Imaginez qu'au mois d'octobre, un phénomène étrange, appelé la Vague, se soit produit. Imaginez que depuis cette date, chacun vive dans une bulle temporelle qui lui soit propre. Imaginez que votre femme et vous deviez d'être réunis dans la même bulle au seul fait qu'au moment fatidique vous faisiez l'amour. Imaginez que votre bébé, parce qu'il n'était pas dans la même pièce, se trouve éloigné de deux secondes... et en souffre terriblement depuis.
Depuis la Vague, la vie a repris son cours tant bien que mal. Les gens sont décalés et les contacts très difficiles, malgré le port d'un badge annonçant dans quel temps chacun se situe, pour s'obliger à en tenir compte, à attendre la réponse, comme dans ces où l'on doit intégrer le temps de transmission de l'information. Mais des délais qui peuvent atteindre la minute, dans les moindres actes du quotidien, c'est beaucoup trop ; d'où des suicides en masse. Arto Neumann, un électronicien, va être amené à faire partie d'une équipe chargée de découvrir la cause de la Vague, et si possible, de l'annihiler. Cette mission se révélera dangereuse et pleine d'imprévus.
Voici la promesse d'un roman passionnant. L'idée de départ est tout à fait originale — je ne connais que P.K. Dick qui ait ainsi joué avec le temps (mais il est vrai que je n'ai pas tout lu). Malheureusement, il y a, dans La Boucle d'Octobre, une surabondance d'explications scientifiques qui gâchent la narration. On aurait préféré que Jean-Michel Calvez s'attarde un peu plus sur la difficulté des contacts quotidiens, comme dans le très émouvant chapitre 2. On aurait bien aimé savoir ce qu'il en est des jeux des enfants dans les cours d'écoles, ou de l'enseignement dans une classe remplie de gamins chahuteurs et décalés, ou du sort des animaux. Comment organiser la traite de vaches décalées dans le temps, l'abattage du bétail, et plus largement, l'approvisionnement de la population ? C'est tout un pan de vie qui manque, remplacé par un cours de physique nucléaire qui satisfera peut-être les aficionados de « hard science » mais frustrera la plus grande partie des lecteurs de fiction. Et c'est vraiment dommage, parce que cette histoire de Vague et de décalages temporels est vraiment intéressante, riche en perspectives et pour tout dire : fabuleuse, dans tous les sens du mot.
Lucie CHENU
Première parution : 1/5/2006 nooSFere