En ce temps-là...

     Les premiers miasmes de l'Apocalypse s'exhalaient à l'approche de l'an Mil.

     Les vaisseaux métalliques des Sylphes hantaient les cieux sous l'oeil du Diable qui dépêchait, chaque jour plus nombreuses, ses créatures sur Terre.

     La mort, la peur et la damnation étaient les plus fidèles compagnes des hommes dans un monde désormais gouverné par les forces de l'Au-Delà.

     Et moi, Raedwald le saxon, trafiquant de reliques dont on disait l'esprit aussi aiguisé que le poignard, j'avais décidé de barrer la route au chaos.

     Un curieux phénomène atmosphérique — un sombre brouillard traversé par des lumières spectrales surnommées « l'haleine du diable » — transporte le bateau où se trouvent Raedwald le saxon, Arnulf et Rowena sur les côtes norvégiennes. Recueillis par des vikings après avoir affronté un redoutable kraken, ils retrouvent la trace du vaisseau extraterrestre qui a emmené le changelin Thanner. Celui-ci est sur le point d'être sacrifié par une tribu de cannibales qui vit au pays des trolls...

     Avec ce voyage en pays viking, la série Millénaire change un peu d'ambiance, mais le subtil mélange du récit historique, de la fantasy et de la science-fiction demeure remarquablement équilibré. Si cet épisode se centre sur un conflit entre deux chefs vikings, se poursuite en parallèle la découverte des mystères de cet univers où se côtoient religions, créatures fantastiques et technologies avancées d'origine extraterrestre.

     Richard D. Nolane entremêle ces divers fils narratifs avec habileté. Sa peinture d'une société viking est tout à fait crédible. Le combat des chefs débouche sur un meurtre et la mise en accusation d'un innocent que Raedwald devra disculper à la suite d'un examen digne d'un médecin légiste. Kraken et trolls permettent quelques scènes d'action ordinaires mais rythmant agréablement le récit. Enfin, on approche sans tout à fait les voir ces fameux « Sylphes » extraterrestres — que l'on imagine proches parents de la créature de Roswell — avec un sens du suspens qui nous rappelle les meilleurs X-files.

     Sur cette intrigue dense, le dessin de Miville-Deschênes fait merveille. Son réalisme renforce la crédibilité du contexte historique mais aussi celle des éléments fantastiques. La puissance des scènes d'action est amplifiée par une atmosphère générale plutôt intimiste, avec une belle utilisation des clairs-obscurs et des ambiances nocturnes ou glacées.

     Bref, un troisième tome au niveau des deux premiers.