L’Anticipation Scientifique semble chômer ce mois. Deux ouvrages seulement qui, bien que non démunis de mérites, nous laissent un peu sur notre faim.
Plus qu’un roman, « Bureau de l’invisible », de Jean-Gaston Vandel (Fleuve Noir), est un recueil de deux nouvelles et d’une très longue novelette ayant pourtant un solide lien entre elles, en l’espèce le personnel du bureau en question – quatre jeunes savants et un médium qui se sont groupés pour venir en aide à leur prochain, moyennant finances s’entend, car, comme dit l’autre, il faut bien gagner son bœuf. Grâce à leurs connaissances variées, il n’est pas de problème qu’ils ne puissent résoudre ; quant à leurs loisirs (assez nombreux encore pour l’instant), ils les passent, à déchiffrer les mystérieuses inscriptions figurant sur un barreau de métal que l’un d’eux a découvert dans un désert et qui provient, très nettement, d’une autre planète. Ce barreau nous vaut d’ailleurs une visite des habitants de la planète en question qui, jusqu’à plus ample informé, font preuve d’une certaine neutralité. Mais Vandel, j’en suis sûr, prépare déjà une suite au « Bureau de l’invisible », dont les membres affronteront, j’en mettrais ma main au feu, les visiteurs interplanétaires le jour où ceux-ci reviendront chercher noise à nos petits-fils.
« Le tour du soleil en 80 jours », de Keller-Brainin (Ed. Grand Damier), est un ouvrage de vulgarisation scientifique qui tend à instruire en amusant. L’intention est donc éminemment sympathique. Les auteurs nous fournissent une foule de renseignements sur les planètes de notre système solaire et énoncent quelques timides hypothèses. Quant à l’histoire, elle peut se résumer en quelques lignes : deux pilotes intersidéraux, Lord Easton et Wallace Carter, sont en compétition. Le premier est un parfait honnête homme, le second une petite crapule (même pas tout à fait normale, à en juger d’après son comportement durant la deuxième partie du roman). Easton parie une fortune qu’il pourra accomplir en 80 jours le tour du système solaire, ce que Carter nie formellement. Et, pour empêcher son rival de gagner, il aura recours à des procédés pas très éthiques. Mais les bons gagneront, comme il se doit. C’est tout. Malgré cette simplicité, cette naïveté presque, l’ouvrage de MM. Keller et Brainin plaira certainement au public auquel il s’adresse.
Second Vandel à être réédité en « Lendemains retrouvés », celui-ci, publié en 1955 et dix-septième de |'auteur, ne lui rend pas davantage justice que Territoire robot : ces deux ouvrages sont précisément les deux plus faibles peut-être de sa production, et on peut s'étonner de la persistance de ce choix en creux. Cette fois, il s'agit d'une sorte d'entité collective formée par cinq personnes possédant (par mutation ? On ne sait trop...) des pouvoirs paranormaux ; mais ce gestalt, loin d'avoir l'épaisseur et la destinée tragique des « Plus qu'humains » de Sturgeon, fait prosaïquement fonction d'agence de détectives privés un peu spéciaux. Le roman est articulé autour de trois ou quatre enquêtes pas spécialement palpitantes et seule la dernière séquence, où entre en scène un mystérieux vaisseau extra-terrestre au-dessus d'un Londres paralysé, possède une intensité dramatique qui permet, un peu trop tardivement, d'apprécier le solide talent de conteur de Vandel.