Les immortels du titre sont des anges. Pas forcément immortels d'ailleurs, puisque l'un d'eux a été tué dans l'Antiquité par des hommes en colère. Son tombeau, perdu quelque part en Ethiopie, est recherché par un professeur dont la fille, Rio, a été miraculeusement sauvée d'un accident. Depuis cette date, le père croit fermement à l'existence des êtres célestes que sa fille a entraperçu. Pendant ce temps, au Paradis, les anges s'aiment ou s'ennuient. Certains parcourent la Terre et veillent sur les hommes, ces simples mortels qui mettent une telle énergie à vivre. Mais si les anges existent... alors les démons aussi.
On a pu apprécier la variété d'inspiration de Stephen Desberg dès sa reprise du scénario de Tif et Tondu en 1978 jusqu'à I.R.$ récemment, en passant par Mic Mac Adam, 421, Arkel, l'excellent Gaspard de la nuit, etc. Avec cette nouvelle série, il se montre en pleine possession de son art : la narration est à la fois d'une grande légèreté et remarquablement efficace. Elle demeure parfaitement fluide alors que s'enchaînent de courtes scènes se déroulant à des époques différentes et en des lieux très divers, réels ou imaginaires. Jamais ces sauts dans l'espace ou dans le temps n'entraînent d'incohérence et les nombreuses ruptures de rythme ne provoquent aucune gêne à la lecture, bien au contraire. De plus, Desberg parvient à éviter les pièges de la mièvrerie ou du grotesque, qui guettent souvent ces histoires d'anges gardiens. Son récit, équilibré et sensible, mêle habilement l'aventure à la balade romantique d'un ange au coeur sensible, naviguant avec justesse entre Indiana Jones et Les ailes du désir.
Cette équilibre est également respecté par le dessin de Reculé qui trouve un parfait compromis entre l'émotion et l'action, entre le réalisme des personnages contemporains et l'onirisme des apparitions angéliques, entre l'aspect factice d'un paradis superficiel et les rougeoyantes ténèbres de l'enfer... Si les couleurs directes, très vives, peuvent initialement surprendre, voire même déranger, elles séduisent rapidement car Reculé en joue pour accroître l'intensité du récit.
Le tombeau de l'ange est donc une réussite à découvrir. Un bel album fantastique, à la fois intéressant et attachant.
Pascal Patoz nooSFere 27/05/2001
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