Comme le titre l'indique, voici l'histoire d'un village qui rétrécit, de fermes qui se rapprochent, de voisins irascibles qui se retrouvent quasiment les uns chez les autres... Notons que ce sont bien le village et les terres qui s'amenuisent, pas les villageois — au contraire des Petits hommes. L'argument de départ tout comme l'explication du phénomène pourrait rappeler les Légendes d'aujourd'hui de Christin et Bilal, des allégories fantastiques permettant de croquer les travers de l'humanité et s'achevant par des charges écologiques et anti-militaristes, avec le parfum de la SF militante des années 1970. Cela pourrait aussi rappeler les inquiétantes maladies qui atteignent parfois les Cités obscures, comme La Fièvre d'Urbicande.
Hélas, nous ne jouons pas ici dans la même catégorie et si le projet de Corbeyran est de prime abord sympathique, la réalisation est loin d'en être convaincante. Au lieu d'une satire au vitriol, on tombe en effet dans la grosse farce paysanne un peu balourde, avec des personnages si caricaturaux qu'aucun lecteur ne pourra se retrouver ni même retrouver son voisin dans leurs défauts ou dans leurs mesquineries. La paysan alcoolique, la touriste en chaleur, le châtelain excentrique, le fada jargonnant, tous les portraits sont ici pur stéréotypes sans profondeur. Par ailleurs, l'intrigue est plutôt mal fichue. Après de forts longues querelles de voisinage, exagérément développées, tout est beaucoup trop rapide, que ce soit le rétrécissement du village — qui s'accélère brutalement de la page 43 à la page 47 comme si Corbeyran s'était soudainement aperçu que l'album touchait à sa fin — ou le retour à la normale. Cette rapidité empêche l'installation d'un vrai malaise, d'une tension dramatique, d'autant plus que le récit est parasité par de nombreuses anecdotes sans aucun rapport avec la trame principale. Par exemple, les auteurs ont cru bon d'ajouter une improbable histoire de mort-vivant qui écarte encore un peu plus le lecteur du sujet initial et qui vient comme un cheveu sur la soupe aux choux. Enfin, ce n'est certainement pas le dénouement totalement invraisemblable qui sauvera cette piètre comédie, où le grotesque ne semble pas suffisamment volontaire pour qu'il devienne une qualité.
Bref, n'est pas Marcel Aymé qui veut, à moins que Corbeyran n'ait bâclé ce scénario. Dommage, car le dessin de Balez réussit quant à lui à apporter une certaine authenticité à cette campagne déstructurée.
Pascal Patoz nooSFere 01/03/2004
50 ans après la chute d'une météorite, le village de Saint-Pol-en-Avoinie se met à rétrécir : les fermes se rapprochent, les champs se réduisent, provoquant des querelles entre les villageois, faisant remonter à la surface de vieux fantômes. Ajoutez une touriste libidineuse et un marquis à la recherche d'un trésor familial... Ce volume unique présente une galerie de personnages truculents et l'événement fantastique fait du petit village un microcosme où s'exacerbent petites et grandes turpitudes humaines. A savourer. (note : Ahouaip ! trèbueno...)
Philippe Heurtel Bifrost n°35 01/07/2004 Mise en ligne le 01/09/2005
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