Ce court roman des Strougatski ne se distingue que médiocrement par l'humour pataud (ou peut-être difficile à transcrire) qui permet à la quatrième de couverture de tenter une comparaison avec Clochemerle. Malgré la référence implicite dans le titre, les Martiens n'ont rien à voir avec ceux de Wells, pour autant qu'on le sache, puisqu'ils jouent les Arlésiennes dans ce journal confus des événements tenu par un prof à la retraite, un peu maniaque sur les bords.
Mais peut-on vraiment lui reprocher sa confusion ? Elle n'est que le fruit du nuage de fumée entretenu par les média officiels, les seuls auxquels il ait accès. C'est là le vrai sujet du livre : la désinformation et les virages politiques en épingle à cheveux auxquels sont soumis les citoyens soviétiques. Cela, évidemment, la quatrième de couverture ne pouvait s'en vanter, sous peine d'ennuis avec le bureau soviétique des copyrights ! Mais sur ce plan, le livre est bien clair.
Si ce n'était leur goût pour le suc gastrique, les Martiens pourraient finalement n'être qu'une équipe dirigeante de plus, avec ses propres lubies sur le plan agricole (la passion khrouchtchévienne du maïs est égratignée au passage). On ne sait pas grand-chose sur leur compte, les rumeurs nées autour d'une table bien garnie en alcools submergeant sans peine les bribes de nouvelles dignes de confiance. Quant aux communiqués de la presse et des administrations, ils sont aussi peu fiables que ce démenti qui spécifie que c'est dans une usine souterraine de confitures que s'est produite une dévastatrice explosion.
Si on le lit toutefois sans garder à l'esprit cet arrière-plan d'insinuations satiriques, le livre est terne, sans bien entendu le moindre brin d'héroïsme. Il ne propose pas non plus de jugements moraux, ce qui peut être une bonne chose mais ne facilite pas non plus une lecture au premier degré. Amateurs de sensations fortes s'abstenir.