Quatrième de couverture
Ce livre était la seule œuvre de Borges encore à peu près inconnue en Europe : peut-être parce que, venant d'un écrivain polyglotte d'origine hispano-anglo-portugaise et devenu auteur universel, ce livre était trop argentin ? Ce n'est pas un livre sur l'Argentine. Ni même sur Buenos Aires. Mais sur le Palermo natal de Borges, banlieue perdue de Buenos Aires. Le héros de ce quartier tristement art nouveau est un poète populaire, poète des fleurs, des coups de couteau, des filles qui meurent tuberculeuses, des gouapes et Jules célèbres, monde du tango où quelque chose de sicilien vient s'intégrer, et pour toujours, à la mythologie de Buenos Aires : Evaristo Carriego, dont on peut trouver les vers sublimes ou ridicules selon les époques et les exégètes. Mais s'il s'agit bien là d'un livre folklorique au sens propre du mot, chez Borges, tout va plus loin que ses fins : Carriego est aussi une nouvelle invention de Borges, c'est le poète tel qu'en lui-même Borges le change. Tout ce à quoi touche Borges devient du Borges : en citant les mots de Carriego, Borges les fait siens et se transforme en un masque de lui-même, le plus humain : peut-être, pour ses œuvres et personnages connus depuis, celui de leur Borges natal.
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