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Animaux fabuleux, créatures imaginaires

Willy LEY

Titre original : Exotic zoology, 1959
Première parution : New York, USA : The Viking Press, 1959   ISFDB
Traduction de Janine CLAUDE

JULLIARD (Paris, France)
Dépôt légal : 1964
Première édition
Essai, 336 pages, catégorie / prix : 18,00 F
ISBN : néant
Genre : Imaginaire


Critiques

    Sans aucun doute, Willy Ley est le meilleur écrivain actuel de vulgarisation scientifique.

    Une telle affirmation – qu’il est permis de faire sans méconnaître le talent très estimable d’Arthur Clarke, d’Isaac Asimov et de plusieurs autres – se justifie par la manifestation, dans les écrits de Ley, des quatre qualités suivantes : l’étendue des connaissances et leur précision, l’enthousiasme pour le sujet traité, le don de présenter ce sujet avec clarté, et l’art d’écrire de façon vivante et attrayante en restant aussi éloigné de la facilité journalistique que de la pédanterie et du désir d’« en mettre plein la vue » à son lecteur.

    Connu surtout pour ses remarquables ouvrages sur la propulsion par fusées et sur la conquête de l’espace (il fut, comme le jeune Wernher von Braun, membre du Verein fur Raumschiffahrt en Allemagne il y a trente-cinq ans), Willy Ley étudia d’abord les sciences naturelles, et n’a jamais cessé de s’y intéresser. Entre 1948 et 1955, il publia plusieurs ouvrages se rattachant à ce qu’il appela la « zoologie romantique » (The lungfish, the dodo and the unicorn ; Dragons in amber ; Salamanders and other wonders). Il y évoquait des animaux de légende en cherchant à distinguer comment cette légende avait pu naître dans chaque cas ; il parlait d’espèces disparues, d’autres qui étaient en voie de disparition, et d’autres encore qui n’ont, paléontologiquement parlant, aucune raison d’exister toujours dans notre XXe siècle (le cœlacanthe étant, bien entendu, le plus remarquable représentant de ce dernier groupe).

    En 1959, Willy Ley rassembla les principaux chapitres des trois livres mentionnés plus haut, les mit à jour, ajouta un certain nombre d’études consacrées à des sujets dont il n’avait pas traité auparavant, et il en résulta le captivant ouvrage intitulé Exotic zoology. Ces Animaux fabuleux et créatures Imaginaires comprennent seize des vingt-deux chapitres de l’édition américaine, les raisons qui ont présidé à l’élimination des six autres relevant apparemment du hasard et du nombre de pages que devait comporter le volume français. Les chapitres supprimés traitaient de diverses découvertes paléontologiques, des particularités de la faune australienne et du cœlacanthe.

    Les premiers chapitres présentent quelques-uns de ces « animaux fabuleux » : la licorne, les diverses variétés de dragons, les animaux qui naissent de plantes, l’énigmatique sirrush qu’un artiste babylonien représenta sur les murailles de la porte d’Istar, l’abominable homme des neiges et les « petits hommes », pygmées de la légende. Les connaissances encyclopédiques de Willy Ley lui permettent de multiplier les références, de comparer les sources et de peser les interprétations avant de tirer ses conclusions. Il n’est ni sceptique par principe, ni arbitrairement enthousiaste devant toute suggestion d’inconnu qui allécherait son lecteur. Ce qu’il dit du yéti himalayen constitue un exemplaire résumé du problème tel qu’il se pose actuellement.

    Les quatre chapitres suivants (« suivants » dans l’édition française) évoquent des énigmes qui se rapportent à l’océan, et dont certains aspects seront familiers au lecteur français grâce aux travaux de Bernard Heuvelmans. Il y est question, en particulier, du céphalopode gigantesque que l’on a longtemps appelé kraken, ainsi que du grand animal qui donna naissance aux bruits sur le serpent de mer, et dont l’existence paraît hautement probable, pour ne pas dire certaine. Le lecteur suivra aussi, dans cette partie, la révélation progressive de l’étrange histoire qui est celle de l’anguille.

    Mais il est inutile de détailler toutes les découvertes que pourra faire, au hasard de ces pages, celui qui se passionne pour les sciences naturelles – et aussi, à plus forte raison, celui qui est profane dans ce domaine. Le livre est de ceux qui donnent envie d’en savoir davantage – même si, dans la plupart des cas, cela est précisément impossible : soit que Willy Ley ait résumé tout ce que les auteurs anciens ont écrit sur la question, soit que les découvertes restent tout bonnement encore à faire.

    L’ouvrage a été traduit par Janine Claude, avec application mais sans brio. On peut la féliciter d’avoir donné des extraits de l’Odyssée dans la traduction française de Victor Bérard, au lieu de retraduire les passages anglais cités par Willy Ley, mais on ne voit guère la nécessité de conserver une indication comme (à la page 44) « à Anvers, nom français d’Antwerpen ». Cette forme d’Antwerpen est sûrement moins familière que celle d’Anvers aux lecteurs de sa traduction.

    Il y a cependant des incorrections dans cette traduction, et plusieurs de celles-ci ne rendent pas justice au style de Willy Ley, ni à son sens de l’humour. Qu’il suffise d’en donner un exemple. Dans le chapitre intitulé L’arcanum magnum de l’Empereur, l’auteur parle des alchimistes que les monarques européens gardaient à leur service dans l’espoir de les voir découvrir un jour la pierre philosophale. Janine Claude écrit ceci : « Si l’alchimiste trouvait le secret de fabrication de l’or, tous les problèmes financiers étaient du même coup résolus ; dans le cas contraire, la perte était minime, et se réduisait à une poignée d’or abandonnée à un alchimiste incompétent. » Or, dans le texte original, la seconde partie de la phrase est plus savoureuse, parce que plus directe : « Dans le cas contraire, » écrit Willy Ley, « la perte était minime, consistant en une poignée d’or et en un alchimiste incompétent. »

    Il n’importe : en dépit des faiblesses de cette traduction, l’intérêt du livre est considérable. Souhaitons que le lecteur français ait bientôt l’occasion de découvrir – dans une bonne traduction, si possible – la remarquable histoire de l’astronomie que Willy Ley a publiée il y a quelques mois aux États-Unis sous le titre de Watchers of the skies.

Demètre IOAKIMIDIS
Première parution : 1/8/1964 dans Fiction 129
Mise en ligne le : 28/12/2023

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