Ecrivain polyglotte, né à Buenos Aires, a poursuivi ses études en Suisse, est devenu — alors qu'il était aveugle — directeur de la Bibliothèque Nationale d'Argentine, tout en écrivant des poèmes, des essais courts puis en dictant des textes inclassables. Pourquoi le rapprocher de la SF ? Par l'intérêt qu'il y prend : il préface Bradbury, Stapledon, Bioy Casarès (Livre des Préfaces, Folio), écrit sur Wells (dans le recueil Enquêtes, Gallimard, 1952). Par les thèmes de ses essais : Nouvelle réfutation du temps, ou L'avant-dernière version de la réalité, par exemple (Discussion, Gallimard, 1957). Par ses récits enfin : de Tlön uqbar orbis tertius, La bibliothèque, La loterie à Babylone (au sommaire de son premier recueil de contes Fictions, Ficciones, Folio, 1944) en passant par L'Aleph, L'écriture du Dieu, La demeure d'Astérion (L'Aleph, ibid, Folio, 1949) et jusqu'à son dernier ouvrage Le Livre de sable (Folio) où figure There are more things un hommage direct à Lovecraft, qui l'avait inspiré pour L'immortel — variation sur La cité sans nom (in L'Aleph).
Que cet auteur à la fois reconnu comme un des maître de la littérature du XXème siècle, et inclassable, exploite des thèmes relevant de la speculative fiction amène à s'interroger sur cette notion. Est-elle un genre propre, dont la SF instituée (collections, critiques, ghetto, etc. ) serait une sous-espèce ? Que ce soit chez Borges ou dans la SF, le plaisir intellectuel devant le déploiement des possibles, leur jeu de miroir engendrant l'espace d'une fiction et le simulacre d'une virtualité, demeure de nature comparable. Reste que dans les textes de Borges, on ne trouve aucune scorie romanesque : seul demeure le mécanisme envoûtant, hybridant la spéculation la plus paradoxale dans la logique rigoureuse d'un scénario fantasmatique.
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Lecture :
— Sur Borges : Cahiers de l'Herne (1964).
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