Les conflits politiques et les crises de sociétés semblent passionner Alain Paris : Dairen, un satellite artificiel, sans commune mesure avec ceux qui entourent la Terre actuellement, un artefact géant, siège du gouvernement central et des administrations de la Sphère, dont l'origine se perd dans la nuit des temps, est régi par le Hon-Daïren, son autorité religieuse, et parle Kampaku, un seigneur de la guerre élu, issu de l'une des quatre familles régnantes de ce monde. Dairen circule dans l'espace et véhicule une idéologie conquérante dangereuse sur toute l'étendue de sa sphère d'expansion.
La crise éclate lorsque deux faisceaux de faits entrent en conjonction : d'une part, quand les forces militaires de Dairen, conduites par le Patrice Jath Baroda, l'un des prétendants au Kampa, aboutissent, sur Uyuni, à une impasse (les habitants de ce monde, les Zyis, sont invaincus et la colonisation semble impossible sans leur accord) ; et d'autre part quand le Kampaku, Maxence Darazon, décède en laissant sa succession ouverte. Les ambitions du Patrice Odovar Hallingkar servent alors de détonateur, lorsque Jath Baroda, victime d'un attentat, disparaît sur Uyuni et que son fils aîné, Oleg, le trahit, permettant ainsi l'élection de Hallingkar et l'éviction de Seth, le fils cadet de Baroda.
En fait, Seth se retrouve sur un monde mystérieux et mystique, la Terre, au moins du Gomen Nasaï, une force d'origine religieuse qui prône l'entente entre les races humaines et non humaines, et dont Deucalio est le fondateur. Grâce à l'enseignement de celui-ci, Seth deviendra une pièce capitale sur l'échiquier du conflit, lors du dénouement de la crise qui ébranle la société humaine de Dairen. Bien que le début et la fin de ce roman fassent songer, par certains côtés, à Dune de Frank Herbert, il faut constater que son auteur a su s'en écarter et faire œuvre de novateur, après avoir montré qu'il connaissait les classiques américains. A noter que ce sont les thèmes de l'intégration, du refus de la colonisation et de l'évolution qui permettent à l'écrivain d'être le plus personnel de donner un ton progressiste à cette longue saga qui s'inscrit dans une histoire du futur dont on peut espérer qu'Alain Paris écria d'autres chapitres.
Il est toujours agréable de signaler le talent d'un écrivain, lorsqu'il s'attaque a un genre déterminé et tient la gageure jusqu'au bout d'entraîner son lecteur dans une fantastique et superbe aventure, sans lui laisser le temps de respirer.
On attend encore plus d'Alain Paris.
Charles MOREAU
Première parution : 1/3/1989 dans Fiction 406
Mise en ligne le : 1/3/2002