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Sylva

VERCORS



GRASSET , coll. Les Cahiers rouges précédent dans la collection n° 158 suivant dans la collection
Dépôt légal : mai 1992
Roman, 288 pages, catégorie / prix : 57 FF
ISBN : 2-246-16662-4


Quatrième de couverture
     En 1924, un gentleman farmer anglais assiste à un prodige : une renarde sort d'une haie transformée en jeune femme. L'homme recueille l'animal et suivra au fil des jours ses progrès vers l'humanité : apprentissage de la parole, de la pensée.
     Ce récit (1961), écho à la Femme changée en renard de l'Anglais Garnett (1922), est une extraordinaire histoire d'amour entre un Pygmalion et son élève.
Critiques des autres éditions ou de la série
Edition GRASSET, Les Cahiers verts (1961)

    Le 16 octobre 1924, Albert Richwick, sujet britannique honnête, pondéré et dépourvu d'imagination, est témoin d'une métamorphose extraordinaire : sous ses yeux, ou presque, un renard se change en femme. Il recueille la créature, subvient à son existence, s'efforce de l'éduquer et, le charme encore un peu animal de celle-ci aidant apparemment, en tombe amoureux. Il s'inquiète de ses escapades vers sa forêt natale, et s'indigne lorsqu'elle se donne au premier primate venu (lequel appartient d'ailleurs à l'espèce humaine). Il réussit à vaincre les difficultés juridiques qui s'opposent à un mariage, et épouse l'ex-renarde. Celle-ci met au monde son premier rejeton, qui est bel est bien un renard.

    Telle est, sommairement résumée, la trame de ce roman. Évidemment, l'emprunt à « Lady into fox » saute aux yeux (à cela près que, dans l'œuvre de David Garnett, la transformation se faisait dans le sens contraire) et l'auteur ne s'en dissimule d'ailleurs aucunement. Lorsqu'il lui faut donner un nom à sa protégée, Richwick choisit Sylva (« Je devais bien cela à David Garnett. ») Cependant, il s'agit ici d'une fable pour grandes personnes, ayant une moralité et – le texte de présentation nous en prévient obligeamment sur la couverture – un sens caché : Sylva représente « l'être aux commencements, une allégorie de la Condition humaine ». En ce cas, il faut supposer que la confiance que Vercors accorde aux capacités de notre espèce sont assez limitées : Sylva se montre en effet d'une lenteur proprement désespérante dans l'assimilation des connaissances humaines (il fallait bien une obstination britannique pour les suivre, d'où sans doute le choix de la nationalité du narrateur) et le fait qu'elle donne le jour à un renard tendrait à impliquer que la connaissance n'est pas transmissible d'une génération à l'autre. Les idées de Vercors ne sont apparemment pas celles de Korzybski. 

    Laissant de côté tout symbolisme, il faut reconnaître que le récit abonde en détails vraisemblables : l'ignorance initiale de Sylva à l'égard de toute notion de propreté, sa façon de se nourrir ou de dormir, la difficulté avec laquelle elle accepte de se vêtir et ses escapades dans la forêt, tout cela se tient. Et il est normal, après tout, qu'une ex-renarde ne se montre pas difficile dans le choix de ses amants.

    Ainsi qu'il a été dit plus haut, cependant, l'intelligence de Sylva s'éveille bien timidement. Ce n'est aucunement de l'invraisemblance que le lecteur est ici tenté de reprocher à l'auteur, l'expérience pratique des transformations renard-femme faisant défaut, mais bien sa lenteur : il y a, dans le roman, un côté statique – voulu peut-être par la nature du sujet – qui empêche qu'on s'y attache véritablement. N'eût-il pas mieux valu condenser l'histoire en une nouvelle ? 

    Parallèlement à la lente ascension de Sylva vers l'humanité, Richwick assiste à la chute d'une femme – bien réelle celle-là – vers l'état de bête. Que cette Dorothy se détruise à l'aide de la drogue pendant que Sylva s'humanise tant bien que mal, qu'importe, après tout ? Richwick lui-même ne semble y porter qu'un intérêt relatif ; il est vrai qu'il demande noblement à Dorothy de l'épouser, mais il donne l'impression de le faire par acquit de conscience, pour pouvoir essuyer un refus et revenir rapidement auprès de Sylva. Dorothy n'est, pour lui, qu'une comparse. Elle l'est également pour le lecteur.

    Tout le personnage de Dorothy, toute sa déchéance, ne sont qu'accessoires. Ils ne semblent être là que pour permettre au livre « de faire le poids » en atteignant les 260 pages.

    Et ce chiffre résume sans doute le défaut du récit : celui-ci est manifestement trop long. On y remarque beaucoup de délayage, trop de redites (les réflexions du narrateur étant par exemple reprises sous forme de confidences à son entourage). En coupant, en s'accordant le luxe d'être moins explicite, en utilisant un peu plus le sous-entendu ou l'allusion, l'auteur eût pu faire une réussite de l'histoire de Sylva. Telle qu'elle nous est présentée, l'aventure devient lassante par ses dimensions.

Demètre IOAKIMIDIS
Première parution : 1/11/1961
Fiction 96
Mise en ligne le : 21/1/2025

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