Malienda a un passé déjà riche, car ce monde-archipel est un univers de jeu de rôles créé par Thomas Mosdi dans les années 1980 et développé ultérieurement dans la revue Casus Belli à partir de 1994. Cette ancienneté permet un recul qui devrait profiter à cette adaptation BD, car les auteurs ont eu le temps de peaufiner leur création et d'en apprécier la valeur.
Toutefois, les premières pages inquiètent un peu : après quelques scènes d'action assez molles, le point de départ semble bien maigre : un espion, Mori-Dunnon, est envoyé sur l'île d'Iroise parce qu'il semble s'y passer des choses bizarres, tandis que quelques présages font craindre le retour du Dieu Sombre... « Une fois sur l'île, jugez de l'atmosphère qui y règne » lui demande-t-on. Ce conseil est judicieux, car c'est justement l'atmosphère qui fera le charme de cet album. Manipulé par une mystérieuse jeune femme, le héros va se trouver entraîné dans un jeu de chat et de souris mêlant violence et séduction, sorcellerie et religion, au point qu'on oublie peu à peu les réticences initiales pour s'abandonner à cette ambiance envoûtante et crépusculaire.
De même, le dessin de Bihel qui paraît un peu raide et maladroit au début montre sa valeur à la lecture car il accompagne parfaitement ce récit brumeux et l'errance du héros qui subit plus les événements qu'il ne les domine... une errance intérieure autant que physique. La pâleur des couleurs – les personnages sont livides – et le contraste avec un noir très présent accentuent encore la tension dramatique ainsi que le côté sombre et funeste de l'aventure.
Voici donc un début de série prometteur, grâce à une ambiance de tragédie fantastique nocturne tout à fait bien rendue. Il faudra cependant attendre plusieurs albums pour avoir une opinion sur l'intrigue elle-même.
Pascal Patoz nooSFere 27/05/2001
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