« Alain Paris semble avoir tout compris des 'ficelles' d'une certaine fantasy commerciale à l'américaine, et les applique pour la seconde fois, en un parcours sans faute. L'originalité ne sera pas au rendez-vous, vraiment pas, mais le simple plaisir de la lecture sera lui bel et bien présent, si vous aimez la littérature populaire. » (A.-F. Ruaud, Fiction n°386, 1987 / critique intégrale)
Cette critique de la trilogie romanesque ( Les Chroniques d'Antarcie) d'où est issue cette nouvelle série en pointait déjà le principal défaut : un manque total d'originalité. Jugez-en : la concubine d'un roi est assassinée par la reine légitime, mais son nouveau-né est sauvé in extremis par un homme mystérieux qui éduquera l'enfant. La méchante reine, qui désire placer son propre fils sur le trône, n'hésitera pas à déclencher une guerre pour tuer ce rejeton indésirable — comme si lui envoyer un assassin un peu dégourdi ne suffirait pas. Mais pas de chance, on peut parier qu'elle n'arrivera pas à s'en débarrasser... Voilà. Rien de plus. Une intrigue des plus rebattues et des plus simplistes, qui passait apparemment en roman grâce au talent de l'écrivain — si j'en crois les critiques plutôt positives parues dans Fiction — mais qui, ici réduit à sa plus simple expression, dévoile sa vacuité affligeante. Ruaud ajoutait en effet que la société imaginée par l'auteur avait une crédibilité inhabituelle. Malheureusement, rien n'en subsiste dans ce premier album. Le fait de situer l'histoire dans l'Antarctique, avant que ce continent ne soit recouvert par les glaces, n'a aucun intérêt réel : elle pourrait tout autant se dérouler sur une autre planète ou en un lieu hors du temps. Le royaume d'Antarcie ne se distingue absolument pas de millions d'autres sociétés pseudo-médiévales, et aucun détail susceptible d'éveiller la curiosité ne figure ici.
De plus, la narration est molle, sans relief, comme si Alain Paris — qui a pourtant une bibliographie romanesque déjà imposante — ne maîtrisait pas encore le rythme propre à la bande dessinée. Le dessin, quant à lui, s'avère prometteur mais encore très inégal. Si les personnages ont indéniablement une présence, les décors n'impressionnent guère, et certaines planches paraissent même expédiées, comme par exemple la scène de la bataille (page 36).
Bref, un album peu convaincant, sui ne donne même pas envie de lire la suite pour lui donner une seconde chance.
Pascal Patoz nooSFere 07/09/2005
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