Jane Yellowrock est une porteuse de peau, un être qui a la faculté de changer de forme. Depuis des années, elle gagne sa vie en faisant payer le prix du sang à des vampires. Toutefois, elle a récemment été engagée par le Conseil des vampires de la Nouvelle-Orléans, par ces mêmes créatures qu’elle avait l’habitude de chasser...

     Et ça chauffe à la Nouvelle-Orléans. Les garous ont révélé leur existence au monde, et ont ravivé les tensions de longue date qui les opposent à leurs vieux ennemis : les vampires. En tant qu’employée de confiance de Léo Pellissier, le maître de sang de la ville, Jane se retrouve prise entre deux feux.

     Lorsqu’elle est attaquée par une meute de loups-garous en maraude, Jane est reconnaissante de recevoir l’aide d’un étranger mystérieux, répondant au nom de Girrard. Il lui explique alors qu’il a été la « Lame de Miséricorde » de Léo, une fonction sacrée qui lui donnait la charge de tuer les vampires devenus fous. Ce que Jane ignore est la raison pour laquelle le puissant assassin a quitté la ville et, plus troublant encore, la cause de son retour. Et ce n’est définitivement pas pour rendre la vie de Jane plus facile...

     Nouvelle plongée dans l'univers de Jane Yellowrock avec la parution de La lame de miséricorde, troisième tome du cycle. Prenant un repos bien mérité, la jeune femme a amené Rick Lafleur, son nouveau petit ami, dans les Appalaches afin de déménager les affaires de son studio vers sa résidence en Louisiane. La pause est de courte durée : les félins-garous mettent en scène leur coming out en direct à la télévision. Rappelée en urgence à La Nouvelle-Orléans pour organiser la sécurité des négociations entre les différentes factions surnaturelles, Jane affronte alors une meute de loups-garous — de vieux ennemis de son actuel patron, Léo Pellissier — et rencontre un être surprenant se disant ancienne Lame de miséricorde du maître de la ville. La situation dérape, et la voilà chargée de résoudre le meurtre d'un membre éminent de la délégation des félins.

     Alors que la mythologie de la création des vampires a été approfondie dans le tome précédent, l'auteur ouvre de nouvelles perspectives en introduisant les garous, une espèce totalement absente depuis le début du cycle. Comme pour nos amis suceurs de sang, Faith Hunter expose sa propre idée quant à l'apparition de ces êtres. Les informations sont originales, fournies et surtout détaillées. C'est passionnant, d'autant que cette naissance ne s'est pas produite sans heurts pour l'espèce des loups-garous. Avec le statut de porteuse de peau de notre héroïne, on ne peut s'empêcher de chercher quelques indices dans les mythes de ce peuple. Quels liens peut-il y avoir entre les garous qui possèdent la faculté de se changer en un animal particulier et Jane qui, à l'aide d'un fétiche, se transforme en n'importe quelle bête ?

     Nouvelle faction à prendre en considération dans l'équilibre mis en place par les sorcières et les vampires, les garous modifient la donne et engendrent quelques difficultés que Jane, engagée pour revoir la sécurité des clans vampiriques de La Nouvelle-Orléans, doit gérer. En effet, les félins souhaitent forger publiquement leur alliance à l'occasion d'une rencontre. La soirée tourne au cauchemar en raison du meurtre d'une femelle léopard-garou et de la disparition de Rick qui, étrangement, était présent sur les lieux. Le flic aurait-il été enlevé alors qu'il enquêtait sous couverture ou bien son comportement de Don Juan l'a-t-il mené au mauvais endroit au mauvais moment ? Ainsi, même si Jane sort de son rôle de chasseuse de vamps', l'action est au rendez-vous, renforcée par le mystère qui entoure les événements auquel la jeune femme se trouve confrontés. Comme à son habitude, elle va devoir faire preuve de persévérance et fouiller pour déterrer les petits secrets bien gardés.

     Parallèlement, Jane rencontre Girrard Di Mercy, un être aux pouvoirs surnaturels, ancienne Lame de miséricorde de Léo Pellissier. Il l'aide alors que des loups-garous hostiles cherchent la bagarre. Ennemis jurés de Léo Pellissier, ces charmantes bestioles ont été bannies de La Nouvelle-Orléans après une sombre histoire de trahison. Avec le coming out très publics des félins, la meute en profite pour faire valoir ses droits sur des terrains appartenant aux vampires afin de se constituer un territoire. Il va sans dire que Léo n'est absolument pas ravi de cette intrusion. Le maître de la ville voit aussi d'un mauvais œil la présence de Girrard dans les parages. Le rôle de celui-ci consistait à tuer les jeunes vampires qui ne dépassaient pas le devoveo, un état de folie propre aux dix à vingt premières années d'un nouveau-né, qui oblige leur créateur à les enchaîner le temps qu'ils reprennent leurs esprits. Banni par Léo pour une faute dont le roman révèle progressivement l'origine, le départ de Girrard semble avoir contribué au déclin de la santé mentale des clans et à leurs récents problèmes. Nos deux protagonistes vont régulièrement se croiser au gré de l'enquête de Jane sur le meurtre, et grâce à Girrard, celle-ci obtient moult informations sur les interactions entre les garous et les vampires. Ainsi, malgré l'introduction d'une nouvelle espèce, Faith Hunter ne peut s'empêcher de laisser une place à la politique vampirique.

     Côté personnel, la vie de Jane s'avère plutôt chaotique. En effet, sa relation avec Rick a passé un cap important, mais celui-ci disparaît mystérieusement et devient le premier suspect dans une affaire d'homicide. Concours de circonstance ou lien avec son enquête sous couverture ? Difficile de faire la part des choses quand le comportement de joli cœur du policier ne plaide pas en sa faveur... Il faudra que Jane utilise toutes ses ressources pour démêler ses sentiments. D'autant qu'Evangelina, l'une des sœurs de Molly, est restée sur place pour mettre de l'ordre dans le coven de la ville. Présente tout au long de l'histoire — elle réside dans la maison de notre héroïne — , la sorcière semble tremper dans des affaires louches. Jouant de ses pouvoirs de sorcière, elle en arrive même à perturber, plus ou moins consciemment, la vie amoureuse de Jane. La porteuse de peau va devoir réfléchir à ses sentiments pour Georges Dumas, alias Gros Bras, l'actuel domestique nourricier de Léo qui, contrairement à Rick, demeure bien présent à ses côtés. Même si la jeune femme se trouve devant un vrai casse-tête amoureux, les romantiques en seront pour leurs frais. Malgré quelques scènes qui font monter la pression, on ne peut pas dire que la romance fasse partie des thématiques traitées dans cet opus.

     Attention donc au lecteur inattentif, car dans l'univers de Faith Hunter les intrigues appartiennent à un canevas commun et se répondent l'une l'autre. Le tout possède une cohérence parfaitement construite et encadrée qui se dévoile peu à peu en ménageant le suspense. Le procédé narratif reste le même que pour les deux précédents tomes et l'on retrouve avec plaisir Bête, alter ego de notre héroïne, aux crocs et aux griffes particulièrement aiguisés avec qui Jane partage la narration. Malgré l'introduction de nouveaux personnages, les anciennes relations de Jane demeurent présentes à ses côtés pour mener l'enquête et l'épauler dans ses missions : un contexte familier bienvenu pour affronter la complexité du cheminement des différentes intrigues.

     Égale à elle-même, Faith Hunter nous propose une histoire de qualité, très dense et toujours aussi originale. Un vrai régal !