La Terre est bien vieille, mais la vie bien belle pour les derniers des immortels qui n'ont d'autre souci que de s'inventer des passe-temps originaux. Pour Jherek Carnelian, la question est réglée : l'amour que lui inspire la vertueuse Amelia ne lui laisse pas une seconde de répit, la belle lui glissant sans cesse entre les doigts. Mais voilà qu'une indocile machine à voyager dans le temps les propulse tout deux sur une plage de la préhistoire où ils pourraient enfin tendrement robinsonner s'ils y trouvaient au moins de quoi se sustenter. Echappant in extremis à la mort par inanition, ils rejoignent l'époque de Jherek pour y apprendre une affreuse nouvelle : partout, les Galaxies ont commencé à exploser et pour la vieille Terre, ce n'est plus qu'une question de jours. Est-ce donc vraiment la fin du monde ? Est-ce donc vraiment la fin des rires et des chants ?
L'auteur
Michael Moorcock, né en 1939, est un des maîtres de l'héroic-fantasy, qu'il a enrichi de cycle aussi célèbres que ceux d'Elric le nécromancien ou de Corum. Mais il a aussi largement oeuvré pour la science-fiction comme auteur des sagas consacrées au personnage de Jerry Cornélius, une de ses créations les plus originales, et rédacteur en chef de la mythique revue anglaise New Worlds, qui contribua en son temps à faire radicalement évoluer le genre.
Troisième et dernier volet (en principe) de la trilogie des « Danseurs de la Fin des Temps » contant l'idylle difficile entre Jherek Carnelian, jouvenceau naïf et libertin de la Fin des Temps, et Mrs Amelia Underwood, jeune fille de bonne famille et moralité de la fin de l'ère victorienne (Bromley, 1896). Dois-je vous rappeler les mille et une aventures qui émaillent les deux premiers tomes 1 ? J'espère que non, car celui-ci étant rigoureusement la suite, il est préférable de les connaître. D'autant qu'ici les mystères tombent : Amelia Underwood avoue enfin ouvertement son amour à Jherek (deux tomes que ça couvait !) ; on y apprend qui est réellement Lord Jagged des Canaries (le Lord Chiaf of Justice Jagger ? le journaliste Jackson ? un Voyageur du Temps ? Dieu-le-Père ?...) ; on y découvre le véritable aspect de la Terre à la Fin des Temps, hors de toute illusion : spectacle absolument naturel, inévitable, tangible, en décor, couleurs et risques réels ; Amelia évolue à toute vitesse (elle devient presque féministe !) tandis que Jherek ne sait toujours pas ce qu'est exactement la « vertu » ; la police londonienne, inspecteur Springer en tête, poursuit toujours les abominables et vulgaires Lat à travers les âges jusqu'à la fin du monde (et même au-delà !) ; Harold Underwood, le mari trompé, se réfugie dans la foi religieuse et réussit même à se faire un disciple ; Mongrove et son copain l'extraterrestre Yusharip sont plus sinistres que jamais, le duc de Queens perd toujours le contrôle de ses fêtes... et Moorcock continue de nous charmer et nous faire rire — bien que le dynamisme exubérant des deux premiers volumes s'essouffle un peu, au profit d'une nette tendance à philosopher (ou plutôt « dialectiquer » au sujet de ce, sempiternel boulet qu'est la morale). Dommage... Enfin, c'est malheureusement la régle générale avec les trilogies.
« La fin de tous les Chants » reste néanmoins une œuvre rare - — dans la mesure où l'humour est rare en SF — disons que ce livre (cette trilogie) est a l'humour ce qu'Elric le Nécromancien est à l'heroic-fantasy. Si vous aimer Moorcock ou l'humour, ne la ratez pas. Sinon, vous êtes vraiment pince-sans-rire, ou trop épris de morale. Profitez-en pour changer, selon la voie difficile-mais-belle de Mrs Amelia Underwood.