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Le Cavalier

Gisèle PRASSINOS



PLON (Paris, France)
Dépôt légal : 1961
Première édition
Recueil de nouvelles, 176 pages, catégorie / prix : nd
ISBN : néant
Format : nd
Genre : Fantastique


Pas de texte sur la quatrième de couverture.
Critiques

[Critique des 3 receuils de nouvelles suivants :

« Le cardinal de Virginie » par Marcel Schneider (Albin Michel).

« La dame de Murcie » par Noël Devaulx (Gallimard).

« Le cavalier » par Gisèle Prassinos (Plon ).]

 

    Trois recueils de nouvelles fantastiques nous sont proposés simultanément par divers éditeurs, ce qui est un hommage substantiel au genre que « Fiction » est la seule revue spécialisée à représenter en France.

    Ces trois volumes ont en commun plusieurs traits, dont l'examen peut servir à marquer les caractéristiques et les limites du fantastique français traditionnel. Disons si l'on veut que c'est du « fantastique de salon », aimable et policé, plus poétique èt rêvé que véritablement étrange, et auquel l'auteur s'adonne comme à un divertissement de bon goût plutôt que par une nécessité intérieure. On ne retrouve pas là les brumes et les cauchemars nocturnes du fantastique anglo-saxon, ni le délire orchestré d'un Jean Ray, ni l'angoisse métaphysique de la postérité de Kafka. Un peu moins de mesure, un peu plus de folie, seraient peut-être souhaitables. Cela dit, il s'agit d'ouvrages à la facture élégante et séduisante, dont la lecture est souvent attachante et ne laisse jamais indifférent.

    « Le Cardinal de Virginie » est le second recueil fantastique de Marcel Schneider, qui en outre avait déjà publié dans le genre deux romans : « La première île », et « Le sang léger ». Chose curieuse, alors que la nouvelle est la forme qui convient le mieux en général au fantastique, c'est dans ses romans que Marcel Schneider a trouvé son véritable souffle, et sa profondeur. Ses nouvelles en regard paraissent un peu inconsistantes, malgré leur aspect de pièces d'orfèvrerie admirablement travaillées.

    Marcel Schneider est un homme du passé égaré dans notre siècle. À l'ère des spoutniks et de l'atome, il continue paisiblement de cultiver la veine de Nerval, d'Hoffmann et des romantiques allemands. Il y a même un peu de Perrault en lui, comme dans l'histoire qui donne son titre à ce recueil, et où l'on voit un oiseau-fée qui fait un peu songer à l'Oiseau Bleu. 

    Cela mis à part, il y a un lien dans les nouvelles réunies ici : ce lien, c'est le XVIIIe siècle au carrefour de l'histoire et de la légende. Apparaissent dans ces pages des personnages tels que Cagliostro, le Marquis de Sade et la Margrave de Bayreuth, ou Arminius le Chasseur Maudit. Il en découle une unité de ton et d'ambiance qui communique aux récits une résonance collective compensant leur minceur.

    Noël Devaulx, lui aussi, avait précédemment publié un recueil fantastique, sous le titre « Bal chez Alféoni ». Dans « La dame de Murcie », il se montre un disciple mineur de Mandiargues et de Marcel Brion, ayant en commun avec le premier le goût des mystères charnels, des fêtes secrètes, des anomalies amoureuses, et avec le second une certaine immobilité minérale de l'action, une précision archéologique dans la description majestueuse du décor.

    Contre lui, inscrivons une timidité imaginative qui n'est peut-être qu'un dédain calculé, et se manifeste par le choix archiconventionnel des thèmes ainsi qu'un évident manque de souffle. Ses histoires restent comme la figuration de ce qu'elles pourraient être ; leur aimable surface dissimule un vide évanescent. 

    À son actif, par contre, il faut citer le ton allusif, le refus de l'effet, l'art de clore le récit en le laissant en suspens, sans que rien de vraiment matériel, de vraiment visible n'ait eu lieu. C'est peut-être au-delà de leurs dernières lignes que ses histoires, par un phénomène analogue à celui de la persistance d'une image rétinienne, rendent le mieux leur écho.

    Avec « Le cavalier », de Gisèle Prassinos, on s'envole d'un coup d'aile vers d'autres régions, aujourd'hui dûment recensées depuis qu'existe le surréalisme. Le volume renferme une série de contes alertes et déconcertants, qui sont autant de petits rébus, et dont le style est un mélange de grâce naïve et d'arêtes tranchantes. Certains d'entre eux rendent un son à la Béalu, mi-onirique mi-fantasque, d'où dérive un charme ambigu. D'autres sont trop visiblement mis en scène à coups d'accessoires surréalistes, dont la présence est aussi convenue que dans certains tableaux de Salvador Dali. C'est dans les plus dépouillés de ces intermèdes – tels que « L'homme aux questions », « La robe de laine », « L'ami d'enfance ». « Les retrouvailles » que Gisèle Prassinos parvient le mieux à inquiéter, par le simple dévoilement d'une incongruité fondamentale derrière la réalité terne de tous les jours.

Alain DORÉMIEUX
Première parution : 1/12/1961 dans Fiction 97
Mise en ligne le : 19/1/2025

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