LIVRE DE POCHE Jeunesse
(Paris, France), coll. Jeunesse n° 1176 Dépôt légal : septembre 2005 Première édition Roman, 256 pages, catégorie / prix : H10 ISBN : 2-01-321184-8 ✅ Genre : Science-Fiction
Quatrième de couverture
La vie dorée de Pelly D. Bascule le jour où les tests ADN deviennent systématiques dans la Cité Numéro V : elle pensait être Atsumisi mais n'est que Galrezi, artistiquement douée mais génétiquement inférieure.
La sécheresse menace Cité Numéro 1, majoritairement Atsumisi, qui exige des autres cités l'envoi de main-d'oeuvre Galrezi pour son irrigation. Chaque jour, des jeunes reçoivent leur avis de recrutement. Des émeutes éclatent et le couvre-feu est instauré. La guerre civile fait rage. La nuit, d'étranges feux s'élèvent : les Atsumisi « nettoient » le ghetto Galrezi. Pelly D. consigne tous ces événements dans son journal intime qui l'aide à surmonter les épreuves. Dans ce contexte de terreur, elle sait qu'elle doit fuir. Mais pour aller où ?
Critiques
Dans la Cité numéro V, sur une planète où se sont installés, il y a longtemps, des colons venus de la Terre invivable, il fait bon vivre pour Pelly D. — belle adolescente — , ainsi qu'elle le consigne dans son journal. Le classement en trois catégories — Atsumisi, Mazzini et Galrézi — des descendants des colons n'est pas encore officiellement ségrégationniste, papa gagne bien sa vie et Pelly peut dire qu'elle sera un jour maîtresse du monde. Mais Cité numéro I — où vit une majorité d'Atsumisi — manque d'eau et presse les cités voisines de l'aider. Lentement le climat et la vie autour de Pelly se dégradent — sa meilleure amie disparaît, les tests d'ADN devant déterminer votre catégorie sont obligatoires... Et Pelly se retrouve Galrézi, au plus bas de l'échelle sociale et au milieu des émeutes et des bombes, sans ses repères habituels.
Nous apprenons tout cela car Toni V, un jeune démolisseur préparant le terrain de la reconstruction de la Cité numéro V, n'a pas respecté les Règles et Règlements : il a conservé la gourde qui contenait le journal intime de Pelly D. Ainsi le récit de Pelly alterne avec les tranches de vie de Toni, et ce que l'on apprend du garçon permet de combler certaines lacunes du récit de la jeune fille...
Les personnages sont psychologiquement « justes », bien de leur âge et bien de leur monde, mais l'écriture et/ou la traduction semble(nt) manquer de souplesse. Tout est raide, figé dans un « classicisme » mal venu. Cela est d'autant plus regrettable que les changements d'attitudes de Toni et Pelly, les nuances qui insidieusement permettent au lecteur attentif de cerner le monde qui les entoure, sont remarquablement instillés dans le texte jusque à la dernière page. Le journal interdit de Pelly D. est un roman d'une grande noirceur qui fait passer de l'enfant à l'adulte en douceur, même si, comme Pelly et Toni, l'envie n'y est pas... On oubliera donc quelques raideurs d'écriture et on ne boudera pas son plaisir.
Lors de la réhabilitation de la Plaza, Toni V. trouve le journal intime d'une adolescente, Pelly D. Cette dernière raconte les derniers temps qui ont précédé les émeutes, sa vie si sympathique et branchée, puis le grand changement, lorsque les tests ADN ont été adoptés pour déterminer les classes sociales et l'avenir de chacun. D'un côté, les Atsumisis, capables en affaires et utiles au bon fonctionnement de la société, de l'autre, les Galrezis, des artistes volages qui n'ont que peu d'importance, des parias qu'on abandonne à leur plus grand dénuement. Un sort que Pelly D., issue d'une famille riche, subit de plein fouet. Pour elle, la descente aux enfers débute maintenant...
La construction de ce roman est parfaite dans sa montée dramatique. L'auteur commence par une véritable plongée dans l'univers futile et perturbé d'une ado, riche et gâtée de surcroît. On a le droit à ses difficultés à se fringuer, à trouver des amis ou amies, à s'exprimer autrement que par le mépris et une colère bien souvent injustifiée. Puis le grain de sable se glisse dans l'engrenage. Pour Pelly, toutes ces lois sur l'eugénisme sont de la foutaise et n'ont pas grande importance face à la tenue que portera untel ou unetelle pour la fête donnée dans la boîte branchée du moment. Pourtant, lorsque la politique s'insinue dans son quotidien d'ado exaspérante, qu'elle devient à son tour victime de l'injustice, il lui faut ouvrir les yeux. Lentement, doucement car tout est si sournois dans le monde des adultes. Sa vie se modifie sans qu'elle le réalise vraiment. Mais la déchéance approche inexorablement. Et il faudra attendre le trop-plein pour qu'enfin elle réagisse à la situation générale.
Certes influencé par Le Journal d'Anne Franck, une filiation dont l'auteur ne fait aucun mystère (et évoquant parfois l'excellent Journal de nuit de Jack Womack), l'intérêt premier de ce texte est d'adopter la vision d'un personnage résolument contemporain chez lequel l'ignorance des souffrances d'autrui est quasi totale du fait de sa vision d'un monde édulcorée par son entourage et les médias, la perception d'une adolescence d'aujourd'hui, habitée par des problèmes futiles, un personnage autocentré en tout. Le choc en est d'autant plus fort.
Ce roman, une vraie tragédie, nous rappelle que l'Histoire se répète sans cesse. On se doit de rester vigilant face à un monde en quête de repères de plus en plus ténus. Un livre en guise de mémo essentiel.