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L'Enfant de cristal

Theodore ROSZAK

Titre original : The Crystal Child, 2007
Traduction de Edith OCHS
Illustration de Marc BRUCKERT

LE CHERCHE-MIDI (Paris, France), coll. NéO
Dépôt légal : février 2008
Première édition
Roman, 540 pages, catégorie / prix : 22 €
ISBN : 978-2-7491-1046-2
Format : 14,0 x 22,0 cm
Genre : Science-Fiction



Quatrième de couverture
     Julia Stein, une brillante gérontologue, se voit confier un cas exceptionnel, Aaron Lacey, un enfant atteint de progéria. Quand ses parents le lui confient, il présente tous les signes de la vieillesse : petit, voûté, la vue faible, le crâne chauve. Touchée par Aaron, Julia tente tout ce qu'elle peut pour lui venir en aide, quitte à user de méthodes peu conventionnelles. Commencent alors chez Aaron, dont le corps est épuisé, une série de métamorphoses qui vont en faire un être exceptionnel, d'une intelligence rare, d'une sensibilité peu commune, d'un savoir iconoclaste. Après diverses péripéties, Aaron va fuir son entourage et se retrouver au fin fond de la campagne mexicaine, dans l'étrange propriété d'un extravagant docteur DeLeon, dont les travaux sur le vieillissement sont plus que sujets à caution...
 
     Critique d'une société dans laquelle la condition humaine est de plus en plus médicalisée et aux ordres d'une philosophie rationnelle et scientifique, L'Enfant de cristal est aussi une bouleversante réflexion sur le corps, la vieillesse et le temps qui passe.
 
     Theodore Roszak est né en 1933. Il vit à Berkeley, enseigne l'histoire à l'université de Californie et collabore régulièrement au New York Times. Essayiste et romancier, on lui doit, entre autres, Vers une contre-culture (Stock, 1970), La Conspiration des ténèbres (le cherche midi, 2003), Le Diable et Daniel Silverman (le cherche midi, 2004), Les Mémoires d'Elizabeth Frankenstein (le cherche midi, 2007).
 
     A propos de La Conspiration des ténèbres
 
     «  Précipitez-vous sur La Conspiration des ténèbres  !  »
     Jacques Baudou, Le Monde
 
     «  On serait bien en peine de trouver meilleure lecture cet été.  »
     Philippe Garnier, Libération
 
     «  Un pur chef-d'œuvre du genre, et même bien plus que cela.  »
     Nicolas d'Estienne d'Orves, Le Figaro Magazine
 
     «  Hypnotique... Du grand art, Roszak use d'une captivante écriture visuelle.  »
     Olivier Delcroix, Le Figaro
Critiques
     Après La Conspiration des ténèbres, best seller unanimement salué par la critique, et à juste titre (cf. critique de Xavier Mauméjean dans le Bifrost 36), puis Les Mémoires d'Elizabeth Frankenstein, passé au contraire quasi inaperçu (sauf dans Bifrost : critique in n°47), on attendait Theodore Roszak au tournant. D'autant plus qu'entre-temps, le présent roman a recueilli les suffrages du jury du Grand Prix de l'Imaginaire (meilleur roman étranger), succédant à La Route de Cormac McCarthy au prestigieux palmarès, ce qui n'est pas rien...

     Julia Stein, gérontologue de renommée internationale, se voit confier le cas d'Aaron, un petit garçon atteint de progeria, une maladie rare qui le fait prématurément vieillir et le condamne à une mort imminente. Alors que Julia teste sur lui l'éventail de ses talents, des thérapies anti-vieillissement éprouvées aux inutiles remèdes de rebouteux, en passant par l'exercice physique et la pratique de jeux vidéo pour stimuler le corps et l'esprit, une relation de plus en plus fusionnelle s'installe entre la praticienne et son patient. Et voilà qu'un beau jour, le miracle se produit. Sauf qu'Aaron fait bien plus que guérir, il transcende la vieillesse, selon lui un simple stade du développement humain qu'on n'a pas encore su dépasser, et devient quelque chose de nouveau, un être dont la beauté, l'intelligence et le charme s'approchent de l'absolue perfection. Charme auquel succombe bien évidemment la belle doctoresse, prise en flagrant délit de ce que la loi appelle pédophilie. C'est pour elle le début de la fin : à la gloire succède la prison et la déchéance, tandis qu'Aaron, incompris par la société de ses contemporains, est confiné par ses parents dans le rôle d'un enfant (d'un être humain ?) qu'il n'est plus.

     Ce récit qui commençait pourtant bien perd de sa crédibilité à chaque page, pour finir par tomber dans le grand n'importe quoi. Principalement parce que les personnages sont aussi pathétiques qu'agaçants ; leurs réactions stéréotypées, voire téléphonées, gâchent un texte dont le ressort se veut avant tout psychologique. Mais aussi parce qu'on y croise tant et plus de théories fumeuses tendance mystique new age que ça en devient risible. On n'y croit pas un instant et, pire, on sent que c'est aussi le cas de l'auteur, qui est parvenu à faire d'un sujet intelligent un roman idiot.

     Mais que s'est-il passé dans la tête des membres du jury du Grand Prix de l'Imaginaire pour désigner L'Enfant de cristal meilleur roman étranger ?

