John Remington, un écrivain américain brutal, grossier et alcoolique, auteur de « trucs pire que Joyce et Hemingway » disparaît au cours d'un safari au Kenya en 1947. Les membres de l'expédition avaient aperçu un monstre tout droit sorti de la préhistoire juste avant de s'évanouir dans la nature. Peu de temps après, une jolie jeune femme, miss Austin, vient prendre un poste d'enseignante à Mombasa. En réalité, elle doit enquêter sur des « phénomènes » dont nous ignorons la nature. Par qui est-elle employée ? Et ses deux collègues empressés ne sont-ils pas eux aussi des espions, à la solde l'un du KGB, l'autre des français ? Rapidement, la jeune femme assiste à une scène incroyable : un Diatryma Steini – une sorte d'autruche disparue depuis quelque 50 millions d'années – se fait calciner sous ses yeux par le rayon d'une soucoupe volante !
Le Monde perdu revisité par X-files, dans un contexte proche des Chasses en Afrique d'Hemingway et une atmosphère de guerre froide à la Casablanca... Un tel mélange pourrait être insupportable, mais, pour l'instant, Rodolphe et Leo parviennent sans mal à captiver le lecteur. Le scénario n'est pourtant pas extrêmement original : la découverte d'une région où survivent des animaux préhistoriques ou un premier contact extraterrestre sont des thèmes conventionnels en SF. De plus, on n'échappe pas vraiment à certains clichés, en particulier dans la présentation de personnages assez stéréotypés. Mais la grande réussite de l'album, c'est son ambiance générale, immédiatement envoûtante. Cette réussite est en grande partie due au dessin de Léo qui permet d'obtenir à la fois une forte sensation de réalisme et une impression d'intimité avec les personnages. Ces qualités, qui ont déjà largement contribué au succès des Mondes d'Aldébaran, n'empêchent pas pour autant de ressentir la magie des grands espaces africains, rehaussés par les couleurs chaudes et lumineuses de Scarlett Smulkowski, ou celle des animaux sauvages.
Les « clichés » sont donc finalement plus un artifice permettant au lecteur d'entrer de plain-pied dans un décor connu, avant d'insérer des éléments science-fictifs qui vont modifier les perspectives, ou parfois des faits seulement intrigants, extravagants ou dérisoires. A titre d'exemple, signalons ce splendide palais italien bâti en plein désert, pourvue d'une salle de bain monumentale, où l'eau n'a hélas jamais pu couler... Où cette histoire va-t-elle mener ? Il est encore trop tôt pour le dire, mais ce premier album est déjà séduisant et très prometteur.
Pascal Patoz nooSFere 02/01/2002
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