Alix E. HARROW Titre original : The Once and Future Witches, 2020 Première parution : New York, USA : Redhook, 13 octobre 2020 Traduction de Thibaud ELIROFF
HACHETTE HEROES
(Vanves, France), coll. Le Rayon Imaginaire Date de parution : 12 octobre 2022 Dépôt légal : octobre 2022 Première édition Roman, 624 pages, catégorie / prix : 28 € ISBN : 978-2-01-716400-5 Format : 15,0 x 23,0 cm Genre : Fantasy
Conception graphique : Pauline Ortlieb.
Quatrième de couverture
Avant, quand l’air était si imprégné de magie qu’il laissait un goût de cendres sur la langue, les sorcières étaient féroces et intrépides, la magie flamboyait et la nuit leur appartenait. Ce temps n’est plus, les hommes ont dressé des bûchers, et les femmes ont appris à se taire, à dissimuler ce qui leur restait de magie dans des comptines, des formules à deux sous et des contes de bonne femme.
Mais la vraie sorcellerie n’a besoin que de trois choses pour renaître : la volonté de l’écouter, les vers pour lui parler, et les voies pour la laisser pénétrer le monde. Car tout ce qui est important va par trois.
Ainsi des sœurs Eastwood : Bella, Agnès et Genièvre. Mues par la colère, la peur... et une pulsation écarlate qui ne demande qu’à revivre, des dons qu’elles découvrent peu à peu. Il suffit pour cela de s’unir, et d’y croire, de traquer tous les interstices où elle se dissimule. Car la magie, c’est d’abord penser que chacun est libre d’agir, même si le mal rôde. Le temps des Sorcières pourrait alors bien revenir, pour notre plus grand bénéfice à tous, hommes et femmes.
Alix E. Harrow signe un nouveau roman magistral qui réinvente la figure des sorcières. Une épopée magnifique tissée de fantaisie, nourrie de promesses et d’un imaginaire sans limites, qui est aussi une ode à la liberté des femmes... et des hommes. Lauréat du British Best Fantasy Award 2021.
Critiques
En 1893, dans la ville de New Salem, les trois sœurs Eastwood se retrouvent dans le mouvement des suffragettes pour obtenir le droit de vote. Agnès est ouvrière dans une usine, Bella est bibliothécaire, et Genièvre est recherchée pour le meurtre de son père. Dans ce monde où l’ancienne Salem a été ravagée par le feu pour détruire les sorcières, la magie existe toujours, mais elle est peu puissante, les sorts encore connus par les femmes n’étant utilisés que pour les aider légèrement au quotidien. Mais lorsque les sœurs Eastwood se heurtent au pouvoir et aux forces les plus conservatrices de la ville, elles partent à la recherche des pouvoirs anciens les plus puissants.
On avait lu l’année dernière le premier roman d’Alix Harrow, Les Dix milles portes de January, délicieux récit d’apprentissage mêlant amour des livres et univers parallèles, porté par un style aussi agréable qu’efficace. Changement de décor et de thème avec ce second roman, au contenu plus explicitement politique habilement mêlé à de la sorcellerie. Des trois sœurs Eastwood, deux subissent directement et violemment une oppression : Agnès, l’ainée, travaille dans une usine de coton sous les ordres d’un contremaître tyrannique et harceleur ; Genièvre, la benjamine, a passé sa jeunesse seule avec son effrayant père lorsque ses deux sœurs ont quitté le domicile. Seule Bella, la bibliothécaire, a connu un meilleur sort grâce aux livres. Leurs retrouvailles, malgré les conflits passés qui les opposent, vont recréer chez elles un sentiment de sororité leur permettant de combattre leur ennemi, Gideon Hill, archétype des forces réactionnaires et patriarcales, de s'entourer d'autres combattantes et de rétablir le lien avec les pratiques des générations précédentes. Car la magie, dans Le Temps des sorcières, n’est pas là pour la pyrotechnie mais plutôt comme un support physique de cette sororité et de la lutte contre l’oppression et comme un outil de défense transmis entre les générations. Assez finement, Harrow en profite pour multiplier les angles de cette lutte, d’abord grâce à la relation entre Bella et Cléo Quinn, rappelant que les femmes noires, en plus du patriarcat, subissent le racisme, mais aussi avec August, cet ouvrier qui a utilisé la magie avec d’autres travailleurs contre son patron, personnage allié malgré ses maladresses et sa méconnaissance des femmes.
Déroulant son intrigue sur plus de 600 pages, l’autrice alterne avec régularité scènes d’actions, rebondissements et passages plus intimistes, comme les relations entre les trois sœurs ou celle entre Bella et Cléo, le tout dans une prose limpide. Si Le Temps des sorcières vise avant tout un public young adult, avec son coté roman d’apprentissage, ses personnages archétypaux et son intrigue linéaire, son contenu est suffisamment riche et intelligent pour toucher tous les publics. Lisez Alix Harrow !