Serge Lehman nous avait passionné, dans les années 90, avec des romans et des nouvelles de SF fabuleux, des récits de fantastique de haut niveau. Puis, la part de l’édition de SF s’étant encore rétrécie pour les auteurs francophones, il avait disparu des rayons des librairies et fait profiter d’autres supports de média de son talent.
Récemment, il a collaboré à l’écriture de scénarii avec Bilal et Druillet. Il propose ici son premier scénario de BD en solo.
Derec Finn arrive à l’Intersection 55. Il vient prendre, pour la première fois, ses activités de fonctionneurs. Il est accueilli par Rhéa, une autre fonctionneur qui se remémore, en le voyant, sa première mission …il y a deux ans. Elle lui offre le verre de l’amitié, un thé noir de Mars, mais fait rarissime, du verre de Derec, surgit une vigne pathophile qui l’agresse. L’ordre impeccable de l’Intersection est de plus en plus perturbé. Le tuteur qui devait encadrer Derec pour ses premières missions est absent et reste introuvable. Quelques instants avant l’arrivée du nouveau fonctionneur, un dragon de papier, soutenu par des ballons, a surgi de nulle part pour lâcher des tracts au contenu sibyllin. Et ce n’est pas la première fois ! La sécurité et la police sont sur les dents, mais la vie et l’activité de la station continue…
Serge Lehman puise son histoire dans les meilleures veines d’intrigue des space opera et joue avec la diversité que ce genre peut générer. Il nous invite à entrer dans un univers de haute technologie où chacun est sa place, connaît les tâches qu’il a accomplir, où tout semble maîtrisé. Il nous fait découvrir le réseau des portes spatiales qui permet de passer d’un système solaire à l’autre. Il introduit des personnages aux caractères étonnants comme Diane, la Sentinelle étoilée, Jarvil, l’homme-fourmi, Xtalassar, l’armurier… Peu à peu, il nous dévoile l’envers du décor, la réalité de la situation, l’organisation théocratique de la société. Il reprend la réalité terrestre et lui donne des extensions peu communes. Ainsi, il permet à Jarvil, le représentant d’une société de fourmis où l’individualité n’existe pas, de pouvoir dire « je » pour la première fois.
Si tout le début de l’album est en bicolore, avec une dominante de gris-vert, à l’image de ces communautés où s’impose la technologie, de ces dictatures politiques ou théocratiques, où règne l’atmosphère pesante des carences de liberté. L’introduction de la couleur concorde avec le début d’une prise de conscience, de la révolte contre les mensonges qui structurent l’ordre établi. La propagation de cette vague colorée est du plus bel effet.
Jean-Marie Michaud a toujours baigné dans le dessin. Il réalise une mise en images attrayante, des décors superbes et des perspectives impressionnantes. Un dessin minutieux, des pages fourmillant de détails et un traitement astucieux de la couleur font de ce premier tome un album qui fait plus que retenir l’attention, il génère l’enthousiasme ! Jean-Marie Michaud est un créateur d’univers graphiques avec qui il faudra compter dans la prochaine décennie.
La Saison de la Coulœuvre, album indispensable à toute bédéthèque, laisse augurer d’une série d’exception, chez un éditeur qui, il est vrai, a toujours cherché à promouvoir le talent.
Serge Perraud
nooSFere
07/10/2007
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