G. MASTERTON — J.M. LIGNY — A. LE BUSSY — R. McCAMMON

     J.P. April, J.M. Blatrier, C. Corthouts, A. Delbe, A. Duguel, M. Lamart, D. Walther, K.J. Anderson, E. Lee, E. Massie, P.J. McAuley, W.F. Nolan, B. Stableford, F.P. Wilson

 

     Forces Obscures : un voyage vers l'inconnu, vers le rêve, vers le cauchemar.

 

     Forces Obscures : des écrivains de premier ordre, des talents reconnus ou totalement nouveaux.

 

     Forces Obscures : de la science-fiction, du fantastique, de la fantasy.

 

     Forces Obscures : une anthologie qui réunit les genres, qui brise les barrières.

     «Forces Obscures » est plus qu'un titre d'anthologie. C'est le nom de la nouvelle collection que lance Marc Bailly aux éditions Naturellement. Dès sa préface, le rédacteur en chef de Phénix annonce la couleur : « Brisons les barrières » déclare-t-il, celles qui existent entre les genres, celles qui tendent aussi à séparer les productions anglo-saxonnes des autres. L'intention est louable et elle a le mérite de mettre le pied dans le plat d'un milieu gangrené par les luttes de chapelle chères aux tenants du fantastique ou de la SF purs et durs. Elle prolonge surtout l'orientation prônée par les écrivains eux-mêmes. De plus en plus, ils œuvrent en passeurs des frontières de l'imaginaire, encouragent l'exploration des contrées mêlées de la fantasy — au sens le plus large, loin de toute récupération de la part des sectaires en mal de délimitations forcenées. Forces Obscures s'engage ainsi dans la voie tracée par le travail éditorial d'un Gilles Dumay (Étoiles vives), par ceux tout aussi remarquables de Marion Mazauric (avec Millénaires chez J'ai Lu) et de Jacques Chambon qui, après Présences chez Denoël, vient porter la bonne parole chez Flammarion (avec Imagine).

     Le recueil de dix-huit nouvelles réussit en grande partie son pari. Nous faire voyager, au gré des fictions, du fantastique (celui poétique de L'avaleuse d'oiseaux de Jean-Pierre April) à la SF (spéculative, L'aube des bâtisseurs de Daniel Walther et Ciel d'Alain Le Bussy, ou dans la veine des pulps et de la Quatrième Dimension, Futures parties de Paul J. McAuley et Le ranch au cœur du temps de Kevin J. Anderson), de la terreur intimiste (Le bourreau des cœurs, texte déchirant de Brian Stableford) à l'horreur tonitruante (Poudre aux yeux de McCammon anticipe les débordements de Soif de sang), du bad taste dénonciateur (Foet de F. Paul Wilson, Ce bon vieux rock and roll de Élisabeth Massié, l'éprouvant texte d'Edward Lee sur la pédophilie qui gêne par sa complaisance tendancieuse dans le sordide) à l'adaptation moderne et inquiétante de fictions primitives (remarquables Belinda de Graham Masterton et Que me restera-t-il quand je m'éveillerai ? d'Anne Duguël).

     En revanche, on est moins convaincu par le choix de textes qui, écrits entre 1980 et 1999, fait paraître certains d'entre eux un peu datés. De même, les récits de Michel Lamart (Le Cas Karl, un texte sans âme et jargonnant) et de Christophe Corthouts (La Marche ou l'histoire ratée d'un escalier bien trop prévisible) ne soutiennent pas la comparaison avec les textes de Jean-Marc Ligny (Mamy voit des ovnis) et de Jean-Michel Blatrier (Imago), dont la maîtrise est au service d'une authentique profondeur imaginaire et humaine.

     Reste que Forces obscures est un recueil varié, animé par une profession de foi qui célèbre l'hétéroclite (trop ?). Irrintzina de Philippe Ward — un texte fantastique sur fond d'attentats en Pays Basque — et Duplex d'Alain Dartevelle — satire politique tout autant que roman du double et de SF — confirment déjà le parti-pris généreux, audacieux et ouvert de la collection. A suivre.