« Le nez de Cléopâtre : s'il eût été plus court, toute la face du monde aurait changé. »
Blaise Pascal
Le roman de Jean-Claude Albert-Weil que vous allez lire est une
uchronie. Comme Pascal, l'auteur s'est dit que l'histoire aurait pu suivre un cours différent, rendant le monde dans lequel nous vivons aujourd'hui radicalement autre. Par exemple, il aurait suffi, comme le propose
Sont les oiseaux... que Franco laisse aux armées nazies le droit de passage en Espagne pour envahir Gibraltar et, un demi-siècle plus tard, l'Europe dénazifiée en serait à son quatrième Impérium...
Sont les oiseaux... décrit cette Europe-là. On y parle une langue pleine de néologismes étranges, on y vit une sexualité libérée de tous les tabous judéo-chrétiens, on y passe ses vacances à bord du paquebot Heidegger, gigantesque hôtel immaculé perché au sommet du mont Blanc et on y roule, sans but, sur la Panfoulia, autoroute transcontinentale qui ne mène nulle part, bordée de masochiums, ces maisons closes d'un type nouveau. On y intrigue, aussi, et l'on y suivra plus particulièrement le cheminement de Carl, enfant chéri du régime, amateur de jazz et membre d'une caste d'élite de policiers politiques épris de métaphysique.
Roman visionnaire, hyperréaliste et total d'un univers qui aurait pu être le nôtre, Sont les oiseaux... nous envoie dans une autre dimension que Jean-Claude Albert-Weil, par l'acuité de son écriture et le souffle de son imaginaire, rend incroyablement réelle.
Jérôme Leroy