Si Elric — Le Trône de Rubis n'est pas la première adaptation en bande dessinée de l'empereur albinos, cet album purement franco-français affiche sa différence par une volonté farouche de rester fidèle aux écrits de Michael Moorcock. L'objectif semble atteint puisque avant même le début de l'intrigue, l'auteur d'Elric ne tarit pas d'éloges sur l'œuvre dans une préface dithyrambique et avoue même sa satisfaction d'avoir enfin obtenu une transposition graphique à la hauteur de sa vision cruelle d'un monde décadent, et de la personnalité mélancolique d'un personnage incontournable de la dark fantasy.
Elric — Le Trône de Rubis suit donc la tragédie du premier roman : Elric, empereur de Melniboné, voit son autorité remise en question par son cousin. Cette mise en image du récit de Moorcock est l'occasion d'exposer l'insinué, de mettre en lumière le sous-entendu : autant dire que c'est gore. L'Île aux Dragons est un empire déliquescent pratiquant l'esclavage, et le sort réservé aux serviteurs ou aux prisonniers est digne des films Hellraiser, dont les auteurs reconnaissent s'être inspirés (peut-être aurait-il été pertinent d'avertir le lecteur sur le contenu extrême de la BD, bien que ses lecteurs potentiels soient — a priori — déjà familiers de l'œuvre).
Sur la forme, notons de superbes dessins, associant une parfaite complémentarité entre les artistes assurant les crayonnés, l'encrage et la mise en couleurs. Non seulement fidèle, l'adaptation est également magnifique, parvenant aisément à prendre la relève des pointures ayant déjà œuvré sur Elric (Philippe Druillet, Michael Mignola...). On saluera la présence du carnet d'esquisses en fin d'ouvrage, spécifique à la première édition (n'attendez donc pas qu'elle soit épuisée).
Bref, du bel ouvrage justifiant l'existence d'un projet « casse-gueule », étant donné le nombre d'adaptations d'Elric préexistantes et les noms prestigieux qui leur sont associés.
Florent M. nooSFere 14/09/2013
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