Site clair (Changer
 
    Fonds documentaire     Connexion adhérent
 

Philippe Caza

Claude ECKEN

Site de la Convention de Lodève, 1999

          Philippe Cazamayou, alias Caza, est né à Paris en 1941. Très tôt attiré par la bande dessinée, il est également, avec son frère, un grand lecteur de science-fiction. Sa signature apparaît d'ailleurs dès 1968 dans les référendums de la revue Galaxie, où il donne son avis sur le contenu de la revue.
          Depuis bientôt trente ans il partage ses activités entre la bande dessinée, l'illustration de couvertures et, à l'occasion, le film d'animation.
          Sa carrière professionnelle commence dans le milieu de la publicité jusqu'à ce qu'il signe, en 1970, un premier album, Kris Kool, chez Losfeld. Mais c'est l'année suivante qu'il débute dans la BD en réalisant, à partir du n°602 du journal Pilote, une série délirante, Quand Les Costumes avaient des dents (six épisodes de deux ou trois planches), suivie d'une autre sur scénario de Bazzoli, Princesse Glucide.
          A l'époque, Caza se sent à l'aise dans les récits courts. Il n'est pas l'auteur de récits de 44 planches et ne conçoit pas de s'enfermer de façon durable avec un personnage de série. S'il crée un univers, c'est par petites touches, les histoires complètes constituant autant d'approches différentes de celui-ci. L'influence de l'époque est un mélange de pop-art et d'illustrateurs anglais (Beardsley). Virage dangereux, en 1972, où l'auteur se met en scène, annonce sa Chronique de la vie de banlieue, une série fantasmatique sur la ville et ses zones inquiétantes, qui paraîtra à partir de 1975 et sera repris deux ans plus tard en album (Scènes de la vie de banlieue, Accroche-toi au balai, L'hachélème que j'aime). En cela, il est tout à fait dans l'air du temps ou, du moins, en phase avec l'esprit du journal. Le fantastique au quotidien, la banlieue, inspirent de nombreuses BD (pour l'automobile, Les Mange-bitume de Lob et Bielsa), et il n'est pas le seul à se représenter au détour d'une case, (Moebius, Gotlib, ...). L'influence de Gir, et dans une moindre mesure de Druillet, est patente, dans le hachurage des ombres, l'audace de certains plans, aux perspectives inhabituelles.
          1972 est aussi l'année où Caza réalise ses premières illustrations pour les éditions OPTA. Il apparaîtra sur les couvertures de J'ai Lu à partir de 1974, avec Jirel de Joiry de Catherine Moore.
          Kesselring réalise un recueil de textes, dessins et photos dans la série "Fume, c'est du..." en 1975, où il livre ses doutes ou ses opinions sur le monde. Il réalise des couvertures pour le même éditeur, dans la collection S.-F. de Bernard Blanc, « Ici et maintenant », et pour lequel il a déjà réalisé des couvertures de son fanzine, Le Citron hallucinogène.
          Après s'être penché sur ses angoisses urbaines, non sans humour et dans l'ambiance post soixante-huitarde de l'époque, Caza puise son inspiration aux sources d'un onirisme plus positif, non dénué de mysticisme. Les Habitants du crépuscule et Les Remparts de la nuit rassemblent plusieurs récits nés de rêves, éveillés ou non, qui ont un mot, une phrase pour catalyseur. Les lectures avouées sont, entre autres, Wul et Harlan Ellison, mais aussi les contes, les légendes, les mythes, cette mémoire collective de l'humanité. Les Oms, personnages aux traits simplifiés, apparaissent comme des êtres fragiles souvent dépassés par les événements. Caza dessine superbement des femmes aux formes généreuses, dont l'attitude est un rien dominatrice. Les hachures cèdent progressivement la place à la couleur.
          Durant cette décennie, Caza est présent sur tous les fronts : outre ses collaborations à différentes revues (Actuel, Fluide Glacial, La Gueule ouverte) ou fanzines (Falatoff, A comme...), ses illustrations de romans, il poursuit sa carrière BD chez Dargaud, mais aussi aux Humanoïdes Associés, qui réalise en 79 un recueil de ses couvertures.
