'il a par rapport à sa propre société. Car le propos de celui-ci pourrait se résumer ainsi : comment la Création a-t-elle pu donner à l'espère humaine, ces parasites (comme l'indique le titre), une telle faculté d'influencer sur son environnement, jusqu'à provoquer des cataclysmes la dépassant de loin ? Johnson se garde d'ailleurs d'apporter une réponse à cette question, préférant étayer celle-ci par une démonstration grandeur nature, où les événements s'enchaînent sans que l'homme, une fois la boîte de Pandore ouverte, ne puisse avoir la moindre maîtrise des conséquences de ses actes inconsidérés. Et même si, par l'intermédiaire des Clovis, il était déjà au courant des risques encourus à trop vouloir contrôler avec ce qui l'entoure. Au final, un roman d'une noirceur incommensurable, où l'argument SF est ténu et présent uniquement dans la seconde partie du livre. Mais qu'on l'on ne s'arrête pas à ça : Des parasites comme nous est une nouvelle réussite éclatante de cet auteur définitivement hors normes qu'est Adam Johnson. Amateurs de normalité s'abstenir, amateurs de bizarreries bienvenus !

Bruno PARA (lui écrire)
Première parution : 15/10/2006 nooSFere


     Et un raté pour « Lunes d'encre »... Pas de panique toutefois, c'est d'un raté magnifique qu'il s'agit. Bénéficiant d'une aura parfaitement délicieuse suite à la publication de son excellent recueil Emporium en Denoël « & d'ailleurs » (cf. critique in Bifrost n°38), Adam Johnson était plus qu'attendu avec Des Parasites comme nous. Très pointu dans l'histoire courte, tour à tour subtile, jubilatoire, hilarante, tragique ou triste à mourir, Johnson ne pouvait que s'intéresser au roman dans toute sa normalité. Un début, un développement, une fin et presque 500 pages d'aventures bien ficelées.

     Pari tenu et... Manqué. Des Parasites comme nous confirme certes un vrai talent d'écrivain et un vrai sens du tragicomique, mais peine à convaincre un lecteur qui finit tout bêtement par s'ennuyer à mesure que les pages s'accumulent.

     On a pu lire ou entendre que Emporium est un concentré de littérature. C'est vrai. Moins pour Des Parasites comme nous. La petite musique du recueil est indéniablement présente ici, mais là où tout fonctionne comme par miracle sur une histoire courte, tout s'écroule dans la longue. On l'a dit, c'est subtil, c'est tragique, c'est triste, c'est drôle. Le problème, c'est que tout se télescope. Adam Johnson hésite, tergiverse et ne sait jamais où il va. Il y a du bouleversant dans Des Parasites comme nous. Il y a aussi du gros délire (mais jamais de mauvais goût, comme l'annonce curieusement la quatrième de couverture), une originalité folle, une prospective qui fait froid dans le dos, une étude psychologique poussée et des personnages pointus... Il y a tout ça, sauf qu'à force de ne pas savoir où on se situe, on finit par être nulle part. De bonnes pages, de bons moments, parfois d'excellentes surprises, mais un goût un peu fade et un manque de fond qui déçoit.

     Résumons. Des Parasites comme nous ressemble à plusieurs nouvelles compilées en un seul et même gros roman. On y suit la vie quotidienne de Hank Hannah, prof d'anthropologie dans une improbable université du Dakota du sud noyée sous la neige chaque hiver. Après une très brève heure de gloire éditoriale (la publication des Exterminateurs, thèse audacieuse sur la manie exterminatrice des premiers habitants du sol américain), Hannah coule des jours mornes, entre ses étudiants thésards brillants ou fous (une magnifique jeune fille fantasmatique et un jeune gars qui pousse l'expérience anthropologique jusqu'à vivre exactement comme les hommes de Cro-magnon), sa Corvette de vieux beau, son père séducteur désespérée, sa mère disparue, sa vie sexuelle lamentable et sa belle-mère tout à fait morte... Existence terne qui permet à Johnson d'asséner quelques vérités bien senties sur la vie, l'univers, tout ça quoi. Il faut quand même attendre 350 pages (sur 460, donc) avant que ce qu'on nous promet sur la quatrième de couverture ne se produise : la découverte (très improbable) de restes humains extrêmement vieux, enterrés comme il faut avec de petites jarres. En gros, la trouvaille archéologique la plus importante de toute l'histoire américaine. Et au bout, la gloire pour les scientifiques. Une gloire qui tourne court quand le maïs contenu dans une des jarres est savamment bouffé en pop-corn par les découvreurs tandis que la deuxième jarre est répandue par mégarde (ou volonté divine d'en finir ?) à même la terre. Résultat, une maladie inconnue qui décime l'humanité et qui laisse pour seuls survivants ceux-là mêmes qui s'en sont préalablement immunisés en ingérant le maïs cuit (et donc moins virulent, une évidence)...

     On le voit, c'est tordu, délicieusement vicieux et affreusement injuste. Le roman tourne alors au post-apocalyptique et il faut bien reconnaître que les cent dernières pages touchent au sublime et rattrapent joyeusement les 300 premières, soporifiques. Reste que Des Parasites comme nous est un livre bancal et inachevé, pire, un roman qui aurait pu être magnifique, mais qui se contente de trop peu tout en s'autorisant çà et là quelques pages d'anthologie. Un vrai beau ratage, donc, qui ne doit cependant pas nous éloigner d'un auteur plus que prometteur. A suivre, comme le veut la formule consacrée.

Patrick IMBERT (site web)
Première parution : 1/10/2006 dans Bifrost 44
Mise en ligne le : 13/3/2008

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