Circulant entre les planètes à des vitesses « supra-lumineuses », les hommes observent toujours, lors de la réintégration dans l'espace-temps ordinaire, une forme colossale et vague ressemblant à un 9 de pique. Un couple d'astronautes, fraîchement épris l'un de l'autre, est expédié aux limites de la Galaxie pour des essais de vol intergalactique. Obsédés par le problème du 9 de pique et aiguillés par certaines allusions ésotéri-ques proférées par un Tibétain, ils finissent par conclure à une « conscience » de la Galaxie, considérée comme un colossal être vivant. Cet être fabuleux existe-t-il vraiment ? Les explorateurs amoureux ne sont-ils pas victimes de quelque magie ? ou de quelque supercherie ? Le 9 de pique le leur dira...
Il s'agit d'un roman tout à fait remarquable et injustement oublié par les éditeurs de science-fiction.
François Guérif, rédacteur en chef de la sympathique revue Polar, présente ainsi le roman d'Amila qui date de 1956 : « C'est l'originalité et le formidable humour de l'idée de base alliés à la simplicité d'un style populaire qui font que Le 9 de pique est une œuvre unique qui garde encore aujourd'hui tout son impact ». Comme on aimerait souscrire à cette généreuse évaluation ! Hélas, il m'a semblé que ces qualités étaient les principaux défauts du livre. L'écriture est lourde et sans finesse, si bien que le style « populiste à la française », qui pourrait être plein de charme désuet, n'est qu'irritant et ringard. Les personnages sont stéréotypés, les situations convenues et prévisibles. La fantaisie est étriquée, inversement proportionnelle à l'énormité du canular qui sert d'argument au livre. Le tout peut faire penser à du Boris Vian dégradé et ce « roman bâclé en trois semaines » (dixit l'auteur) ne méritait pas d'être repêché dans le catalogue du Rayon Fantastique, sinon à titre de curiosité perverse. Il est certes rassurant de voir que le développement actuel de la SF française conduit celle-ci à chercher à se constituer un passé. Mais, à mon sens, c'est une erreur d'exhumer pour ce faire d'imbuvables vieilleries, qui collent une bonne nausée au présent et sabotent l'avenir !
Spécialisé jusqu'ici dans le « noir », John Amila publie chez Gallimard (« Rayon Fantastique ») son premier A.S., « Le 9 de pique », qui, malgré une chute antichute finale probablement unique dans les annales du genre (tout l'esprit du roman se trouve, en quelques lignes, modifié, bouleversé, anéanti), mérite votre attention. Voici, d'ailleurs, ses grandes lignes, que j'extrais de la « Prière d'insérer » : « Circulant entre les planètes à des vitesses supra-lumineuses, les hommes observent toujours, lors de la « réintégration » dans l'espace-temps ordinaire, une forme colossale et vague ressemblant à un neuf de pique. Un couple d'astronautes, fraîchement épris l'un de l'autre, est expédié aux limites de la Galaxie, pour des essais de vol intergalactique. Obsédés par le problème du neuf de pique, ils finissent par conclure à une « conscience » de la Galaxie, considérée comme un colossal être vivant. Cet être fabuleux existe-t-il vraiment ? » On devine la façon dont l'auteur a pu exploiter son sujet ; et il faut convenir que, pour ses débuts dans l'A.S., Amila a fait aussi bien qu'un vétéran chevronné du genre, dosant à parts égales le côté « space-opera » et le côté philosophique. Mais que dire de sa fin, que je ne puis vous révéler, et qui, bien que drôle et inattendue, démolit le reste ? On se demande si on doit en rire ou se fâcher.
Igor B. MASLOWSKI Première parution : 1/5/1957 Fiction 42 Mise en ligne le : 15/9/2025