Une jeune femme émerge des sous-sols dans une ville morte. Il n'y a personne dans les rues et les volets sont clos ou se ferment. Elle sent une vibration qui s'amplifie. Elle se précipite et arrive sur les Champs Elysée où des soldats allemands défilent pour la première fois. La Jeune femme se souvient alors de la nuit du Diable Vert et des circonstances qui l'ont amenée dans cette situation.
Elle s'est réveillée au milieu de la nuit du 13 juin 1940. Son père n'était pas rentré. Elle se rappelle des conciliabules entre ce dernier et Simon et décide d'aller à leur recherche, sous le cimetière du Montparnasse. Dans les souterrains, elle trouve une lampe aux initiales de RC : Raymond Chiavarino, son père. Une trappe dégagée attire son attention. Elle glisse et tombe parmi un ossuaire. Une lumière l'intrigue et elle découvre des amoncellements de crânes et d'os en forme de sculptures. Une ombre la fait fuir. Mais celle-ci la rattrape et lui agrippe la cheville. Un coup de sa lanterne lui donne le temps de s'échapper. Dans sa fuite, elle heurte violemment du front une grosse canalisation et s'assomme.
Ses idées remises en place, elle quitte les Champs Élysée pour se précipiter chez Simon, sûre de les trouver. Sur le palier, la porte de l'appartement a été défoncée, la lumière ne fonctionne plus. Une marmite bouillonne dans la cuisine. Ce qu'elle y découvre la fait dévaler les étages pour... vomir sur le trottoir. Elle pense avoir reconnu...la tête de Simon !
Elle se claquemure chez elle et se souvient... du jour de ses dix ans. Son père l'a emmenée dans les carrières, lui expliquant son travail, citant des anecdotes et l'existence du Diable Vert, une entité crainte par tous les carriers car ceux qui le croisent meurent dans l'année...
Jack Manini a retenu les carrières et autres souterrains de Paris pour décor de sa nouvelle série. Dans cet univers peu connu, labyrinthique, il fait évoluer son héroïne, une jeune fille qu'il malmène quelque peu. En quelques heures, elle perd son père, l'ami de celui-ci. Sa vie se transforme avec l'invasion de Paris et la rencontre d'un garçon entreprenant au caractère entier.
L'auteur joue avec l'attitude qu'un individu peut avoir face à l'accumulation de difficultés, à un destin mouvementé et funeste. Faut-il s'abandonner aux événements avec fatalisme ou faut-il se battre pour tenter de faire changer la situation ? Dans ce premier tome Jack Manini confronte son héroïne à une succession de circonstances qui obligent à des choix.
Le style est alerte et l'histoire, entrecoupée de nombreux flashs back, débouche sur une intrigue tortueuse à souhait. L'auteur manie réalité et fantastique, concret et irréel avec maestria. Ce diable est-il issu de l'imagination des carriers ou existe-t-il par la volonté de quelqu'un ?
Pour construire physiquement leur héroïne, les auteurs s'inspirent d'une jeune fille figurant sur la photo de classe de l'année 1939-1940, du collège technique des Arts Appliqués de Paris.
Michel Chevereau en reprend les traits pour une ressemblance frappante dans les pages relatives à l'adolescence de la jeune fille. Ce dernier signe un dessin réaliste, au style dépouillé mais qui laisse percer l'essentiel. Ses planches sont d'une lisibilité parfaite et le choix graphique des personnages permet une identification immédiate. Ses décors pour les carrières sont remarquables, bien valorisés par la mise en couleurs de Jack Manini.
Le Diable vert ouvre une série plus qu'attrayante qui donne envie d'être déjà en mars 2011 pour la parution du tome 2.
Serge Perraud nooSFere 06/07/2010
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