Pierre Pelot est né en 1945, dans les Vosges, à
Saint-Maurice sur Moselle, où il vit toujours. Il est, depuis trente ans,
l'un des plus prolifiques auteurs de science-fiction et de littérature
tout court, avec pas moins de 170
ouvrages.
C'est Hergé
qui lui conseillera d'écrire quand, jeune homme, il se destinait à la
peinture et la bande dessinée (il a même tenté de vendre, sans succès, ses
tableaux sur la place du marché). Au vu de ses planches, le créateur de
Tintin lui conseilla de laisser tomber le crayon mais de ne pas lâcher la
plume. C'est ainsi que Pierre Pélot (avec accent)
publie sept western dans la collection « Marabout Junior » et un
recueil de nouvelles dans la collection Bibliothèque Marabout, avant de
lancer son héros Dylan Stark sur la piste de l'aventure. Il n'a que 21 ans
à la sortie de son premier roman et produit déjà à un rythme de plus d'un
titre tous les deux mois (6 en 1966, 9 en 67) ! Le succès est déjà au
rendez-vous puisqu'il obtient un premier prix littéraire pour La
couleur de Dieu, en 1967 (deuxième aventure de Dylan Stark). Dans ce
roman, qui traite du racisme, perce déjà l'auteur révolté de la décennie
suivante.
Marabout ne se portant plus
très bien, il décide de diversifier sa production et écrit alternativement
pour la jeunesse et pour le Fleuve Noir, sous le pseudonyme de
Pierre Suragne.
Pour
la jeunesse, il écrit quelques westerns, puis élargit insensiblement sa
palette (Une autre terre est son premier roman S.-F., en 72) pour
offrir ensuite des romans "sociaux" traitant des problèmes de la société
de l'époque : Le Pain perdu, Le Coeur sous la cendre,
Le mauvais coton, Le ciel fracassé, Je suis la mauvaise
herbe, Les Étoiles ensevelies, ..., parlent de chômage, de
délinquance, d'injustice, de vieillesse et de retraite. Cette fois, les
prix littéraires pleuvent (une dizaine) ! Les titres sont conseillés
dans les sélections pour la jeunesse. Plusieurs d'entre eux sont adaptés à
la télévision. Si le contexte a changé, beaucoup de ces récits restent
d'actualité et il est dommage que les éditeurs estiment qu'ils ne
correspondent plus à la sensibilité des jeunes
d'aujourd'hui!
Au Fleuve Noir,
Suragne est remarqué d'emblée par la critique comme un
écrivain prometteur. La Septième Saison, Mal Iergo le
dernier, La Nef des dieux, Et Puis Les Loups viendront,
Mais Si Les Papillons trichent permettent de le ranger au nombre
des auteurs avec lesquels (et sur lesquels) il faut
compter.
Il se met dans la foulée au
fantastique à partir de 1972 (La Peau de l'orage, Duz, Je
Suis La Brume), aborde le polar en 1974 (Du plomb dans la
neige) tout en fournissant avec une régularité de métronome des romans
de science-fiction et pour la jeunesse. Et en écrivant d'autres romans
refusés par les éditeurs car considérés comme trop
violents.
En 1977, c'est la consécration :
Pelot apparaît simultanément dans toutes les grandes
collections de science-fiction (chez J'ai lu, Laffont, Denoël, Pocket),
avec des titres mémorables comme Les barreaux de l'Eden, Le
Sourire des crabes, Transit, Foetus-Party, Delirium
circus, et rafle trois prix littéraires dans la
foulée.
Une écriture heurtée, saccadée,
parsemée de phrases sans verbe mais parfois entrecoupées de passages plus
lyriques, une narration dynamique, très cinématographique caractérisent
son style. En phase avec son époque, ses récits contestataires,
anarchistes (au sens noble du terme) trouvent un large écho parmi les
lecteurs. Pelot stigmatise les maux de nos sociétés,
refuse de se soumettre à toute autorité quand bien même elle agirait avec
les meilleures intentions du monde. Pelot s'interdit
cependant, en accord avec ses idées anarchistes, à délivrer un message. Il
se contente de s'exprimer, de dire ce qu'il pense. Il se définit lui-même
comme un raconteur d'histoires, et même comme le réceptacle de
celles-ci : les histoires viennent à l'auteur élu, ce n'est pas lui
qui les choisit.
Une nouvelle période
s'ouvre en 1980 avec L'Été en pente douce, popularisé par
l'adaptation cinématographique, qui est celle des romans noirs et des
romans vosgiens. Pelot décrit des êtres simples,
frustres, des idiots, des paumés, des désaxés, gens de la campagne au
destin tragique, récits sombres et désespérés qui, souvent, finissent par
une plongée dans l'horreur. Noires racines, La Nuit sur
terre, Pauvres Z'Héros sont des titres emblématiques. La
révolte, inutile ou dérisoire, débouche sur le désespoir.
En science-fiction, cela se traduit par
le cycle des Hommes sans futur, actuellement réédité en
« Présence du futur », où l'ancienne humanité assiste,
impuissante, à l'émergence de l'espèce qui la supplantera.
Insensiblement, ces romans du quotidien
peignant les humbles poussent Pelot vers la
littérature générale. Elle qui ne sait pas dire Je, Si loin de
Caïn, lui permettent de conquérir un nouveau public qui ignore tout de
lui. C'est ainsi que pour Si loin de Caïn, un critique extasié a
trouvé surprenante la maîtrise de ce premier
roman !
Deux rencontres seront
déterminantes dans l'évolution littéraire de l'auteur, en ce qui concerne
les années 90 ; celle de Christian Rauth, l'un
des mulets de Navarro, qui le pousse à écrire du théâtre (Les
Caïmans sont des gens comme les autres, L'Ange étrange et véritable
vierge Marie Mac-Do, Givre noir, La Ville où les morts
dansent toute la nuit) et celle d'Yves Coppens qui
lui demande de raconter les premiers âges de l'humanité.
Pelot chaîne ainsi la boucle qui relie nos lointains
ancêtres et les descendants des Hommes sans futur. Le rêve de Lucy
étant un succès, il entreprend de retracer la vaste saga préhistorique
avec la caution scientifique du paléontologue. Deux tomes de la tétralogie
Sous le vent du monde sont déjà parus : Celui qui regarde
la montagne au loin et Le nom perdu du
soleil.
Dans le même temps, il s'est
remis à la peinture et expose à Paris et en province.
Ceci explique en partie pourquoi
Pierre Pelot s'est fait plus rare, et plus
particulièrement dans le domaine de la science-fiction. Mais il n'a pas
forcément dit son dernier mot. Après Messager des tempêtes
lointaines, paru chez Denoël en 96 et un recueil de ses nouvelles,
L'assassin de Dieu, à paraître chez Encrage, il compte bien
poursuivre le cycle des Hommes sans futur après la réédition des
premiers volumes.
D'ici le rendez-vous de Lodève, attendez-vous à lire plusieurs ouvrages de sa plume.
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