À Triban, en 450 de l'ère de Troy, les gargouilles, dès la levée de la lune dévorent le marbre des palais. Même la luxueuse habitation de l'Édyle Lasledas en est victime, ce qui met sa fille dans une colère noire.
Du même bateau, débarquent un sage d'Eckmül, consultant en événements étranges, et un barbare qui vient chercher du travail. Si le premier est bien accueilli, le second dispose de vingt-quatre heures pour justifier d'un emploi. Sinon, c'est le réembarquement.
Mais personne ne veut l'embaucher. Résigné à repartir, il veut profiter de sa dernière et unique soirée à Triban. Il entre dans une auberge. Entrainé par la musique d'un orchestre, il fait preuve d'un sens notable du rythme en tapotant sur sa table. Les musiciens le remarquent et lui demandent de jouer avec eux. Une frénésie de danse s'empare des clients et des serveuses. Mais la fête se termine rapidement car les gargouilles arrivent et dévorent le bâtiment.
Informé de l'incident, le sage enquête et comprend que...
S'appuyant sur la trame du conte du Joueur de flute d'Hamelin, Christophe Arleston brosse une histoire guillerette. Il met en scène des vilains gouvernants, des jolies filles, de très jolies demoiselles et un barbare moins primaire qu'il n'en n'a l'air.
La transposition des rats vers les gargouilles est amusante dans la mesure où, contrairement aux rats dont la reproduction est indépendante de l'humanité, les gargouilles sont une création de l'homme. C'est lui qui en assure la multiplication.
Pour ce qui est des personnages, ceux-ci sont à l'image, et à la hauteur, de tous ceux crées par le « scénariste à la centaine d'albums ». Celui-ci introduit dans cette histoire, une galerie étoffée, moquant les puissants et la frivolité de leur descendance. Il se gausse, également, à travers le personnage du mage d'Eckmül, de tous les experts, les spécialistes assis sur leurs propres dogmes, infatués de leur statut. Il cible aussi des agents de l'administration avec quelques traits acérés.
Il laisse une large place à l'humour, tendre pour le barbare, noir pour les dirigeants. Il sème, comme à son habitude, nombre de remarques, réflexions, reflets de notre société
Cette histoire entre dans la série des Légendes de Troy où Christophe Arleston développe, selon son gré, le passé ou le futur du monde qu'il a imaginé dès 1994 pour Lanfeust.
Le graphisme est assuré par Didier Cassegrain. On connaît la qualité de son travail depuis les séries Tao Bang et Code Mc Callum. Il assure, dans cet album, la mise en image de son trait délicat, rehaussé par une large palette de couleurs douces. Il réalise des décors d'une grande beauté et donne une dimension particulière à une troupe de jeunes marquises aux toilettes affriolantes. Il restitue la grâce et la splendeur du corps féminin, jouant parfois avec des angles impossibles pour garder une certaine chasteté.
L'heure de la Gargouille est un album particulièrement réussi par un duo de créateurs au sommet de leur art.
Serge Perraud nooSFere 21/06/2011
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