LIVRE DE POCHE
(Paris, France), coll. SF (2ème série, 1987-) n° 7096 Dépôt légal : octobre 1988 Première édition Anthologie, 416 pages, catégorie / prix : LP10 ISBN : 2-253-04719-8 Format : 11,0 x 17,8 cm Genre : Science-Fiction
Quatrième de couverture
Culbutes dans le temps, vagabondages dans l'espace, logiques différentes et carrément démentes, ironie explosive et nostalgies romantiques, c'est le programme de cette anthologie de la science-fiction française qui inaugure la troisième série de la Grande Anthologie de la Science-Fiction du Livre de Poche.
La grande anthologie de la science-fiction :
—40 volumes qui abordent tous les thèmes et toutes les tendances de la science-fiction (37 volumes parus).
— Les 320 plus grands auteurs de 1930 à nos jours, dont 20 auteurs français.
— Dans chaque volume, une étude sur le sujet traité, une présentation des textes et un dictionnaire des auteurs, établis par les meilleurs spécialistes.
Un instrument de découverte et de référence inégalé et indispensable.
Etant donné le nombre d'anthologies de textes français de SF (inédits ou non) publiées depuis 1980, nous ne pouvions que nous réjouir de la parution de ces deux volumes, lesquels, complétés par un troisième à paraître, avaient été annoncés comme un panorama de la SF du terroir, des années cinquante à nos jours. Une sorte de Livre d'Or en trois tomes, le premier recouvrant les années cinquante et soixante, les deux autres les décennies suivantes.
Les Mondes Francs devait donc, par l'intermédiaire des anthologistes, présenter les précurseurs, les textes-clé, et faire le point sur cette époque. Mission accomplie ! On retrouve les classiques (« C'est du Billard ! » de Philippe Curval, « La Planète aux Sept Masques » de Gérard Klein, « La Rose des Enervents » de Daniel Drode), ainsi que d'autres, tout aussi importants, qui mériteraient de le devenir : « Une Nuit Interminable », où Pierre Boulle part sur les traces de René Barjavel, « Nocturne pour Démons » de Michel Demuth, « Au Pilote Aveugle » de Charles et Nathalie Henneberg, deux essais de SF « à l'américaine » ; enfin « Point de Lendemain » de Jean-Paul Török, « Ceux d'Argos » du tandem MartineThomé/Pierre Versins, et « Comme un Oiseau Blessé » de Gilbert Michel, annonciateurs d'une certaine manière, avec celui de Klein, du courant esthétique des années quatre-vingts. Les neuf autres sont à mon sens, historiquement et qualitativement parlant, beaucoup moins Importants...
Certes, la plupart de ces nouvelles n'ont pas très bien vieilli mais il ne faut pas perdre de vue qu'elles étaient en leur temps ce qui se faisait de mieux. Un « oubli » de taille, cependant : Alain Dorémieux, injustement délaissé, alors que le premier numéro de la revue italienne Futuro lui rend au même moment hommage en rééditant « La Vana », son texte le plus connu. Un paradoxe...
L'Hexagone Halluciné est quant à lui complètement raté ! Je ne veux évidemment pas dire par là qu'il ne présente pas le moindre texte intéressant (on retiendra les prestations de Bernard Mathon, Dominique Douay, Serge Brussolo et Gérard Klein), mais tout simplement qu'il n'est sous-tendu par aucun projet d'ensemble. Bien sûr, les anthologistes précisent dans leur préface que leur « intention n'est pas (...) de proposer un historique », sous-entendant que leur objectif premier n'est autre que de donner à lire au public une sélection des meilleures nouvelles des années soixante-dix. Mais du coup, ils en profitent pour refaire l'histoire et prendre leurs rêves pour des réalités ! En effet, ils nous présentent une vision partielle, pour ne pas dire partiale, de la Science-Fiction française de cette décennie, au moyen d'une sélection pour le moins aberrante, écartant impitoyablement des « tendances » ou des auteurs, sous prétexte que ceux-ci ne s'intègrent pas à leur vision personnelle de la SF !
La subjectivité ? D'accord, mille fois d'accord... Mais a-t-on pour autant le droit, quand on prétend réaliser un panorama collant un tant soit peu à la réalité, d'éliminer Daniel Walther (auteur-phare des années-soixante-dix, avec Jeury et Andrevon, à la bibliographie colossale, reconnu presque unanimement), et cela sous prétexte qu'on ne l'aime pas ? Ou bien Jean-Pierre Hubert, ou encore Alain Dorémieux (toujours lui !) A-t-on le droit de ne pas sélectionner au moins un texte de Fiction Spéculative éclaté ? Un texte expérimental ? Un texte politique ? Alors que ces tendances, représentent une vingtaine de collectifs... A-t-on le droit de publier une des nouvelles les moins engagées de Jean-Pierre Andrevon (alors que « Le Monde Enfin », texte préféré de son auteur, aurait été parfaitement à sa place ici) ? Le droit de ne pas retenir de textes issus de Futurs au Présent ? Et de boucher les trous avec des textes mineurs d'auteurs mineurs (Michel Leriche et Jacques Goimard) ou peu représentatifs des années soixante-dix (Francis Carsac...) ?...
C'est un peu comme si on laissait de côté, pour un volume similaire consacré aux années quatre-vingt, des auteurs de l'envergure d'Emmanuel Jouanne, Jacques Barbéri, Jean-Claude Dunyach, Jean-Pierre Vemay, Sylviane Corgiat, Bruno Lecigne ou Daniel Martinange... On peut avoir, à ce propos, bien des inquiétudes pour le troisième volume !
Le problème vient essentiellement, je crois, de ce que nos anthologistes ne sont pas en phase avec la SF française contemporaine, se raccrochant désespérément à une vision étriquée du genre qui nous intéresse (aventures, technologie...), et rejettent systématiquement tous les textes différents et novateurs, tous les auteurs désirant écrire réellement, défenseurs d'une littérature totale...
Bref, L'Hexagone Halluciné, puzzle bâtard fait de bric et de broc, ne m'a pas convaincu et ne pourra tromper, c'est le plus regrettable, que le lecteur occasionnel et néophyte !