Thibaud ELIROFF
Première parution : 1/1/2009 dans Bifrost 53
Mise en ligne le : 29/9/2010


     « Je crois que le temps est une maladie, comme un virus. Je ne crois pas que le monde ait été fait pour comporter le temps en lui. » (p.28)


     Aaron a neuf ans lorsqu'il entre dans la clinique du docteur Julia Stein, une gérontologue de renom : il est atteint d'une maladie exceptionnelle, la progéria, vieillissement accéléré de l'organisme qui le condamne à une mort rapide.
     Révoltée et déterminée à guérir Aaron, Julia va tout essayer — du régime hypocalorique à la stimulation par des jeux vidéos, en passant par divers médicaments ou hormones — , toutes ces pauvres thérapeutiques qu'elle sait inefficaces mais qu'elle ne peut s'empêcher de tenter dans un espoir insensé.
     Et le miracle survient. Aaron retrouve peu à peu ses forces puis une apparence juvénile... Pourquoi cette guérison inespérée ? De quelle nature est le nouvel Aaron ? Demeure-t-il toujours un véritable enfant ?

     En réalité, Aaron n'a pas retrouvé la santé : « Je ne suis pas retourné en arrière. J'ai continué d'avancer. Je suis passé par tout ce qui rend mortelle la vieillesse... et je suis ressorti de l'autre côté. » (p.355) Pour lui, la vieillesse n'est pas une sorte de maladie constamment fatale, mais un simple stade évolutif de l'être humain, au même titre que l'adolescence. Un stade qu'il est donc possible de dépasser. Les analyses le prouvent : les mitoses cellulaires d'Aaron se déroulent désormais sans la moindre erreur. Elles sont d'une perfection telle que le garçon peut probablement prétendre à l'immortalité.
     Mais alors qu'est-il devenu ? Pour Julia, « il incarne quelque chose qui est plus qu'humain » (p.381), « il est l'incarnation d'un mythe. » (p.382) Est-il le premier de son espèce, ou s'agit-il d'un phénomène ancien, qui pourrait expliquer les patriarches multicentenaires dont regorge la Bible ? « Et si les gènes à action différée comptaient aussi de bons gènes, des gènes qui nous rendraient plus solides et plus intelligents, des gènes qui nous conféreraient des pouvoirs qu'on ne trouve que dans les contes et les mythes... comme l'intuition ou le don de seconde vue ? Pense à toutes ces histoires qui parlent des vieux sorciers sages et des guérisseurs. D'où nous viennent ces contes ? Pourquoi nous sont-ils aussi précieux ? Pourquoi ne cesse-t-on jamais de les raconter ? » (p.368)
     Le sous-titre du roman, Une histoire de la vie enfouie, témoigne ainsi du questionnement de Julia : « En retirant les handicaps de l'âge qui pesaient si lourdement sur lui, avait-elle libéré une vie enfouie dont elle ignorait l'existence, quelque chose que les légendes transmettaient plus ouvertement. » (p.162)

     Cette réflexion sur le vieillissement et la longévité conduit donc l'auteur à s'interroger sur les mythes et sur les énigmes que ceux-ci continuent à nous poser. Cronos, Eros, Narcisse, ou Sémélé entrent dans la danse, entre autres références littéraires et artistiques, notamment pour poser la question de la place de l'amour et du sexe dans la condition humaine.
     Pour Aaron qui semble disposer de l'éternité, le sexe, « ce que les gens ont à la place de l'immortalité » (p.263), devient inutile et même nuisible : « Quelque chose se produit quand le sexe pénètre dans la vie. Pas un épanouissement, mais une diminution : un rétrécissement. » (p.337)
     De même, la morale ne signifie plus grand chose pour lui : « La longévité est le chemin qui conduit au surhomme, cet homme qui domine l'éphémère et le transitoire. Quelles règles est-il censé respecter ? » ; « La quête de la longévité laisse la morale derrière elle. Par nécessité. Supposez que vous viviez cinq cents ans. A quel code moral seriez-vous tenue d'obéir ? Le code de votre enfance ? De votre premier siècle ? Ou de votre deuxième siècle ? Vous verriez les inhibitions morales passer comme autant de modes vestimentaires. » (p.312)
     Dès lors, Aaron progresse vers un autre stade de conscience. Il est convaincu de l'existence d'un autre ordre des choses, d'un ordre tel qu'il existait avant le commencement du temps, un « ordre cristallin » idéal car, à ses yeux, « les cristaux conservent obstinément leur forme » (p.398) et transcendent le besoin d'une reproduction sexuelle. Aaron veut achever son évolution vers un « enfant de cristal »...


     Ce qui commençait comme l'histoire bouleversante d'un petit garçon mourant bascule bientôt vers l'inattendue descente aux Enfers de Julia, avant de réserver bien d'autres surprises. De manière subtile, Theodore Roszak construit un récit imprévisible, déroutant et d'une grande richesse. Outre ceux déjà cités, de nombreux thèmes y sont abordés avec beaucoup de sensibilité. La pédophilie par exemple, dont on ne sait plus quoi penser lorsque l'enfant âgé d'une dizaine d'années possède un esprit qui paraît avoir vécu au-delà d'une vie humaine normale... La médecine, avec ses espoirs, ses désillusions, la souffrance du médecin face à son impuissance qui peut le conduire à outrepasser son rôle, l'importance du placebo et de « l'autorité », les charlatans charismatiques et les chercheurs pris entre leurs ambitions personnelles affirmées et les nécessités financières... Le pouvoir, celui des médecins bien sûr, celui des marchands d'illusions, celui de l'argent qui permet aux mégalomanes de se construire des villas insensées, véritablement « infernales »...

     Avec ce roman original et érudit, où il réussit à renouveler admirablement les thèmes ultra classiques en science-fiction que sont l'immortalité et le « plus qu'humain », Roszak confirme qu'il est un auteur atypique de grand talent. Cette lecture aussi émouvante qu'intelligente a toutes les qualités pour séduire un large public, aussi bien de science-fiction que de littérature générale.

Pascal PATOZ (lui écrire)
Première parution : 9/3/2008 nooSFere

Prix obtenus
Grand Prix de l'Imaginaire, Roman étranger, 2009


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