Alice amène son jeune frère Polo dans la grande ville, car ce dernier se transforme peu à peu en loup-garou. Ils rejoignent leur grand frère Caleb, un poète raté, dans les bas quartiers où vivent divers monstres hybrides, hommes-poissons, hommes-pieuvres, hommes-chats... Cependant, une campagne électorale déchire la ville. D'un côté, le gouverneur Brown, progressiste, refuse officiellement toute discrimination mais ne voit dans les hybrides qu'une main d'oeuvre bon marché. De l'autre, le candidat Kramer, du Parti Consolidateur, qui tient un discours haineux et sécuritaire, prônant l'extinction des hybrides. Kramer reçoit le soutien du répugnant Trimarkos, au corps rongé par une étrange maladie. Car Trimarkos a mis au point une méthode pour créer des zombies qui pourraient remplacer avantageusement les hybrides dans les mines et les usines...
Ville cauchemardesque et fracture sociale, créatures chimériques et purification raciale, morts-vivants et lutte des classes, Massimo Semerano réussit une habile allégorie politique, certes assez simple — voire poussée vers la caricature — mais en fait parfaitement efficace grâce à cette mise en scène horrifique. Au milieu de cet enfer urbain d'allure steampunk — ambiance XIXe siècle, flics aux masques rétro-futuristes, science délirante et savant fou — , Alice, Polo et même Caleb se révèlent rapidement attachants, sans que le caractère volontairement grotesque des méchants — Trimarkos ressemble à une momie mal ficelée, et n'hésite pas à porter cape et chapeau à plume — nuise à cette émotion.
Il faut dire que le dessin de Marco Nizzoli — également dessinateur de l'excellente série du Jour des magiciens — colle parfaitement à cette histoire oscillant entre mélodrame, cauchemar grotesque et fable politique.
Au total, une excellente nouvelle série, qui témoigne de la vigueur actuelle des italiens dans la bande dessinée.
Pascal Patoz nooSFere 01/05/2006
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