Un garçon, fruit de l'amour de Valgar de Valta et d'Astridr, la fille de Thorgerr Argfusson, vient de naître. Mais, leur union n'est pas du goût du chef de clan qui arrive à la tête de ses guerriers. Astridr et la vieille Hild, qui vient de l'accoucher, pressent Valgar de fuir pour trouver refuge dans la caverne d'Ogerth-Le-Sinueux, où personne n'osera le poursuivre. Astridr fait front à son père qui est contraint, par les lois du sang, de garder en vie son petit-fils. Mais, par vengeance, il charge son sorcier d'effacer tous les souvenirs de sa fille.

     Valgar est sauvé par Ogerth qui reconnait la lance de Jahell, En échange, il lui demande de retrouver une entité vêtue d'un manteau rouge.

     Valgar, pour faire valoir sa paternité, veut s'adresser à Njall-Le-Brûlé, le plus sage du Conseil des Anciens. Pour l'approcher, il faut passer par Skarperdinn, son fils, qui l'accueille bien volontiers. Ce dernier est marié à Hildegirrd qui tombe amoureuse du héros, un amour exclusif !
 

     La muse de Jean Dufaux le ramène dans des contrées nordiques, au-delà des lieux déshérités de Complainte des Landes Perdues. C'est la lecture de fresques islandaises qui engendre l'idée, à la fois, de l'organisation d'une saga et du scénario du présent diptyque. L'auteur envisage, pour sa série, une succession de récits plus ou moins longs ayant pour cadre cette contrée nordique avec les modes de vie des habitants, leurs structures sociales, leurs légendes et croyances. Peut-on rapprocher Valta du terme finnois qui signifie pouvoir, régime, règne ?

     Dans ce premier volet, qui s'inspire de l'héroïc-fantasy, Jean Dufaux met en scène, dans ce nouvel univers, un héros au sens légendaire du terme, pris dans un drame shakespearien. Il est déchiré entre deux femmes, entre un amour partagé et un amour subi, avec toutes les conséquences que cela suppose.

     Le scénariste continue, avec ce diptyque, à jouer avec les apparences, thème qu'il développe plus ou moins au fil de ses fresques. Il incite à se méfier des apparences, ne jamais se fier à une première impression, à ce que l'on voit. Il ajoute des sentiments, des émotions, présentent dans toute communauté humaine à savoir : l'ambition, le mensonge, la traitrise et tous les moyens, toutes les armes pour parvenir à ses fins.
 

     Mohamed Aouamri propose une galerie de personnages comme il sait si bien le faire, conforme à ces sagas héroïques aux guerriers musclés, aux héroïnes aux formes rebondies. Il les place dans des décors magnifiques. Il réalise un travail remarquable sur la mise en page, sur les angles de vues, les cadrages et des perspectives intéressantes et innovantes. Il restitue parfaitement l'idée que l'on se fait de ce décor nordique avec ses forêts, ses ombres, ses flous générés par la brume, par la sylve luxuriante. Face au dessin de Mohamed Aouamri, on est confronté à deux sentiments contradictoires et sans doute inconciliables. On a une forte envie d'avoir, entre les mains, la suite de cette histoire, mais on sait, dans notre for intérieur que pour réaliser des planches pareilles, il faut beaucoup de travail et du temps. Donc de la patience !
 

     Ce premier tome est une délicieuse mise-en-bouche qui augure d'une série d'exception par deux créateurs au sommet de leur art.