Un romancier peut-il entrer « en transes » et écrire sur des événements encore inconnus ? Ses fictions peuvent-elles être le récit de la réalité ? C’est sur ce thème qu’Alexis Robin base le scénario du premier tome de Borderline. Le scénariste mêle les difficultés de l’écriture à une intrigue sur fond de paranormal autour de Fernando. Celui-ci a commis un premier roman, publié il y a plus de deux ans. Depuis il cherche l’inspiration pour un second. Il traîne son spleen entre ses amis et Wanda, une prostituée dont il n’a jamais usé des charmes, qui lui sert de « psy ». La situation s’enlise jusqu’au jour où, chez un copain qui vient de rentrer du Chili, il fume quelques herbes utilisées par les indiens. À son réveil, il découvre qu’il a rempli une multitude de feuillets écrits de sa main, dispersés dans son appartement. Il ne conserve, cependant, aucun souvenir de sa soirée, ni de sa nuit passée à jeter fiévreusement les mots sur le papier. Les ayant rassemblés, il découvre un début d’histoire réaliste, sombre, mais de très bonne tenue littéraire, le prélude d’un bon livre. Mais il n’est pas au bout de ses surprises …bonnes et mauvaises !
Nathalie Berr met en images ce thriller fantastique, avec soin et pertinence. Elle restitue le climat qui entoure le héros, d’abord dans sa dérive, puis dans les péripéties où l’entraînent ses écrits. Est-ce parce que cette histoire est construite comme celle d’un film d’action qu’elle donne, à Fernando, les traits de Jean Reno ? Elle signe, avec un trait énergique, un travail graphique de qualité. On retrouve, affinées, approfondies, les qualités dont elle avait fait preuve pour la remarquable série La Maison- Dieu, (Albin-Michel/Vent des Savanes) cinq albums scénarisés par Rodolphe.
Alexis Robin qui s’est fait connaître avec Nathaniel (Bamboo) ou Si j’ai bonne mémoire (Les Humanos) propose, avec ce diptyque, un récit peu commun dans ses développements. S’il prend comme point de départ les affres des romanciers, il nourrit son intrigue avec des thèmes à l’actualité brûlante : enlèvements, séquestrations, tortures mentales et physiques…
Une histoire habilement structurée, des personnages attachants, un graphisme et une mise en couleurs attrayants, il n’en faut pas plus pour avoir un album que l’on découvre avec plaisir.
Serge Perraud nooSFere 20/04/2008
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