Libbelule, accompagnée de son jeune frère Moustik et du chevalier Titan, a fui la baronnie de Nuit Safran, contrainte de laisser la place à Aouta, son frère félon.

     Après une journée de vol sur les dragons, les cavaliers veulent dresser le camp pour la nuit. Mais, ils se posent près d'un campement de Trolls qui, sentant de la viande fraiche, les capturent avec leur escorte et commencent un banquet.

     Épuisé par toutes ces émotions, Moustik s'endort et ses cauchemars, une fois encore, déclenchent la matérialisation d'un spectre. Il s'agit de Toizöo, un chef troll décédé, qui veut reprendre sa place. Une bagarre s'ensuit, que les prisonniers mettent à profit pour s'évader.

     À Nuit Safran, illuminé pour faire fuir les fantômes, Aouta négocie la vente du domaine à Roq-Blème, l'ennemi juré. Mais, Albumen, l'oncle revenu sous forme de spectre, ne l'entend pas de cette oreille, alors que Libbelule réfugiée chez Ser Thör, cherche les moyens de reprendre sa place dans la baronnie.
 

     Cette série est issue, en droit fil, de l'univers de Troy que Christophe Arleston décline depuis bientôt vingt ans. Assisté de Mélanÿn, il reprend, dans ce diptyque, nombre des composantes de cet univers, tels les trolls, la magie, des antihéros du plus beau lot, des héroïnes déterminées ... Ils ajoutent une galerie de spectres haute en couleurs, au sens figuré du terme. (Car ils sont blancs dans les vignettes !) Gardant l'esprit qui préside à ce monde, les auteurs concoctent un récit d'aventures échevelées, mêlant actions dynamiques, fantastique et fantaisie.

     Après les fantômes, avec toutes les possibilités offertes par leur statut, l'introduction de Trolls dans ce volet, avec toute la mythologie qui leur est propre, donne aux scénaristes une large gamme de gags, de plaisanteries, de jeux de mots, de calembours, de détournements... Et, ils ne s'en privent pas. Ne s'interdisant aucune modération, ils déclenchent un véritable feu d'artifice d'humour débridé et de rebondissements.

     Cependant, sous ce premier degré, perce une réflexion sur le pouvoir, sur les motivations que ceux qui le prennent avec violence, une violence tant physique que verbale.
 

     Le graphisme a été confié à Éric Hérenguel qui signe, avec le même talent, des planches de fantasy au dessin libre, simple et efficace et des pages d'une élégance rare. C'est cette élégance qui prévaut dans ce diptyque, jusque dans les scènes de bataille, de bagarres. Il dessine des actions de trolls, pour le moins brutales, mais donne à la scène, par la légèreté de son trait, une certaine beauté qui efface l'horreur de la tuerie. Sa mise en couleurs, tout en teintes pastel, est un véritable plaisir visuel.
 

     Nuit Safran, dans le genre choisi, se révèle une minisérie d'une grande qualité scénaristique et d'une remarquable beauté graphique. Un diptyque à mettre dans sa bédéthèque !