          Son passage à Métal Hurlant, à partir de 1976, lui donne d'ailleurs l'occasion de dessiner de grandes visions fantasmagoriques, où l'ampleur des décors laisse rêveur. Ses premières pages sont en noir et blanc et révèlent sa maîtrise graphique dans le pointillisme. L'univers, très érotique, décline des thèmes philosophico-mystiques autour de la naissance et du mystère des origines : l'œuf, la femme-mère, la genèse de l'univers se combinent dans une même cosmogonie (Sanguine, Hydrogénèse in Arkhé). Les différentes créatures mythologiques ou fantastiques issues du limon ou des éléments primordiaux se retrouvent bien évidemment dans son œuvre : l'axolotl, le scorpion zodiacal, la salamandre, la mandragore...
          Le même thème est à l'origine d'Arkhé, aux accents bibliques, suivi de Chimères et Lailah. Chez le Caza des années 80, hachurage et pointillisme ont disparu au profit d'un traitement de la couleur directe très abouti. L'homme est toujours considéré à l'échelle de l'univers, sa grandeur se mesure à l'aune des étoiles mais il n'est ni insignifiant ni dérisoire pour autant ; il peut influer sur son destin pour peu qu'il se souvienne de sa place et de ses origines. Mémoires des écumes est justement le titre d'un album réalisé avec Lejalé, coscénariste et photographe des clichés retravaillés par Caza. Ici aussi, l'histoire part du vide de la nuit des temps pour aboutir à la naissance du premier homme, Simon Nandertal. L'histoire de l'humanité est retracée de façon allégorique jusqu'à sa disparition, jusqu'à ce que les vagues en effacent les dernières traces.
          On trouve, dans l'oeuvre de Caza, la démesure et la puissance d'une symphonie wagnérienne. Ce n'est sans doute pas un hasard si Mémoires des écumes est également un spectacle crée et monté à Rennes en 1984, sur une partition de Henri Thorgue, ni s'il participa à la création des décors et des costumes d'une comédie onirique, Mangeront-ils ?, adaptée d'un autre génie de la démesure, Victor Hugo.
          Ses images prennent vie d'une autre manière lors de sa collaboration avec René Laloux : deux premiers courts métrages d'animation sont réalisés, La Prisonnière et Comment Wang-Fo fut sauvé, inspiré d'un conte chinois, avant le long dessin animé qu'est Gandahar, adapté du roman de Jean-Pierre Andrevon.
          La mythologie reste une importante source d'inspiration puisqu'il compose une série en six volumes consacrée au Monde d'Arkadi, basé sur le mythe d'Orphée. C'est le retour à une bande dessinée plus classique, sans couleurs directes. Les images ne sont plus muettes ni imposantes de majesté mais s'inscrivent à nouveau dans une narration dialoguée. Le trait est plus nerveux, plus cassant mais d'une grande lisibilité. Parallèlement, Caza dessine sur scénario de Lemordan, une série de quatre albums, aux éditions Soleil.
          Aujourd'hui, il publie chez Delcourt. Après la réédition de L'âge d'ombre (comprenant notamment Arkhé), paraîtra prochainement Nocturnes, un album indépendant d'Arkadi mais qui a la même univers pour cadre.
          Caza ne manque pas non plus de projets : il travaille sur un projet de dessin animé de science-fiction, Skän, guerrier du soleil, adapté d'un roman de Brussolo, A l'image du dragon, qui sera réalisé par Philippe Leclerc, un assistant de Laloux.
          Par ailleurs, Caza ne se contente plus d'illustrer les romans publiés chez J'ai lu : suite aux amitiés nouées dans le fandom, il signe désormais des couvertures chez Denoël, Encrage, Orion, Fleuve Noir, l'Atalante ou pour des revues comme Galaxies, Bifrost...
          Pour la convention, Caza réalisera une exposition sur le thème de l'Autre. Qu'il en soit ici sincèrement remercié.

Cet article est référencé sur le site dans les sections suivantes :
Biographies, catégorie Bios
retour en haut de page

Dans la nooSFere : 87347 livres, 112225 photos de couvertures, 83782 quatrièmes.
10853 critiques, 47178 intervenant·e·s, 1982 photographies, 3916 adaptations.
 
NooSFere est une encyclopédie et une base de données bibliographique.
Nous ne sommes ni libraire ni éditeur, nous ne vendons pas de livres et ne publions pas de textes. Trouver une librairie !
A propos de l'association  -   Vie privée et cookies/RGPD