Pierre Pairault, (la véritable identité de Stefan Wul) imagine un monde où l'homme est traité comme le sont les chats ou les chiens dans notre civilisation. Les Draags, des géants, élèvent des animaux familiers, les Oms. Souvent, c'est pour faire plaisir à leur enfant que les parents en prennent un chez eux. Chaque om porte un collier synchronisé au bracelet électronique de son maître pour l'empêcher de trop s'éloigner.
Terr, diminutif de Terrible, est adopté par Tiwa, une petite fille qui le nomme ainsi pour son caractère affirmé. Il est sur les genoux de sa maîtresse pendant que celle-ci travaille ses leçons. Par son collier, il a accès à ce qu'elle étudie. Terr grandit et apprend la langue des Draags, à lire...
Les parents de Tiwa découvrent qu'il peut parler, qu'il sait réciter les leçons de leur fille. Parce qu'il a peur de ne plus pouvoir apprendre, il s'enfuit emportant le bracelet de sa maîtresse. Dans sa course éperdue, il rencontre Brave qui lui révèle l'existence de communautés oms en liberté, cachées dans un parc. Commence, pour le jeune om, le parcours initiatique d'une nouvelle existence. Il tente de s'intégrer et quand les Draags décident d'une désomisation du parc, ils doivent s'organiser pour se défendre ou mourir.
Avec Oms en série, Stefan Wul propose une fable avec un monde où une autre race est parvenue au sommet de l'échelle. L'Om est resté au rang de l'animal domestiqué. L'auteur s'applique à inverser les schémas qui nous sont familiers. La description de la mère à qui on enlève un petit est d'une vérité criante.
Il exalte la connaissance, l'éducation, car le savoir, c'est la liberté et l'ignorance un moyen d'exploitation. Tous les tyrans étatiques, religieux, ou les deux, le savent bien, qui maintiennent les populations, sur lesquelles ils veulent régner, dans l'impossibilité de s'instruire.
Mais, la dichotomie n'existe pas dans l'œuvre de Wul. Aussi, il ne se borne pas à opposer deux races, il montre comment les Oms peuvent se diviser, organisés en communautés ennemies. Il illustre, également, la passivité, la peur de l'inconnu ou la paresse intellectuelle, en mettant en scène des individus se contentant de leur sort : être bien nourri, soigné. Il justifie que la liberté a un prix. Celle-ci se paie par la responsabilité de son propre destin, par une lutte permanente sans tout attendre des autres.
Le graphisme a été confié à Mike Hawthorne qui, d'un trait élégant compose les décors sobres d'un univers ultramoderne. Il restitue la richesse d'une nature flamboyante. Il met en scène la différence entre les réalisations « humanoïdes » et le foisonnement d'une nature luxuriante. Il crée une galerie de personnages d'une grande beauté, fait ressentir les sentiments, les émotions avec brio. Sa mise en images est particulièrement réussie !
Ce premier volet du diptyque suscite l'engouement. Quel plaisir de retrouver l'œuvre d'un tel créateur, un conte philosophique adapté de belle manière par Jean-David Morvan.
Nota : Concomitamment, parait le tome 1 de Niourk par Olivier Vatine. Piège sur Zarkass, avec Didier Cassegrain au dessin, et La Peur géante sont annoncés. Que du bonheur !
Serge Perraud nooSFere 14/10/2012
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