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La Citadelle du Titan

Nicolas CLUZEAU

Cycle : Le Dit de Cythèle  vol. 3 


Illustration de Luis ROYO

NESTIVEQNEN , coll. Fractales / Fantasy précédent dans la collection suivant dans la collection
Dépôt légal : novembre 2003
Première édition
Roman, 448 pages, catégorie / prix : 22,80 €
ISBN : 2-910899-85-3
Genre : Fantasy


Quatrième de couverture
     Emportant avec elle l'âme de son mari, Cythèle et ses trois compagnons — un puissant archimage, un valeureux homme-félin et une combattante sans foi ni loi — se sont enfuis du monde démoniaque. Suivant la prophétie du Dieu des Morts, il leur faut à présent passer dans un des trois mondes Titaniques et rejoindre l'Asgard éternelle.
     Cependant, tout n'est pas aussi facile, car une vieille ennemie et un mage d'un ordre vieux de quatre mille années s'intéressent de près à aux. Au miliue d'un déchaînement de bataille opposant anciens dragons, Nibelungen, géants et héros asgardiens, Cythèle et ses compagnons auront fort à faire pour comprendre et survivre à l'énigme de la citadelle du Titan.

     Ayant à présent installé ses pénates à Ankara, Nicolas Cluzeau n'en continue pas moins à décrire son Multivers structuré, gigantesque et coloré, dont on n'entrevoit qu'une parcelle dans chacun de ses romans.
     Aimant J.R.R. Tolkien et fervent admirateur de Jack Vance, il se dit volontiers influencé par leurs mondes dynamiques et leurs proses magnifiques.
Critiques
     [critique conjointe des Larmes du Démon et de La Citadelle du Titan]


     Suite aux événements contés dans La Ronde des vies éternelles, la Hiérarche Cythèle part à la recherche des âmes dispersées de sa famille. Elle commence par celle de Thadélis Argélys, son mari dans une vie antérieure, enfermée dans une des larmes de sang versées par le prince Desrad : Les Larmes du Démon.

     Il n'est ni facile ni utile de résumer davantage cet ouvrage dense à la construction complexe. Si Cluzeau reprend le schéma classique d'une quête, ce n'est pas pour nous offrir un récit linéaire paresseusement émaillé de péripéties sans imagination mais pour réunir une impressionnante foule d'anecdotes, de hauts-faits, de héros et de monstres, pour façonner une Histoire aussi fourmillante, tortueuse et partielle que l'Histoire véritable, bref pour asseoir la construction de son épatant Multivers.
     Le parcours de Cythèle alterne ainsi avec les Confessions de Thadélis Argélys et avec d'autres récits enchâssées indépendants mais complémentaires. Ici nous apprenons comment les créatures nommées « Naturae Mesquinus » — Tranchepierres, Videsèves et Cassetroncs — ont été conçues par un nécromant fou ; là nous assistons à l'extraordinaire bataille de Dammarius Havrial, l'une des Grandes Tragédies de la Magie ; ailleurs nous suivons une nouvelle enquête des magiciennes-détectives Harmelinde et Deirdre, les héroïnes du recueil éponyme ; autre part nous déplorons la mort de l'Archimage Triliock, parti dérober un objet magique avec son dragon Jetrothramberylstiyidimistir ; plus surprenant encore, nous voyons soudainement surgir d'une autre dimension des navires de guerre et des blindés, des engins apparemment modernes mais qui tirent leur énergie d'un minerai, le terraverre, mélangé à la substance d'élémentaires de feu...
     Il s'agit donc d'un véritable roman-mosaïque, d'un puzzle narratif foisonnant qui exige du lecteur une attention constante, car les protagonistes, lieux et temps changent d'un chapitre à l'autre. Comme le souligne Cluzeau : «  Même s'ils semblent plus particulièrement sortis des méandres compliqués d'un auteur qui aime perdre son lecteur, ces passages sont révélateurs, par un bien étrange paradoxe qu'ici nous appelons “La Semence des Indices Choisis”, de la cohésion du Multivers. » En effet, si ce Multivers autorise, comme celui de Moorcock, la coexistence d'univers a priori incompatibles et de panthéons contradictoires, sa cohésion est soulignée par un subtil jeu d'influences qui permet de trouver les causes d'une situation donnée dans des événements vieux de plusieurs millénaires ou situés dans d'autres plans de la réalité — un jeu sous-tendu par une réflexion sur la politique et le pouvoir, hors de tout manichéisme, hors de toute dichotomie réductrice entre bien et mal.

