Sir Pyle continue de raconter ses mémoires à Spectre, son serviteur fantôme. Des histoires toujours plus incroyables — probablement très embellies voire inventées de toutes pièces par cet incorrigible vantard. Au menu cette fois, un court survol et recyclage des aventures précédentes par un Sir Pyle dépressif et fatigué (Rien ne se perd), une excellente version très revisitée de l'histoire d'Orphée où Sir Pyle « remplace cette fiotte d'Orphée qui n'a pas les balloches de venir récupérer sa nymphette tout seul » (Eurydice de der), une histoire-gag en trois planches d'intérêt mineur (Les Fées diverses), une variante sans surprise de la mort qui attend à Samarcande, déplacée à Tombouctou (A moitié dans la tombe... ou tout !), une délirante prise d'otages télévisuelle où Kasimor, l'ancien « monstre gentil » orange de « L'îlot gamin », séquestre les « télétubbeiz » (L'île aux otages) et enfin la véritable histoire d'Athos, telle que narrée par Sir Pyle à Alexandre Dumas avant que celui-ci ne l'affadisse (L'étroit mousquetaire).
Le don d'ubiquité de l'immortel « mythecin » permet au scénariste de revisiter au gré de sa fantaisie aussi bien l'Histoire que les légendes ou même les intrigues romanesques. C'est dire si cela autorise une infinie variété de récits, dans les décors les plus divers. Sir Pyle s'y montre un « héros » égocentrique, vaniteux, prétentieux, vénal, cynique, jaloux... bref, très humain ! C'est par exemple par pure jalousie qu'il s'arrange pour qu'Eurydice ne puisse sortir des enfers, car il supporte mal que la belle lui préfère « l'éphèbe-minet » Orphée. En effet, doté d'un éternel corps d'adolescent, Sir Pyle a bien du mal à séduire les femmes que son âge avancé — plus de trois mille ans quand même — lui permet pourtant de courtiser.
Le style est familier, le vocabulaire parfois argotique, les allusions sexuelles fréquentes, mais le tout échappe cependant à la vulgarité, ce qui destine vraiment cette série à tous les âges. Même si certains récits sont un peu « faciles », on se laisse d'autant plus aisément séduire par ces histoires enjouées et extravagantes qu'elles fourmillent de détails, de clins d'oeil astucieux, de trouvailles rigolotes, de jeux de mots approximatifs, de personnages pittoresques... et que l'exceptionnelle vitalité du trait de Munuera — et désormais de celui de Ruben qui a dessiné plusieurs des histoires de cet album dans une parfaite continuité graphique — leur donne un piment savoureux. Un simple divertissement, mais de qualité.
Pascal Patoz nooSFere 06/09/2003
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