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Voyage sous les flots

Aristide ROGER


Illustration de Roxane LECOMTE

PUBLIE.NET (Montpellier, France), coll. ArchéoSF précédent dans la collection suivant dans la collection
Date de parution : 4 décembre 2019
Dépôt légal : octobre 2019
Réédition
Roman, 168 pages, catégorie / prix : 16 €
ISBN : 978-2-37177-588-6
Format : 13,3 x 20,3 cm
Genre : Science-Fiction


Quatrième de couverture

Aventures extraordinaires de Trinitus — rédigées d’après le journal de bord de L’Éclair

L’Éclair reprit sa marche, et s’enfonça dans l’abîme. La largeur du tunnel était considérable ; la lampe du bateau, éclairant la masse liquide qui remplissait le gouffre, ne jetait sur ses parois qu’une vague lueur. On y distinguait pourtant quelques actinies et des poulpes, fixés aux aspérités de la pierre. Sur les bas-fonds rampaient des oursins et des crabes ; dans les sombres retraites de la voûte se remuaient confusément des êtres indéfinissables.

Aristide Roger est l’immédiat prédécesseur de Jules Verne. Avec son Voyage sous les flots, il nous entraîne dans des aventures sous-marines à travers le globe, de Calais à la mer des Sargasses, de l’Équateur à l’Antarctique, de l’océan indien à l’Océanie. Il est aussi le premier à utiliser le sous-marin comme un véhicule de l’imaginaire. Son Éclair n’est-il pas, d’ailleurs, le véritable héros de ce classique oublié de la science-fiction française ?

Critiques

En littérature comme en sciences, l'image du génie isolé du reste du monde est un mythe. Cet ouvrage remet ainsi en lumière l'invention du sous-marin dans la fiction en exhumant un texte immédiatement antérieur à Vingt mille lieues sous les mers. Dans ce Voyage sous les flots un savant, Trinitus, entreprend avec l'assistance de son serviteur et du prétendant de sa fille un voyage aux antipodes pour retrouver cette dernière ainsi que son épouse, perdues dans le naufrage d'un paquebot. Le ton, d'époque, est familier à celui qui lit assidûment d'autres auteurs de la période, au premier chef Jules Verne. S'il est moins pontifiant que celui de l'illustre auteur, plus léger dans l'ensemble, le récit alterne de la même façon dialogues vivants et longues descriptions. Il transcrit de la même manière outrancière l'émotion qui gagne les personnages, prompts à avoir la larme à l'œil, à se tenir les mains ou à se répandre en lamentations. Et il offre la même succession de leçons de choses, deux personnages faisant office de candides, auxquels le savant prodigue son savoir. Le départ sous la Manche est donc l'occasion de découvrir le câble sous-marin reliant le continent au Royaume Uni. Les Açores sont le moment de décrire la formation des îles volcaniques — avec quelle poésie ! — et le voyage jusqu'à la mer des Sargasses celui d'expliquer en détails la circulation océanique.

S'il montre ses limites dans l'écriture de péripéties souvent assez fantaisistes, Aristide Roger sait convoquer les images et le vocabulaire adéquat pour décrire d'une plume toute documentaire les environnement traversés. Ce qui amène le lecteur, en quelques paragraphes, à passer de : « À coup de harpons ils éloignaient les morses, les squales, les murènes, les roussettes, et deux fois ils durent faire usage de la foudre électrique pour détruire de gigantesques poulpes qui tendaient vers eux leurs horribles tentacules. » à : « Au milieu d'épais buissons de laminaires et d'hypoglosses aux feuilles planes, se dressaient les lomentaires cylindriques, recouvertes d'un mucilage hyalin, semblables à un revêtement de cristal. »

Comme cela se trouve fréquemment dans ce genre de récit d'aventure, la fin est précipitée, grâce à un deus ex machina, dans la description d'un bonheur lapidaire, en contraste avec les chapitres précédents, relatifs aux naturels rencontrés sur des îles à l'est de l'Australie, qui sont longs et embarrassants de notre point de vue moderne. Ce qui ne retire rien au plaisir de lire cette courte aventure qui préfigure donc, par bien des aspects, l'œuvre bien plus connue de Jules Verne.

Le texte, livré sous une jolie couverture et avec la maquette toujours simple et lisible de la collection ArcheoSF, souffre de quelques erreurs typographiques, trop nombreuses en début de volume surtout. Des défauts qu'il est facile de pardonner eut égard au travail réalisé par Philippe Ethuin, qui exhume avec bonheur des œuvres de proto-science-fiction (à l'intérêt peut-être variable, certes) et qui signe ici une introduction éclairante.

 

David SOULAYROL
Première parution : 25/11/2024 nooSFere


[Critique parue exclusivement dans la version numérique de la revue]

 

    Tout le monde aujourd’hui connaît le Nautilus, le fabuleux sous-marin du capitaine Nemo… mais qui se souvient encore de son immédiat prédécesseur, l’Éclair ? Personne ou presque. Imaginé par Jules-Aristide-Roger Rengade, alias Aristide Roger, cet Éclair est l’un des premiers submersibles de fiction. Raisons pour lesquelles on n’est guère surpris de voir Philippe Éthuin et la collection « Archéosf » tirer Voyage sous les flots de l’oubli dans lequel il avait sombré depuis près de cent cinquante ans. Paru en feuilleton dans les pages du Petit Journal entre le printemps 1867 et janvier 1868, le roman d’Aristide Roger est de fait antérieur au fameux Vingt mille lieues sous les mers de Jules Verne, dont la parution commence en mars 1869.

    Lorsque le professeur Trinitus apprend le naufrage du Richmond, navire sur lequel naviguait son épouse et sa fille, il décide de mettre à contribution l’invention sur laquelle il travaillait dans le plus grand secret depuis des mois : le sous-marin L’Éclair. Ovoïde long d’une quarantaine de mètres, le submersible est mû à l’électricité et permet d’embarquer trois passagers. Ce seront donc Trinitus, son ami Nicaise et le neveu de celui-ci, Marcel, qui nourrit pour la fille du professeur une tendre affection. Depuis Calais jusqu’à la mer de Corail où le paquebot a disparu, ce sera une aventure de tous les instants – entre tempêtes et embourbement dans la mer des Sargasses, entre le feu des volcans des Açores et les glaces du pôle Sud, les trois hommes auront fort à faire pour atteindre le but… et le lecteur pour tâcher d’oublier l’ombre écrasante de Jules Verne. De fait, Voyage sous les flots a pour lui sa brièveté et son caractère précurseur – quelques scènes préfigurent Vingt mille lieues… et Roger apprécie lui aussi les descriptions auxquelles le vocabulaire spécifique donne un lyrisme scientifique. Mené tambour battant, le récit se dévore d’une traite. L’âge du roman aidant, on lui pardonnera ses approximations – des erreurs n’empêchant pas un émerveillement enfantin et aquatique – et une fin ayant passablement mal vieillie. Les amateurs de vieilleries sauront apprécier cette odyssée sous-marine ; les autres resteront à bord du Nautilus, ce qui n’est pas forcément un mal.

Erwann PERCHOC
Première parution : 1/4/2020 dans Bifrost 98
Mise en ligne le : 12/1/2024

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