     Par comparaison, La Citadelle du Titan est beaucoup plus simple : seuls quelques Rêves y ponctuent les étapes d'une quête moins éclatée qui se déroule cette fois dans les glaces du Nord, parmi les figures des mythologies nordiques comme Loki, et qui permet de découvrir l'histoire millénaire des Sorciers d'Argile.
     Il est d'ailleurs remarquable de noter à quel point l'unité de chacun des trois romans qui composent le Dit de Cythèle est grande, aussi bien sur le fond que sur la forme ou la tonalité : chacun pourrait quasiment être lu indépendamment, tout en demeurant étroitement lié aux autres ouvrages de Cluzeau situés dans le même Multivers. Leur richesse et leur diversité ont l'avantage d'éviter la monotonie et de rendre la lecture stimulante, même si, pour s'y retrouver, le lecteur apprécierait parfois de pouvoir consulter une chronologie ou une encyclopédie « multiverselle », au lieu des trop nombreuses notes de bas de page, pas toujours très utiles et qui rompent le rythme de lecture.

     Au fil des romans et des recueils, l'ambition et l'originalité de l'œuvre de Nicolas Cluzeau se sont confirmées : à l'attrait de son pittoresque Multivers, soumis aux lois précises de la magie « ondiligne », s'ajoute le charme d'une écriture tonique qui sait se faire tour à tour truculente, onirique, épique ou horrifique... Désormais, il peut rivaliser avec les plus grands créateurs d'univers d'heroic, de high mais aussi de science fantasy.

Pascal PATOZ (lui écrire)
Première parution : 1/6/2004 nooSFere

Critiques des autres éditions ou de la série
Edition BLACK BOOK, A dé couvert (2011)

     Après un deuxième tome qui lance véritablement l'intrigue, la « quête principale », Nicolas Cluzeau continue ici sur son élan et nous fait découvrir un autre monde de son multivers. Son époux Thadélis retrouvé, Cythèle part avec les compagnons rencontrés dans son aventure précédente à la recherche de son fils Thamien. Là aussi le début de l'histoire comporte tous les éléments d'une fantasy classique — un héros, une quête, etc. — , mais cette fois l'auteur ne va pas dans plusieurs directions en même temps. La narration se focalise essentiellement sur la hiérarche et ses acolytes, dont les tribulations font découvrir au lecteur la richesse des mondes nordiques. Inspiré des légendes scandinaves, ce récit nous permet de revoir toute cette mythologie : dieux d'Asgard, Æsir, Héros, Nibelungen, complot, trahisons, guerre... tout le folklore propre aux sagas qu'aimait tant J.R.R. Tolkien. Mais à cause justement de ce Grand Ancien et de son amour transposé dans Le Seigneur de Anneaux, à cause aussi des nombreux ersatz qui ont suivi, cet univers nous est déjà bien familier et on se prend à regretter l'originalité des mondes aperçus dans Les Larmes du Démon. Ne reste plus que le plaisir de la référence, relevée par l'utilisation de personnages peu connus (ou inventés) comme le fils de Loki, Gunnar, ou les enfants du géant Thrym.

     Outre ce classicisme, un autre élément dénote dans le texte, à savoir la faiblesse de la psychologie des personnages et les limitations dans leurs actions. Peu développés, les héros se résument le plus souvent à une simple fonction (le garde du corps immuable ; le mage décontracté ; la guerrière revancharde mais plaisante, etc.). Même Cythèle, l'héroïne que l'on suit depuis plus de 1 500 pages, n'est pas cohérente dans sa psychologie, notamment par son inflexibilité ahurissante :
     « — Je poursuis mon dessein et je prends toute aide qui s'offre en chemin. [...] Je veux juste sauver des âmes injustement traitées.
     — Même si, dans votre sillage, des nations ou des dimensions entières sont mises à feu et à sang ?
     — Comme je vous l'ai dit, seule m'importe la sauvegarde des âmes qui me sont chères. » (P62-63)
     Alors qu'il aurait pu en faire un être complexe, mélange de misanthropie et d'amour, l'auteur justifie les choix de son héroïne et la rend trop « gentille », simple moteur inébranlable, donc impersonnel, de son intrigue. De même certains deux ex machina résolvent trop facilement certaines situations difficiles dont le développement aurait justement donné du corps à l'ensemble et accru la crédibilité de l'œuvre. Nicolas Cluzeau ne prend pas ce chemin, peut-être pour privilégier la description de son univers ou peut-être, à l'instar d'un Guy Gavriel Kay qui sait esquiver lui aussi des événements pourtant logiques, par amour pour ses héros.

     Bref, comme dans le deuxième volume, le développement psychologique des personnages ou la finesse de l'intrigue deviennent secondaires et laissent la priorité à la cohérence du multivers, auquel l'auteur ajoute une nouvelle dimension certes classique par ses références, mais plaisante par sa richesse. À chaque lecteur de savoir si la création de ce genre d'univers assez fouillé est ce qu'il recherche dans un ouvrage de fantasy.


Gaëtan DRIESSEN
Première parution : 21/9/2011
nooSFere

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