Peu après la parution en Allemagne des célèbres Contes de Grimm (1812-1815), le grand écrivain allemand E.T.A. Hoffmann, qui donnera au fantastique ses lettres de noblesse, publie avec la complicité de deux de ses amis du « Club des Frères de Saint-Sérapion », six récits merveilleux pour petits et grands.
Le lecteur trouvera ainsi dans ce volume quatre contes inédits en France, écrits par La Motte Fouqué, l'auteur d'Ondine, et par Contessa, à qui l'on doit l'inquiétant Homme vert.
Mais c'est aussi l'occasion de redécouvrir, dans leur version intégrale, deux contes d'Hoffmann, dont le célèbre Casse-Noisette et le Roi des Rats, popularisé plusieurs décennies plus tard par le ballet de Tchaïkovski.
Ces histoires, tour à tour tendres, cocasses, malicieuses ou terrifiantes, nous plongent avec bonheur dans l'univers des romantiques allemands du début du XIXe siècle.
Le 3 octobre 1878, une pluie de comètes — ou de fragments d'une grosse comète — a frappé de plein fouet la Terre et balayé l'hémisphère Nord de la Russie à l'Amérique du Nord, provoquant d'innombrables tsunamis, bouleversant durablement les courants marins et les conditions climatiques. Un terrible hiver perpétuel s'est abattu sur l'Europe, en même temps qu'une famine universelle. L'Empire britannique a cependant survécu, transféré en Inde au terme d'un Exode massif et au prix de sanglantes mutineries.
Dans les années 1890, la population totale de l'Europe s'est réduite à quelques millions d'habitants, celle de l'Inde est passée de 200 à 50 millions.
Cette anthologie de six contes regroupe en fait deux recueils distincts parus en 1816 et 1817, écrits par trois des plus célèbres romantiques allemands et destinés aux enfants comme l'indique le titre original : Kinder-Mährchen.
Le Repas d'adieu, de Contessa, raconte comment une famille ruinée, obligée de quitter son foyer, voit son dernier repas au logis se transformer en une folle sarabande, à la fois terrifiante et heureuse.
Le Petit Peuple, du baron de La Motte Fouqué, est un délicieux récit qui montre avec malice comment l'apprentissage de la lecture peut pervertir l'esprit joyeux et insouciant du Petit Peuple — une conclusion caractéristique d'un auteur qui « réaffirme sans relâche son idéal chevaleresque contre le monde moderne. » (p.230)
Inutile de rappeler l'histoire de Casse-Noisette et le Roi des Rats, incontestablement le plus célèbre des textes ici rassemblés, grâce au ballet de Tchaïkovski et aux multiples albums illustrés pour tout-petits. Il est très plaisant de redécouvrir ce conte d'Hoffmann dans sa version complète.
Le premier des Kinder-Mährchen eut un succès mérité et les trois amis décidèrent de recommencer l'année suivante, mais sans indiquer cette fois qui était l'auteur de chacun des contes, tout en s'amusant à se parodier l'un l'autre pour mieux brouiller les pistes. Nous laisserons le lecteur découvrir la teneur de ces trois nouveaux récits — tout aussi savoureux que la première fournée, même si le second recueil fut moins bien accueilli et demeura donc sans suite. Arrêtons-nous plutôt sur l'une des annexes, composée d'extraits des Entretiens des Frères de Saint-Sérapion, un récit destiné à servir de cadre à plusieurs nouvelles. Hoffman y écrit : « C'est à mon avis une lourde erreur de croire que des enfants à l'imagination et à l'esprit vifs (les seuls dont il saurait être ici question) puissent se satisfaire de radotages creux tels que l'on en rencontre souvent dans ce que l'on ose appeler des contes. Car ils ont certes de tout autres exigences ! Et il est étonnant de voir avec quelle justesse, avec quel enthousiasme leur esprit est capable de concevoir mainte chose qui échappe totalement à plus d'un papa fort avisé. »
On voit avec quel respect Hoffmann considèrait le jeune lectorat — plus d'un auteur moderne ferait bien d'en prendre de la graine et de renoncer aux « radotages creux ». Cet état d'esprit explique sans doute pourquoi les six contes de L'Epée et les serpents peuvent être encore lus avec grand plaisir par les amateurs de fantasy de tous âges. Voilà un recueil de plus à élever au rang de « classique ».